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AUTOUR DE LA MAISON

naïves et bien difficiles à attraper. Comment allions-nous nous y prendre ?

En classe, nous avions la permission de nous amuser un peu, ce jour-là. Nous dessinions au crayon, sur les pages de nos cahiers, de beaux grands poissons aux écailles bien carreautées, sans oublier les nageoires et la queue qui ne manquaient pas d’être d’une forme nouvelle et fantaisiste, et nous les découpions ensuite. C’était des harengs, des morues, des flétans, des sardines, selon leurs différentes formes. Ensuite, on se les accrochait furtivement dans le dos, aux blouses, aux rubans des tresses blondes ou brunes, aux ceinturons.

Et c’était amusant de voir les petites filles — en se levant pour aller à la tribune de mère ou au panier aiguiser leurs crayons — secouer leurs robes et se passer le nez par-dessus l’épaule, en louchant vers leur dos, afin de savoir si elles étaient reçues du poisson ! Et mère S.-Anastasie subissait les chuchotements et les ricanements dissimulés !

Marie et moi, nous arrivions à la maison avec tout un paquet de dessins de harengs, morues, flétans, sardines ! et les devants de nos robes couverts d’épingles. Nous suivions Julie pas à pas, en lui racontant des histoires. Elle faisait mine de ne pas comprendre notre