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de la Convention. Le nouveau pontife tient à la main, comme tous les représentants, un bouquet de fleurs, de fruits et d’épis de blés. Son visage ordinairement impassible est rayonnant de joie. Arrivés sur un vaste amphithéâtre dressé devant le château et adossé au pavillon du milieu, les membres de la Convention prennent place. Alors Robespierre adresse au peuple ce premier discours : « Français républicains, il est enfin arrivé le jour fortuné que le peuple Français consacre à l’Être-Suprême. Jamais le monde qu’il a créé, ne lui offrit un spectacle aussi digne de ses regards. Il a vu régner sur la terre la tyrannie, le crime et l’imposture ; il voit dans ce moment une nation entière aux prises avec tous les oppresseurs du genre humain, suspendre le cours de ses travaux héroïques pour élever sa pensée et ses vœux vers le grand Être qui lui donne la mission de les entreprendre et le courage de les imiter. » — Une symphonie succède à ces paroles. Robespierre descend de l’amphithéâtre, et s’avance, une torche enflammée dans la main, vers le bassin du milieu. En cet endroit s’élevait un groupe de figures représentant l’Athéisme, la Discorde et l’Égoïsme. Robespierre y met le feu. Du milieu des cendres apparaît la statue de la Sagesse, mais on remarque que la déesse a été noircie par les flammes. La musique et les applaudissements de la foule accompagnent Robespierre à la tribune, où il prononce un nouveau discours qui se termine ainsi : « Français ! vous combattez des rois, vous êtes donc dignes d’honorer la Divinité. Être des êtres, auteur de la nature, l’esclave abruti, le vil suppôt du despotisme, l’aristocrate perfide et cruel t’outrage en t’invoquant. Mais les défenseurs de la liberté peuvent s’abandonner avec confiance dans ton sein paternel. Être des êtres, nous n’avons point à t’adresser d’injustes prières, tu connais les créatures sorties de tes mains, leurs besoins n’échappent pas plus à tes regards que leurs plus secrètes pensées ! La haine de la mauvaise foi et de la tyrannie brûle dans nos cœurs avec l’amour de la justice et de la Patrie ; notre sang coule pour la cause de l’humanité voilà notre prière, voilà nos sacrifices, voilà le culte que nous t’offrons ! » — Le cortège s’ébranle ensuite, on se met en marche pour se rendre au Champ-de-Mars. Robespierre affecte de devancer ses collègues. Quelques uns indignés, se rapprochent de sa personne, et lui prodiguent les sarcasmes les plus amers. L’un lui dit, en faisant allusion à la statue de la Sagesse, qui avait paru enfumée, que sa Sagesse est obscurcie ; l’autre fait entendre les noms de Tyran, de César, et s’écrie : qu’il est encore des Brutus !… Bourdon de l’Oise lui dit ces mots : « La Roche Tarpéienne est près du Capitole ! » — « Robespierre, dit Lecointre, j’aime la fête, mais toi je te déteste ! » — Le cortège est arrivé au Champ-de-Mars. Au milieu de cette vaste enceinte, s’élève une immense montagne. Au sommet on voit un arbre. La Convention vient s’asseoir sous ses rameaux. Des groupes d’enfants, de vieillards, et de femmes, entourent cette montagne. On chante un hymne composé par le représentant Chénier. Puis une symphonie se fait entendre ; enfin, à un signal donné, les adolescents tirent leurs épées et jurent dans les mains des vieillards, de défendre la patrie et de mourir pour elle. Les mères élèvent leurs enfants dans leurs bras, tous les assistants tendent leurs mains vers le ciel, et rendent hommage à l’Être-Suprême. Les roulements des tambours, les décharges d’artillerie, annoncent la fin de la cérémonie, et les spectateurs reprennent en bon ordre le chemin de leurs sections.

Le Conseil des Anciens remplaça la Convention aux Tuileries, tandis que celui des Cinq-Cents alla s’installer dans la Salle du Manège, jusqu’à l’époque du 18 fructidor, où le gouvernement l’appela près de lui au Luxembourg.

Napoléon, consul et empereur, habita les Tuileries. La famille des Bourbons y demeura également pendant la restauration. — Le 29 juillet 1830, vers midi, le peuple attaqua les Tuileries. Après un combat qui dura une heure et demie, les troupes royales battirent en retraite par la place de la Concorde et se dirigèrent vers Rambouillet. — Depuis 1831, la famille régnante occupe le palais des Tuileries.

Tuileries (quai des).

Commence au guichet du Musée et au quai du Louvre ; finit aux pont et place de la Concorde. Pas de numéro. Sa longueur est de 1 280 m. — 1er arrondissement, quartier des Tuileries.

Jusqu’en 1730, c’était un chemin étroit qui séparait les fossés des Tuileries de la rivière. À cette époque, on démolit la porte de la Conférence, ainsi nommée parce qu’elle avait été construite dans le temps des fameuses conférences qui amenèrent la paix des Pyrénées. Cette porte, située à l’extrémité du jardin des Tuileries, gênait la circulation. Par lettres-patentes du 8 octobre 1731, le roi ordonna la formation d’un nouveau chemin de largeur convenable, ce qui fut exécuté. — « 26 février 1806. — Napoléon, etc. Nous avons décrété et décrétons ce qui suit : Il sera construit un mur de quai dans le prolongement du port Saint-Nicolas. Les murs du quai, vis-à-vis le Louvre, seront réparés et élevés. » — La largeur du quai des Tuileries varie de 20 m. à 29 m. — Portion d’égout et de conduite d’eau. — Éclairage au gaz (compe Anglaise).

Turgot (rue).

Commence à la rue Rochechouart, nos 57 et 59 ; finit à l’avenue Trudaine. Le dernier impair est 21 ; le dernier pair, 12. Sa longueur est de 231 m. — 2e arrondissement, quartier du Faubourg-Montmartre.

Une décision ministérielle du 29 mai 1821 approuva l’ouverture de cette rue ; mais il ne fut point alors