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PICOUNOC LE MAUDIT.

Un instant l’amour — ce baume divin auquel nul ne résiste — l’amour calma son chagrin et lui rendit le bonheur. Mais ici encore le calme présageait la tempête, le soleil annonçait l’orage. Marguerite, qu’il avait vue si rieuse et si aimante, était devenue tout à coup chagrine et presque sauvage. Elle semblait se trouver mal à l’aise devant lui, et paraissait le fuir. Un changement aussi prompt était inexplicable et portait le trouble dans son âme. Il était venu débordant d’ivresse et d’espérance, il allait repartir désespéré. Il était venu se reposer dans la solitude des champs, se distraire dans les plaisirs du village, avant d’entrer dans l’arène où chacun combat contre tous pour conquérir sa part des biens de la vie, et il allait, comme un coursier que l’on presse d’atteindre le but, continuer sans repos, sa marche difficile. Il lui tardait de rendre à sa bonne mère un peu de tout ce bien qu’elle lui avait fait ; et, si la fortune tardait trop à venir, il trouverait, dans la maison de Picounoc, un refuge à cette femme aimée. Et même, n’était-ce pas là la voie la plus courte pour arriver à la félicité ? Le mariage de Picounoc et de