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XLIV Le foin gâté

En ce temps-là, j'étais petite servante à Kersaliou. Barthélomy Roparz, le maître de la maison, vint à mourir. C'était au commencement de juillet : le fils aîné, Louis, travaillait dans une prairie voisine à faner les foins, avec les domestiques. On m'envoya le prévenir de rentrer tout de suite. Peu après, les autres travailleurs rentrèrent aussi, pour la collation de trois heures. Quand ils eurent fini de manger, l'un d'eux demanda :

— Est-ce qu'il faut retourner au pré?

— Oui, bien sûr, répondit le fils Roparz. Le temps menace et, si les foins ne soht pas terminés aujourd'hui, ils risquent d'être perdus demain.

— Ce n'est pas l'usage, quand il y a un mort sur les tréteaux, fit observer le vieux Christophe Loarer qui était à Kersaliou depuis près de trente ans.

Louis Roparz lui dit avec dureté :

— Le maître ici, désormais, c'est moi, je pense, et non pas vous ! Allez, et faites ce que je vous commande.

Ils allèrent, quoique à contre-cœur.

Comme ils approchaient du pré, ils ne furent pas peu surpris de voir qu'un homme les y avait devancés, qui se promenait de long en large, semblant prendre