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AUTOUR DE LA MAISON

Chez nous, on se contentait de boire de l’eau d’érable aux repas, d’en boire à satiété, deux, trois, quatre verres ! C’était si bon…, en attendant les cœurs de sucre qui arriveraient sur le marché, le samedi, et que l’on croquerait avec volupté !

Et c’était un printemps de plus sur nos têtes d’enfants, un peu plus de la sève du pays dans nos veines, une ardeur neuve en nous. On s’attachait davantage aux grands érables du parterre et de la cour, dont la vie nous entrait dans le sang…


XXXVI

Après les érables qui coulaient, la plus grande joie du printemps, c’étaient les rigoles. Quand le soleil avait tellement chauffé la neige qu’elle fondait abondamment, on creusait, de chaque côté du trottoir, de petites et de larges rigoles qui rejoignaient l’égout au prochain coin. La plus grande, celle qui suivait le bord du trottoir devant la maison, et recevait l’eau de la rue et des gros bancs de neige qui s’en allaient, c’était un fleuve. Le fait est que son cours en pente était rapide et qu’elle avait grand air, son flot coulant sur un lit de glace vive, en attendant que cette glace fondît elle-même et laissât voir la boue…