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COULEUR DU TEMPS

elle doit l’être plutôt, comme il est entendu qu’elle est enthousiaste ; mais elle n’approcherait pas d’un pauvre repoussant, et elle n’applaudirait pas le plus émouvant artiste du monde autrement que du bout des ongles ; c’est une enthousiaste en surface, en phrases ; en action, ce n’est pas une enthousiaste, ce n’est peut-être rien du tout.

Car, peut-on compter pour des actions : se lever chaque matin à une heure convenable, ni trop tôt, — pas à l’heure de la messe, surtout ! — ni trop tard ; n’agir à la maison que le moins possible ; s’éterniser à arranger ses cheveux pour que pas un n’ait l’air d’être plus en vie que l’autre, pour que jamais une mèche ne sorte ? Peut-on compter pour des actions le pianotage, le barbouillage artistique, le gazouillis d’oiseau sans ardeur, la lecture faite pour être renseignée, puis, le reste de la journée au dehors ? La promenade, à l’heure convenable, dans la rue à la mode ; le thé à la pâtisserie française, et à d’autres jours, hélas ! à la pâtisserie chic de l’ouest, quand ce n’est pas aux grands hôtels. Peut-on même compter pour une action, d’aller entendre les conférences religieuses du carême, puisqu’elle ne les écoute que vaguement et qu’avant même d’être sortie de l’église, — je l’ai vu de mes propres yeux, — elle vérifie la blancheur de son nez dans son miroir de poche !