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venue possible des morts. Aujourd’hui encore, on a soin de couvrir de cendre la braise de l’âtre, pour qu’ils soient assurés de trouver du feu à toute heure. Et les aliments qu’on dispose ou qu’on laisse sur la table, le soir de certaines fêtes, répondent à la même préoccupation. Par une espèce d’accord tacite, il est entendu que la terre appartient, le jour, aux vivants, la nuit, aux morts. Et le pacte veut être respecté de part et d’autre. Le vivant qui le rompt s’expose à de fâcheuses rencontres, susceptibles d’entraîner les plus funestes conséquences. Mais le mort, de son côté, ne peut l’enfreindre sans dommage : lequel  ? On ne nous le dit pas de façon explicite. Mais nous voyons constamment les âmes errantes trembler d’être surprises par le jour. Une puissance supérieure — celle de Dieu, déclarera le christianisme — les contraint de regagner, souvent à regret, les résidences diurnes qui leur sont assignées.

Serait-ce qu’il a existé, dans la conception populaire primitive, une sorte d’organisation hiérarchique et de police régulière du peuple de l’Anaon  ? Plusieurs indices tendraient à le faire croire. L’un des plus caractéristiques est le personnage de l’Ankou. Son multiple rôle prête à des hypothèses fort diverses. Il se peut qu’il ait été, à l’origine, soit le similaire de ce Dispater dont les Gaulois de César se proclamaient descendus, soit