Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 1 1902.djvu/281

Cette page n’a pas encore été corrigée


Ils traversèrent des bois, franchirent des marais, escaladèrent des fossés1, passèrent des bourgs, tant et si bien qu'ils aboutirent à une vaste lande au milieu de laquelle se dressait le tronc à demi desséché d'un arbre. Il était si vieux, si pelé, qu'on n'aurait su dire si c'était un tronc de hêtre ou de châtaignier. L'intérieur en était creux. Vraiment, il ne se maintenait debout que par miracle. Encore sa maigre écorce étaitelle fendue de haut en bas. La souris se glissa dans une de ces fentes, et Ludo vit aussitôt apparaître le seigneur du Quinquiz dans le creux de l'arbre.

— O mon pauvre maître, s'écria-t-il, les mains jointes, que faites-vous ici?

— Tout homme, mon cher Ludo, doit faire sa pénitence à l'endroit que Dieu lui assigne.

— Puis-je au moins vous venir en aide de quelque façon ?

— Oui, tu le peux.

— Comment ?

— En jeûnant pour moi, l'espace d'un an et un jour. Si tu le fais, je serai délivré pour jamais, et ta béatitude suivra de près la mienne.

— Je le ferai, répondit Ludo Garel.

Il tint promesse. Son jeûne accompli, il mourut.

(Conté par Marie-LouiseBellec, couturière.— Port-Blanc.)

1. En Bretagne, on donne le nom de fossés aux talus souvent élevés qui séparent les champs les uns des autres.

XXXIX