Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 2 1902.djvu/217

Cette page n’a pas encore été corrigée



Ma grand'mère n'insista pas, mais elle était intérieurement troublée et, le soir, quand elle fut au lit, seule avec son homme, elle lui dit :

— Tu ne sais pas, Piton ? Le miroir a sûrement quelque chose qui n'est pas naturel. Nous l'avons trouvé qui pleurait.

Le vieux se moqua d'elle.

— Allons donc !... Tu n'es pourtant pas arrivée à ton âge sans savoir que le verre sue quelquefois ?

— Suer !... Suer !,.. Pas en plein été, peut-être, et dans l'endroit le plus sec de la maison, encore !

— Ta, ta, ta !... Des bêtises !... Laisse-moi dormir. La nuit se passa. Quand ma grand-mère se leva le

matin pour préparer le café, elle entendit au-dessus aller et venir la filleule que les cloches du purdon avaient probablement réveillée plus tôt que d'habitude et qui, déjà, devait s'attifer pour paraître à son avantage parmi les îliennes. Puis le bruit des pas cessa et, tout à coup, un grand cri retentit.

— Jésus-Dieu ! qu'est-ce qu'il y a ? demanda ma grand'mère en se précipitant dans l'escalier.

Elle poussa la porte de la chambre : Marie Dagorn, à demi-évanouie sur le parquet, lui désigna du doigt le miroir. Et ce fut au tour de la vieille de reculer d'épouvante, car un visage de femme apparaissait dans la glace, qui n'était ni le sien, ni celui de la jeune fille, ni celui d'aucune personne de sa connaissance. C'était, raconta-t^elle ensuite, une figure blême, avec des yeux blancs, des yeux sans pupilles, et de longs cheveux mouillés qui dégouttelaient.

Ma grand'mère n'eut que la force de héler son mari.

by

Google