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nistre dans les parages de Tlle de Sein, Ton voit apparaître un baleau-fantôme, tantôt incliné sur les eaux sombres, la pointe de son « gui » trempant dans la vague, tantôt dessiné en silhouette indécise sur le fond orageux du ciel.

On le désigne sous le nom de bag-noz (barque de nuit) parce que c'est surtout à la tombée de la nuit qu'on le voit soudain surgir, sans qu'on puisse dire de quelle direction il vient, ni quelle route il fait. Car il s'évanouit tout à coup, au moment où on le regarde, pour se montrer, Tinstanl d'après, sur un autre point de l'horizon. Il vogue toute voile dehors, avec un pavillon noir en berne.

Les barques de. l'île Tont souvent croisé, quand elles rentraient du large, aux premiers signes avant-coureurs du mauvais temps. Quelques-unes même ont essayé de l'accoster, pensant que c'était quelque bateau en détresse, d'autant que son équipage — qui doit être nombreux — ne cesse de crier et d'appeler, comme pour demander du secours, avec des voix suppliantes, des voix tristes à fendre Tâme. Mais, sitôt qu'on faisait mine d'approcher, la vision s'efl'açait, et les voix elles-mêm^s devenaient si lointaines qu'on ne savait plus si c'était dans les profondeurs de la mer ou dans les profondeurs du ciel qu'on les entendait hurler.

On raconte cependant qu'une nuit, un pilote de l'île parvint à serrer le bateau-fantôme d'assez près pour constater qu'il n'y avait personne à bord, sauf, sur l'arrière, l'homme de barre. Le pilote héla cet homme :