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FACTEURS LOINTAINS DES CROYANCES

portent un homme au pouvoir ou renversent un gouvernement.

Dans tous les grands événements de l’histoire, nous constatons l’action successive de ces deux ordres de facteurs. La Révolution française — pour ne prendre qu’un des plus frappants exemples — eut parmi ses facteurs lointains les écrits des philosophes, les exactions de la noblesse, les progrès de la pensée scientifique. L’âme des foules, ainsi préparée, fut soulevée ensuite aisément par des facteurs immédiats, tels que les discours des orateurs, et les résistances de la cour à propos de réformes insignifiantes.

Parmi les facteurs lointains, il y en a de généraux, qu’on retrouve au fond de toutes les croyances et opinions des foules ; ce sont : la race, les traditions, le temps, les institutions, l’éducation.

Nous allons étudier le rôle de ces différents facteurs.


§ 1. — LA RACE

Ce facteur, la race, doit être mis au premier rang, car à lui seul il dépasse de beaucoup en importance tous les autres. Nous l’avons suffisamment étudié dans un autre ouvrage pour qu’il soit inutile d’y revenir encore. Nous avons fait voir, dans un précédent volume, ce qu’est une race historique, et comment, lorsque ses caractères sont formés, elle possède de par les lois de l’hérédité une puissance telle, que ses croyances, ses institutions, ses arts — en un mot tous les éléments de sa civilisation — ne sont que l’expression extérieure de son âme. Nous avons montré que la