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Et le second arbre, celui de gauche, répondait, en grelottant :

— Oui, Jelvestr, je suis glacée, glacée, en vérité, jusqu aiïx moelles*. Toutes les fois que la nuit tombe, c'est ainsi ; la fraîcheur me pénètre au point que c'est comme une nouvelle mort... Heureusement que, ce soir, on fait des crêpes chez notre fils : il y aura bon feu et, sitôt que sa femme et lui seront couchés, nous pourrons, à notre tour, aller nous chauffer à la braise.

Alors, le premier arbre :

— Je t'accompagnerai, pour ne pas te laisser aller seule, Maharit. Mais, si tu m'avais obéi, de ton vivant^ tu ne serais pas dans la nécessité d'attendre que Ton fasse des crêpes chez notre fils pour sentir un peu de, chaleur. Combien de fois ne t'ai-je pas demandé d'être plus charitable aux pauvres ! Sous prétexte que tu possédais peu, tu ne voulais rien donner. Et maintenant lu en es punie. Parce que tu as eu le cœur froid, tu accomplis une pénitence glacée. Et moi, parce que j'ai été trop faible envers ton péché, je suis puni avec toi. Mais, du moins, je ne souffre pas ce que tu

1. Dans unconle recueilli par Sauvé, Revue destmditio,\s populaires, t. VU, p. 108-114, une âme accomplit sa pénitence sous la forme d'un petit homme rouge glacé dont le châtiment n'est terminé que lorsqu'il a pu se réchauffer dans le lit d'un homme.

11 est souvent question dans les légendes irlandaises du froid qui glace les morts. Une femme morte en Amérique revient errer sur le rivage en Irlande et prie un passant de dire à sa mère d'acheter des bas et des souliers et de les donner en son nom à un pauvre, car elle meurt de froid (Curtin, Taies of the fairies, p. 146). Cf. ci-dessus, t. II, p. 4, note 1.