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de médecine, vint me voir pour m’annoncer son intention de prononcer un discours énergique au Sénat dans le but d’obtenir la réforme de notre enseignement. Le savant académicien revint plusieurs fois discuter ce sujet avec moi et il le discuta aussi avec quelques amis. Le résultat final de ces discussions fut que pour transformer notre système d’éducation, il faudrait d’abord changer l’âme des professeurs, puis celle des parents, et enfin celle des élèves. Devant une pareille évidence, l’illustre sénateur renonça de lui-même à prononcer son discours.

Dans mes précédentes éditions, je m’étais borné à dire quelques mots de l’enseignement à l’étranger. Considérant qu’il serait utile de descendre aux détails, j’ai consacré plusieurs chapitres de cette nouvelle édition, à étudier les méthodes d’éducation employées dans le pays où l’enseignement atteint son plus haut degré de perfection : les États-Unis d’Amérique. Cet exposé montrera combien profond est l’abîme qui sépare leurs conceptions des nôtres. Guidés par une psychologie très sûre, les maîtres américains savent développer chez l’élève l’esprit d’observation, la réflexion, le jugement et le caractère. Le livre joue un rôle très faible dans cet enseignement et la récitation un rôle nul. C’est exactement le contraire qui se passe dans notre Université. De l’école primaire à l’enseignement supérieur, le jeune Français ne fait que réciter des leçons. De rares esprits indépendants échappent à l’influence universitaire, mais la grande masse des élèves en gardent toute leur vie la funeste empreinte. Voilà pourquoi, si nous avons en France un petit noyau d’hommes supérieurs maintenant un peu notre rang dans le monde, les hommes