Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/160

Cette page a été validée par deux contributeurs.

enterrements, reçurent le nom de chemins de la mort (hent ar Maro).

Malheur au propriétaire assez mal avisé pour vouloir interdire, sur ses terres, l’accès d’une de ces voies sacrées[1].

Je venais de prendre à ferme le domaine de Kerlann en Penhars, voici de cela une trentaine d’années. Parmi les prairies dépendant du domaine, il s’en trouvait une qui n’était que marécages et fondrières. Une voie charretière la traversait. Je la fis condamner, pour empêcher mes bêtes d’aller s’embourber dans ce sol mouvant. Aux deux issues, je fis mettre des barrières fixes (march-cleut).

Un matin, comme j’étais aux champs, quelle ne fut pas ma surprise en voyant un enterrement arrêté devant une de ces barrières.

Je courus de ce côté.

— Que voulez-vous ? demandai-je à l’homme qui conduisait la charrette funéraire.

— Passage, parbleu !… De quel droit as-tu bouché le chemin de la mort ?

— Malheureux, si tu engageais ta charrette dans ce pré, je suis certain que tu ne l’en tirerais plus.

— C’est par ici que nos morts sont toujours allés

  1. Il ne manque pas d’endroits en Basse-Bretagne où ce genre de servitudes existe encore.