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Dans un pays comme la France où la population professionnelle et active (industriels, négociants, agriculteurs) représente 48 p. 100 de la population totale, 18 millions d’individus sur 38 millions d’habitants, où le capital industriel s’élève à 96 milliards 700 millions de francs, où le capital agricole atteint 78 milliards de francs ; où les exportations se sont chiffrées en 1900 pour plus de 4 milliards de francs, l’Université ne peut se contenter de préparer les jeunes gens qui lui sont confiés aux carrières libérales, aux grandes écoles et au professorat ; elle doit les préparer aussi à la vie économique, à l’action[1].

Personne n’a jamais contesté la justesse de telles assertions et l’on peut dire cependant que depuis le temps qu’on les répète, elles n’ont encore converti personne.

§ 2. — L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

L’enseignement professionnel est donné presque exclusivement en France par des universitaires, et par conséquent avec leurs méthodes théoriques. Le manuel appris de mémoire en étant l’unique base, les résultats obtenus sont naturellement aussi parfaitement nuls que ceux de l’enseignement classique.

Si nous ne possédions pas un petit nombre d’écoles techniques, dues le plus souvent d’ailleurs, comme celles des Frères dont nous avons parlé, à l’initiative, privée, on pourrait dire que l’enseignement professionnel n’existe pas en France.

Les causes de son insuffisance ne sont pas uniquement imputables à l’Université. Sous l’influence de préjugés héréditaires fortement développés par notre éducation classique, l’enseignement professionnel jouit auprès des familles d’une considération très faible. Elles croient toujours que l’instruction gréco-

  1. M. Leygues, ministre de l’Instruction publique, séances des 12 et 14 février 1909) pp. 615 et 666 de l’Officiel.