Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 1 1902.djvu/403

Cette page n’a pas encore été corrigée


qu'il l'éventra. Des éclaboussures infectes lui jaillirent au visage. Il se reprocha d'avoir frappé trop fort.

— Dieu m'est témoin pourtant, murmura-t-il, que je n'avais nulle intention de blesser ce pauvre Roperz! Même, je vais faire en sorte qu'il ne soit pas trop gêné par le voisinage de Mab Ar Guenn.

Le brave fossoyeur passa deux heures à évider de telle façon le fond de la fosse que deux cercueils y pussent tenir à l'aise, celui de Roperz occupant une espèce de retrait.

Cela fait, il se sentit la conscience plus tranquille, quoique, néanmoins, il ne fût pas rassuré tout à fait. L'idée d'avoir « brutalisé un de ses morts » lui causait de l'ennui. Il ne soupa point de bon appétit ce soir-là, et s'alla coucher plus tôt que d'habitude.

Il avait déjà fait un somme, quand le bruit de la porte tournant sur ses gonds le réveilla.

— Qui est là ? demanda-t-il, en se mettant sur son séant.

— Tu ne m'attendais donc pas?répondit une voix qu'il reconnut aussitôt, malgré son ton caverneux.

— A te dire vrai, François Hoperz, je pensais que tu serais venu-..

— Oui, je suis venu te montrer en quel état tu m'as mis!

La lune élait haute dans le ciel ; sa vive lumière éclairait toutes choses dans la maison du fossoyeur.

— Vois, continua le spectre... On ne traite pas ainsi un vivant, encore moins un mort.

Il avait déboutonné sa veste à longues basques. Poaz-coz ferma les yeux. Il y avait de quoi mourir dô dégoût.