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PICOUNOC LE MAUDIT.

Ah ! que sont-ils devenus ces beaux jours de naguère, où, la main dans la main, le sourire sur les lèvres, ces deux jeunes époux marchaient le chemin de la vie ? L’amour débordait de leurs cœurs, les paroles affectueuses coulaient de leurs bouches, et leurs journées étaient bien remplies et agréables au Seigneur ! Chaque matin ils allaient à l’ouvrage en chantant gaîment, et, chaque soir, ils se reposaient dans les bras l’un de l’autre, après avoir remercié le ciel de ses bienfaits, et lui avoir demandé un heureux lendemain. Qui aurait pu prédire un orage aussi prompt dans cette atmosphère limpide ? Qui aurait pu deviner tant de larmes dans les paupières radieuses de la jeune épouse, tant d’angoisses dans son âme alors sereine ? Qui aurait osé croire que les folles vapeurs de la jalousie devaient sitôt s’élever sur l’esprit de l’époux heureux et l’envelopper de ténèbres ? Un homme seul pouvait prédire tout cela, car tout cela était son ouvrage, et cet homme, c’était Picounoc le maudit.

Un jour, le médecin revenant de voir un malade dans le bas de St. Eustache, entra allumer la pipe chez Joseph Letellier qu’il