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l’affaire sougraine

— Alors pourquoi parleriez-vous ? que venez-vous faire ici ? retournez à la maison discrètement et les choses vont s’arranger. Le monde ne s’en portera pas plus mal parce qu’il ne saura ni le nom de mon père ni celui de ma mère.

— Écoute, mon garçon, si tu étais seul en cause on resterait muet. On comprend aisément qu’il ne serait pas légitime de briser une existence comme la tienne, de t’apporter, dans tous les cas, des déboires et des humiliations pour satisfaire les caprices d’un homme qui t’a mis sur la terre, comme on jette une graine dans un champ étranger, sans se soucier qu’elle germe ou périsse, mais il y a une question de justice envers une autre personne : Il ne faut pas que mademoiselle Léontine prenne ta place et boive le calice que tu refuses de boire…

— Bah ! des scrupules… On sait qu’elle est une enfant trouvée, elle… qu’importe le nom de ses parents ?

— Le curé est venu ; il saurait toujours bien remplir son devoir, lui, si j’étais assez lâche pour forfaire au mien.

Le vieillard secouait ses longs cheveux blancs et des rayons de vertu indignée illuminaient sa belle figure.