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mal s’étant accru par la licence publique, et par le dérèglement des mœurs, l’on reconnut que le principal déffaut de l’exécution de cette police provenoit de ce que les mendiants avoient la liberté de vaguer partout, et que les soulagements qui étoient procurez n’empeschoient pas la mendicité secrette, et ne faisoient point cesser leur oisiveté ; sur ce fondement fut projetté et exécutté le louable dessein de les renfermer dans la Maison de la Pitié et lieux qui en dépendent, et lettres-patentes, accordées pour cet effet en 1612, registrées, suivant lesquelles les pauvres furent renfermez, et la direction commise à de bons et notables bourgeois qui successivement, les uns après les autres, ont apporté toute leur industrie et bonne conduitte pour faire réussir ce dessein, et toutesfois, quelques efforts qu’ils ayent pu faire, il n’a eu son effet que pendant cinq ou six années, et encore très imparfaitement, tant pour le déffaut d’employ des pauvres dans les œuvres publiques et manufactures, que parce que les directeurs n’étoient point appuyez des pouvoirs et de l’autorité nécessaire à la grandeur de l’entreprise, ou que par la suite des désordres et malheur des guerres, le nombre des pauvres soit augmenté au-delà de la créance commune et ordinaire, et que le mal se soit rendu plus grand que le remède de sorte que le libertinage des mendiants est venu jusqu’à l’excès par un malheureux abandon à toutes sortes de crimes qui attirent la malédiction de Dieu sur les États quand ils sont impunis ; l’expérience ayant fait connaître, aux personnes qui se sont occupées dans ces charitables emplois, que plusieurs entr’eux, de l’un et de l’autre sexe, habitent ensemble sans mariage, beaucoup de leurs enfants sont sans baptême et ils vivent presque tous dans l’ignorance de la religion, le mépris des sacrements et dans l’habitude continuelle de toutes sortes de vices ; c’est pourquoi, comme nous sommes redevables à la miséricorde divine de tant de grâces, et d’une visible protection qu’elle a fait paraître sur notre conduite à l’avènement, et dans l’heureux cours de notre règne par le succès de nos armes et le bonheur de nos victoires, nous croyons être plus obligez de luy en témoigner nos reconnaissances par une royalle et chrétienne application aux choses qui regardent son honneur, et son service ; considérant ces pauvres mendiants comme membres vivants de Jésus-Christ, et non pas comme membres inutiles de l’État, et agissant en la conduitte d’un si grand œuvre, non par ordre de police, mais par le seul motif de la charité. À ces causes après avoir fait examiner toutes les anciennes ordonnances et règlements sur le fait des pauvres, par grands et notables personnages et autres intelligents et expérimentez en ces matières, ensemble les expédients plus convenables dans la misère des temps pour travailler à ce dessein, et de faire réussir avec succès à la gloire de Dieu, et au bien public, de notre certaine science, pleine puissance et autorité royalle, voulons et ordonnons que les pauvres mendiants valides de l’un et de l’autre sexe soient enfermez pour être employez aux ouvrages, travaux ou manufactures selon leur pouvoir, et ainsi qu’il est plus amplement contenu au règlement signé de notre main que nous voulons être exécutté selon sa forme et teneur : pour réussir avec succès à l’établissement d’un si grand dessein, avons nommé d’autres et plus grand nombre de personnages les plus notables et expérimentez et pour enfermer les pauvres qui seront de la qualité d’être renfermés suivant le règlement, nous avons donné, et donnons par ces présentes la maison et hôpital, tant de la Grande et Petite Pitié, que du Refuge, scis au faubourg Saint-Victor, la maison et hôpital de Scipion, et la maison de la Savonnerie, avec tous les lieux, places, jardins, maisons et bâtiments qui en dépendent, ensemble maisons et emplacements de Biscestre, circonstances et dépendances que nous avons ci-dessus donnez pour la retraite des enfants trouvez, en attendant que les pauvres fussent renfermez, à quoy les lieux, et bâtiments de Biscestre ont esté par nous affectez, révoquant en tant que de besoin seroit, tous autres brevets et concessions qui pourroient en avoir été obtenus en faveur des pauvres soldats estropiez, ou par quelqu’autres causes, ou prétextes que ce soit.

« Voulons que les lieux servant à enfermer les pauvres soient nommez l’Hôpital Général des pauvres ; que l’inscription en soit mise avec l’écusson de nos armes sur le portail de la maison de la Pitié et membres qui en dépendent, entendons être conservateur, et protecteur dudit Hôpital Général, et des lieux qui en dépendent, comme étant de notre fondation royalle, et néanmoins qu’ils ne dépendent en façon quelconque de notre grand aumônier, ni d’aucuns de nos officiers, mais qu’ils soient totalement exempts de la supériorité, visite et juridiction des officiers de la générale réformation et autres auxquels nous en interdisons toute connaissance et juridiction en quelque manière que ce puisse être, nous avons en ce faisant éteint, et supprimé, éteignons et supprimons par ces présentes la direction et administration des directeurs de la maison et hôpital de la Pitié, scis au faubourg Saint-Victor et lieux qui en dépendent, des soins et intégrité desquels nous sommes satisfaits, faisons expresses inhibitions et défenses à toutes personnes de tous sexe, lieux, âge, qualité, naissance, et état qu’elles puissent être, valides ou non valides, curables ou incurables, de mendier dans la ville et faubourgs de Paris, ny dans les églises, ny aux portes d’icelles de quelque manière ou quelque cause et prétexte que ce soit, à peine du fouet contre les contrevenants pour la première fois, et pour la deuxième, des galères, les hommes et garçons ; et du bannissement contre les femmes et les filles. Pourront les directeurs avoir