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furent inspirées par des principes socialistes, on n’en inférerait pas nécessairement que l’esprit révolutionnaire ait toujours guidé Israël.

Communisme et révolution ne sont pas des termes inséparables, et si, de nos jours, nous ne pouvons prononcer le premier de ces mots sans évoquer fatalement l’autre, cela tient aux conditions économiques qui nous régissent et à ce que nous regardons comme impossible la transformation des sociétés actuelles, basées sur la propriété individuelle, sans un déchirement violent. Dans un État capitaliste, le communiste est considéré comme un révolutionnaire, mais on ne se rend pas compte qu’un partisan du capital privé serait considéré de la même façon dans un État communiste. Dans l’un et l’autre cas cette conception serait juste, car, tour à tour, communiste ou individualiste manifesterait à la fois un mécontentement et un désir de changement, ce qui est le propre de l’esprit révolutionnaire.

Si l’on a pu dire des Juifs, avec M. Renan, qu’ils furent un élément de progrès ou tout au moins de transformation, si on a pu les regarder comme des ferments de révolution, et cela en tout temps, comme nous le verrons, ce n’est pas à cause des lois sur le grapillage, sur le salaire des ouvriers, sur la restitution des vêtements pris en gage, sur les années sabbatiques et jubilaires que l’on trouve dans l’Exode, dans les Nombres, dans le Lévitique, etc.[1],

  1. Lévitique, XIX, XXV, Exode, XXII, Nombres, XXV.