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COULEUR DU TEMPS

tentation, l’appel du crochet fut irrésistible. Elle y retourna et la veillée en partie se passa comme la journée.

Le lendemain, la mauvaise tricoteuse avait sur le poignet une petite bosse inexplicable, et elle avait bien mal, au moindre mouvement. Logiquement, elle enfouit la dentelle commencée dans un tiroir, et elle ne tricota plus. Elle avait une bonne raison. Le métier de dentellière ne lui allait pas, témoin son poignet qu’on dut traiter un mois à l’iode.

Quatre ans ont passé sur cette étape et jamais la mauvaise tricoteuse n’a songé à reprendre un crochet.

Hier, pourtant, la voilà entichée d’une « fanchonnette » qui ne lui appartient pas et lui va bien, hier au soir, à neuf heures et demie exactement. À sa place, vous auriez attendu au lendemain pour apprendre à la tricoter, n’est-ce pas ? Une mauvaise tricoteuse n’attend pas ; elle se doit d’être impétueuse. La « fanchonnette » est commencée. La tricoteuse réussit et de nouveau est enthousiasmée. Elle tricote, elle tricote.

Mais, Dieu, de quoi demain sera-t-il fait, et qui finira la « fanchonnette » ?