Page:LeMoine - Ornithologie du Canada, 1ère partie, 1861.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par cette réponse muette que lui fit un grand cœur. De tels actes sont féconds, ils font des hommes et des héros ; ils font la durée des cités.

« Pour revenir à notre oiseau, ce travailleur, ce solitaire, ce grand prophète n’échappe pas à la loi universelle. Deux fois par an, il se dément, sort de son austérité, et, faut-il le dire, devient ridicule.

« Ridicule ? il ne l’est pas par cela qu’il est amoureux, mais il aime comiquement. Noblement endimanché et dans son meilleur plumage, relevant sa mine un peu sombre de sa belle grecque écarlate, il tourne autour de sa femelle ; ses rivaux en font autant. Mais ces innocents travailleurs, faits aux œuvres plus sérieuses, étrangers aux arts du beau monde, aux grâces des colibris, ne savent rien autre chose que de présenter leurs devoirs et leurs très-humbles hommages par d’assez gauches courbettes. Du moins, gauches à notre sens, elles le sont moins pour l’objet dont elles captent l’attention. Elles plaisent, et c’est tout ce qu’il faut. Le choix prononcé par la reine, nulle bataille. Mœurs admirables des bons et dignes ouvriers ! les autres, chagrins, se retirent, mais avec délicatesse conservent religieusement le respect de la liberté.

« Le préféré et sa belle, vous croyez qu’ils vont faire l’amour oisifs, errer dans les forêts ! Point du tout. Immédiatement, ils se mettent à travailler. “Prouve-moi tes talents, dit-elle, et que je ne me suis pas trompée.” Quelle occasion pour un artiste ! Elle anime son génie. De charpentier, il devient menuisier et ébéniste ; de menuisier, géomètre ! La régularité des formes, ce rythme divin, lui apparaît dans l’amour.

« C’est justement la belle histoire du fameux forgeron d’Anvers, Quintin Metzys, qui aima la fille d’un peintre et qui, pour se faire aimer devint le plus grand peintre de la Flandre au xvie siècle.

D’un noir Vulcain, l’amour fit un Appelle.