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76 LA REVUE MUSICALE 172


L’impératrice en fut jalouse et les courtisans avisés cessèrent de fréquenter le théâtre, mais la foule continua à s’y étouffer. Les danseurs faisaient fureur. Le jeune Beethoven composait sur un thème des Nozze disturbate un menuet «à la Viganô»(l) et les élégantes Viennoises voyant la taille de Maria Medina épaissie par une grossesse s’empressaient à porter de singulières tournures dénommées : « ventres à la Viganô »... Il n’y avait coiffure, chaussure ou contredanse nouvelle qui ne fût elle aussi « à la Viganô ».

Le premier ministre Schloisz- nigg protégeait le couple et l’avait fait engager pour deux ans de suite ; la souveraine se mit en tête qu’il souhaitait voir Maria Médina devenir la favorite de François II afin de gouverner à sa guise. Elle multiplia les intrigues et le ministre fut disgracié (2).

Viganô toutefois demeura à Vienne jusqu’à l’expiration de son contrat et y fît représenter Richard Cœur de Lion dont le scénario était tiré de l’opéra comique de Sedaine et Grétry. Les Viennois applaudirent un défilé si bien réglé sur la musique que les fers des chevaux retombaient en cadence sur le sol. On admira la pantomime de Marguerite angoissée par un rêve et la scène en laquelle des gardes accouraient de toutes parts, la nuit, avec leurs lanternes formant des groupes pittoresques.

De 1795 à 1798, le couple Viganô parcourt l’Europe centrale. On l’applaudit à Prague, à Dresde, à Berlin, à Hambourg. Il regagne ensuite


( 1) Prod’homme : La jeunesse de Beethoven. Paris, Payot, 1921 , in-4o, p. 191 . (2) Cf. la lettre de l’abbé Casti du 17 juin 1793 (op. cil.).