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AUTOUR DE LA MAISON

magiques, à de belles maisons, à des jardins tout en fleurs et en ors féeriques, à des montagnes lumineuses, à des merveilles que tu créais au caprice de ton imagination, brodant sur les formes nuageuses qui passaient au couchant.

Petite Michelle, ce pays aux couleurs divines, c’est le soleil qui le faisait pour un instant. Tu le croyais réel, rempli de trésors et de beautés. Il était aussi fragile qu’une bulle de savon. À mesure que le soleil s’éloignait, les châteaux dentelés d’or, les îles bleues se fondaient dans la mer rose qui se violaçait… Illusions, tout cela, petite Michelle, illusions ! Plus tard, le ciel est devenu étoilé, mais tout noir ; ton beau pays n’existait plus. Tu étais triste, petite fille, parce que tu ruminais : « Pourquoi que ça s’en va ? pourquoi qu’on ne peut pas ni voler, ni courir jusqu’à la barre ? »

Devant ces premières impuissances, les enfants se sentent las, et ne le disent pas. Ils ont peur devant tout ce qu’ils ne peuvent pas, tout ce qu’ils ne comprennent pas. Ils sont inquiets. Ils commencent à éprouver un obscur désir de choses éternelles, qu’ils verraient comme ils le voudraient, qui ne changeraient pas, qu’ils connaîtraient jusqu’au fond !…

Vivent les pays divins et les châteaux d’or ! Il me semble, les soirs de beau couchant, que