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pendant ces siècles du moyen âge, si atroces et si épouvantables pour eux. Isolés, ils eussent souffert davantage ; en s’aidant mutuellement, ils purent se défendre plus facilement, ils purent éviter les calamités qui les menaçaient sans cesse ; dans cette vie que leur rendaient si pénible les réglementations qu’on leur imposait, l’aide fraternelle leur permit souvent de se soustraire aux mille charges qui les accablaient. De même, ils avaient gardé, de synagogue à synagogue, les relations coutumières et ainsi le cosmopolitisme des Juifs se rattache à leur solidarité. Les communautés s’entraidaient, elles se soutenaient et se secouraient, et les exemples de cette entente abondent, tels que celui, si caractéristique, des Juifs levantins qui, après le martyre des Juifs d’Ancône, s’entendirent pour cesser toute relation avec cette ville et pour diriger le mouvement commercial vers Pesaro où Guido Ubaldo avait accueilli les fugitifs d’Ancône. Les docteurs, les rabbins encouragèrent cette solidarité, que l’exclusivisme talmudique augmenta. Ils engagèrent et ils contraignirent leurs fidèles à ménager leurs intérêts respectifs. Au onzième siècle le synode rabbinique de Worms défendit à un propriétaire israélite de louer « à un non-israélite, ou à un israélite, une maison occupée par un coreligionnaire, sans le consentement de ce dernier »[1] et un synode du douzième

  1. Jost : Hist. des Juifs (Berlin, 1820), t. II.