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Ils s’accordent aussi pour dire que ce moment amènera la mort du mal et la Sibylle les résume tous lorsqu’elle vaticine : « Des cieux étoilés, le Messie descendra sur les hommes, et avec lui la concorde sainte, la foi, l’amour, l’hospitalité. De ce monde il chassera l’iniquité, le blâme, l’envie, la colère, la folie. Plus de pauvreté, de meurtres, de contestations mauvaises, de querelles tristes, de vols nocturnes. Plus rien de ce qui est pervers… Les hommes pieux habiteront heureusement les villes et les riches campagnes[1].» La terre sera délivrée de l’injustice, on ne connaîtra plus d’inégalité et tous les hommes seront libres.

A aucun de ceux qui se présentèrent comme le Messie, Israël n’a voulu croire. Il a repoussé tous ceux qui se dirent envoyés de Dieu ; il a refusé d’entendre Jésus, Barkokeba, Theudas, Alroy, Sérénus, Moïse de Crète, Sabbataï Zévi. C’est que jamais Israël ne vit son idéal devenir réel. Nul des prophètes qui vinrent vers lui n’apporta dans les plis de sa robe la divine justice. ni l’égalité triomphante, ni l’indestructible liberté ; les Juifs ne virent pas, à la voix de ces oints, tomber les chaînes, s’écrouler les murs des prisons, se pourrir la verge de l’autorité, se dissiper comme fumée vaine les trésors mal acquis des riches et des spoliateurs.

Nonobstant leur long esclavage, en dépit des années de martyre qui furent leur partage, malgré

  1. Oracles sibyllins, III, 573, 585.