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LE BAISER FATAL

feuilles déchirées formaient des amas bruissants et moelleux où se roulaient les enfants ; les aigrettes dorées s’étaient accrochées aux boutonnières comme des décorations royales. Célestin avait dépouillé sa noire mélancolie. Il s’abandonnait à la gaieté comme pour s’étourdir ou reprendre les heures perdues. Souvent ainsi l’âme se dégage d’une longue tristesse pour s’élancer étourdiment vers le plaisir. Inconstante et inquiète, elle vole au hasard vers le mal ou le bien, si la foi ne la guide pas. Pauvre âme humaine, mystérieuse étincelle de la Divinité qu’un souffle mauvais a jetée, dès le commencement, en dehors du céleste foyer, pauvre âme, tu tourbillonnes aux caprices des passions, dans un ciel souvent obscur, mais tu laisses un trait de feu dans la nuit désolée, car tu es lumière, et tu viens te perdre au brasier divin, si tu crains la justice, si tu espères en la miséricorde !

Pendant la soirée, Trefflé Lépire, le frère d’Henriette, vint trouver Célesitin Graindamour, pour savoir s’il avait vu la