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puis le seizième siècle, on cessa de légiférer contre les Juifs. On ne trouve plus guère en Allemagne que l’édit de Ferdinand Ier relatif aux usures des Juifs, quelques décrets en Pologne, et beaucoup plus tard les défenses de Louis XV et de Louis XVI. Pour retrouver une législation antijuive, il faudra étudier la Russie moderne, la Roumanie et la Serbie, ce que nous ferons tout à l’heure.

L’antijudaïsme consistait surtout en vexations, en avanies. Le populaire se plaisait à railler les Juifs et souvent les grands les donnaient en spectacle. Léon X, pontife fastueux, qui aimait les bouffonneries — il avait près de lui deux moines qui étaient chargés de le divertir par leurs plaisanteries — faisait donner des courses de Juifs et du haut de ses balcons il lorgnait le spectacle, car il était fort myope. Pendant le carnaval de Rome, le peuple parodiait l’enterrement des rabbins, et souvent on promenait par les rues de la ville un Juif chevauchant à rebours un âne, et tenant dans ses mains la queue de l’animal[1].

Sur les portes des Ghettos, on sculptait une truie, parfois même on l’entourait de groupes obscènes dans lesquels figuraient des rabbins[2]. La truie

  1. E. Rodocanachi : Le Saint-Siège et les Juifs, Paris, 1891.
  2. Luther : Tractatus de Schemhamephorasch. Altemburg (Opera, t. VIII). — On appelait ces groupes obscènes des Schemhamephorasch. En voici l’origine. Ces mots Schemhamephorasch signifient « le nom de Dieu distinctement prononcé, le nom tetragrammate écrit et lu par les quatre lettres, yod, he, vav, hé » (Munk, Traduction du Guide des Égarés, t. I, p. 267,