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les froids de l’hiver, il porte épaisse fourrure, brune, noirâtre et quelquefois grise, moins foncée au-dessous du ventre, sur le museau ou à l’intérieur des oreilles. En été, le poil est court et lisse. Son nez se termine en une longue lèvre supérieure, fort flexible, que l’on nomme mufle, morceau fort prisé, ainsi que la langue, par les gourmets.

Les oreilles ont près de douze pouces de longueur, et quand il marche, la corne de ses pieds est fendue si haute qu’elle se divise en deux lorsqu’il met le pied à terre. Le bois se divise en ceps palmés qu’on nomme andouiller : chez les vieux orignaux, il atteint une grosseur prodigieuse. Ce développement se fait en douze ou quatorze semaines, le bois commence à croître en avril, et se perd en décembre, ou en janvier ; les mâles seuls le portent. En septembre, la couche de poil velouté qui le couvrait, tombe ; la corne se blanchit, puis se durcit et devient brune ou jaune. Le bois augmente en volume chaque année successivement et atteint sa plus forte croissance à la cinquième année d’existence : les andouillers deviennent palmés à la quatrième année. À la saison du rut en septembre, les orignaux mâle se battent entre eux à outrance, avec leurs cornes : mais ils n’emploient que leurs pieds de devant et de derrière pour se défendre contre les chiens, et peuvent de cette sorte administrer des ruades à éreinter un bœuf.

Aux premières neiges, l’orignal regagne les hauteurs bien boisées et se prépare un circuit de terre de dix à cent acres, au sein des taillis où abondent des sapins, une espèce d’érable bâtard, des jeunes cormiers et un arbuste, Viburnum Lantanoidesle bois barré, que l’on nomme bois d’orignal : c’est là ce qui s’appelle « un ravage, » endroit curieux à contempler en hiver. Les arbustes y sont dénudés de la moitié de leur écorce et de leurs bourgeons,