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l’affaire sougraine

faire admirer ses belles toilettes, et le bruit, les plaisirs l’étourdissaient un peu. Elle oubliait. La nuit, quand tout se taisait autour d’elle, les cris de sa conscience devenaient terribles. Il lui semblait que tout le monde pouvait les entendre. Mille pensées lugubres l’absorbaient. Ses amies se raconteraient son histoire. Comment trouvez-vous l’histoire de la D’Aucheron ? diraient-elles, et elles éclateraient de rire. Des sueurs froides mouillaient son corps convulsivement agité. Son sommeil avait quelque chose de plus pénible encore, car elle ne pouvait point chasser les sombres visions qu’il lui apportait.

Elle remit à Sougraine les cent dollars qu’elle venait d’emprunter au notaire.

— Voyons, dit-elle, sois généreux enfin, pars, ne me condamne pas à un plus long supplice ; j’en mourrai, bien sûr.

— Écoute, tu ne veux pas dire à l’indien où est son enfant… As-tu peur qu’il l’enlève comme il t’a enlevée autrefois ?… Si c’est Léontine on la laissera ici pour qu’elle vive dans les plaisirs… Oh ! va ! on l’aimera assez pour ne pas troubler son bonheur… Avoir un enfant et ne pas pouvoir lui