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servi naguère et des bêtes qui m'avaient aidé au labour1. Cela fait, je me suis présenté au tribunal de Dieu.

— Tu n'as pas été longtemps à faire tout cela.

— Les âmes ont des ailes qui vont vite.

— Mais pourquoi t'es-tu laissé enfermer dans le cercueil avec ton corps ?

— J'étais tenu d'y rester jusqu'à ce que Dieu eût prononcé ma sentence.

— J'aurais souhaité qu'il te permît. d'accomplir une partie de ta pénitence en ma maison, auprès de moi pendant le temps que j'ai encore à vivre. Dieu doit savoir que nous nous aimions d'une amitié rare, Pêr Nicol.

— Il le sait, en effet, Yvon Penker. Sois certain qu.il ne tardera pas à nous réunir. Avant peu, ton âme sera venue me rejoindre dans cette lande.

Trois mois après, jour pour jour, on enterrait Yvon Penker, l'homme sage*.

(Conté par Catherine Carvennec. — Port-Blanc.)

1. L'esprit, au moment où il quitte le corps, doit voyager partout où il a été pendant sa vie et, tout ce temps-là, il est visible (Bryan J. Jones, Traditions and superstitions collected at Kilcurry, co. Louth, Folklore, t. X, p. 121).

2. Il me souvient d'avoir entendu, dans mon enfance, raconter cette même légende, mais avec des détails beaucoup plus circonstanciés, à Miliau Arzur, le roi des conteurs du pays de Ploumilliau. J'ai fait bien des recherches pour la retrouver sous cette forme plus complète. Je n'ai pas abouti. Il y avait, en particulier, un dialogue tout à fait saisissant entre l'âme du mort, d'une part, et les instruments de labour, puis les bêtes, d'autre part. A chacune des *