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de Châtillon ; — Bertrand Du Guesclin ; — Olivier de Clisson ; — Boucicaut ; — Dunois ; — Jeanne-d’Arc ; — Georges d’Amboise ; — Louis de la Trémouille ; — Gaston de Foix ; — Bayard ; — Charles de Cossé, duc de Brissac ; — Anne de Montmorency ; — François de Lorraine, duc de Guise ; — le cardinal Charles de Lorraine ; — Blaise de Montluc ; — Armand de Gontaut-Biron ; — Lesdiguières ; — Henri IV ; — Marie de Médicis ; — Louis XIII ; — Anne d’Autriche ; — Gaston duc d’Orléans ; — le cardinal de Richelieu. — Ces tableaux peints par Champagne, Vouet, Juste d’Egmont et Paerson, étaient séparés par des bustes en marbre. Des distiques latins composés par Bourdon, le Santeuil de l’époque, accompagnaient les devises faites en l’honneur des Hommes Illustres, par Guisse, interprète royal ; en un mot, tout ce que l’opulence et les arts pouvaient alors fournir de ressources, fut prodigué par le cardinal pour la décoration de son Palais, et le public, étonné de tant de magnificence, répétait ces vers du grand Corneille :

« Non, l’univers entier ne peut rien voir d’égal
» Aux superbes dehors du Palais-Cardinal ;
» Toute une ville entière, avec pompe bâtie,
» Semble d’un vieux fossé par miracle sortie,
» Et nous fait présumer, à ses superbes toits,
» Que tous ses habitants sont des dieux ou des rois. »

Mais les richesses de Richelieu devaient exciter autant d’envieux intéressés à la perte du cardinal, que la haute fonction qu’il remplissait avait fait d’ennemis au premier ministre ; aussi le rusé prélat crut ne pouvoir mieux faire que de céder au roi Louis XIII la propriété de son palais, ainsi que plusieurs meubles et bijoux d’un grand prix. Le 6 juin 1636, il en fit une donation entre-vifs ce monarque, qui expédia à Claude Bouthillier, surintendant des finances, un pouvoir pour accepter ladite donation ; ce pouvoir est conçu en ces termes : « Sa majesté ayant très agréable la très humble supplication qui lui a été faite par M. le cardinal de Richelieu, d’accepter la donation de la propriété de l’hôtel de Richelieu, au profit de sa majesté et de ses successeurs rois de France sans pouvoir être aliéné de la couronne pour quelque cause et occasion que ce soit, ensemble la chapelle de diamants, son grand buffet d’argent ciselé et son grand diamant, à la réserve de l’usufruit de ces choses, la vie durant du sieur cardinal, et à la réserve de la capitainerie et conciergerie du dit hôtel pour ses successeurs ducs de Richelieu, même la propriété des rentes de bail d’héritages constituées sur les places et maisons qui seront construites au-dehors et autour du jardin du dit hôtel. Sa dite majesté a commandé au sieur Bouthillier, conseiller en son conseil d’état et surintendant de ses finances, d’accepter au nom de sa dite majesté, la donation aux dites clauses et conditions ; d’en passer tous les actes nécessaires : même de faire insinuer, si besoin est, la dite donation ; promet sa dite majesté d’avoir pour agréable tout ce que par le dit sieur Bouthillier sera fait en conséquence de la présente instruction. — Fait à Fontainebleau, le 1er jour de juin 1639. Signé Louis ; et plus bas Sublet. »

Le cardinal de Richelieu, après avoir rappelé et confirmé cette donation dans son testament fait à Narbonne, au mois de mai de l’année 1642, mourut tranquille dans son palais le 4 décembre suivant ; et Louis XIII, dont l’existence semblait obéir à la destinée de son ministre, s’éteignit lentement au milieu de sa cour le 14 mai 1643, en murmurant ces paroles qui peignent la lassitude et le dégoût : « Fi de l’existence, qu’on ne m’en parle plus !… »

Anne d’Autriche, devenue régente, abandonna le Louvre, pour venir, le 7 octobre 1643, avec ses deux fils, occuper le Palais-Cardinal, qu’on décora bientôt du nom de Palais-Royal.

Le jeune Louis XIV habita la chambre du cardinal. Son appartement, peu étendu, était situé entre la Galerie des Hommes Illustres, qui occupait l’aile de la seconde cour, et la galerie qui régnait le long de l’aile de l’avant-cour où Champagne avait reproduit les principales actions de la vie du grand ministre.

L’appartement d’Anne d’Autriche était plus vaste et plus élégant ; la régente fit construire une salle de bain, un oratoire et une galerie. La salle de bain était ornée de fleurs, de chiffres, etc., dessinés sur un fond d’or. Louis avait peint les fleurs et Belin les paysages. L’oratoire était orné de tableaux où Champagne Vouet, Bourdon, Stella, Labire, Corneille, Dorigny et Paerson avaient retracé la vie et les attributs de la Vierge.

La galerie était placée à l’endroit le plus retiré ; Vouet l’avait couronnée d’un plafond doré ; le parquet était une marqueterie travaillée par Macé. Ce fut dans cette galerie, où le grand conseil tenait ses séances, que la régente fit arrêter les princes de Condé, de Conti et le duc de Longueville.

Le jardin contenait alors un mail, un manège et deux bassins, dont le plus grand, appelé le rond d’eau, était ombragé d’un petit bois.

Mais il fallut bientôt ajouter au palais un appartement pour le duc d’Anjou, depuis duc d’Orléans, frère du roi. Pour le construire, on détruisit, à l’aile gauche du palais, dans la cour qui donne sur la place, la vaste galerie que Champagne avait consacrée à la gloire du cardinal.

Nous ne retracerons pas ici toutes les scènes de la Fronde. Les événements qui se rattachent à cette guerre civile ont pu naître dans ce palais, mais c’est toujours ailleurs qu’ils se sont terminés par la victoire où par la défaite.

Ce fut le 21 octobre 1652 que Louis XIV revint de Saint-Germain à Paris. Le même jour il abandonna la résidence de Saint-Germain pour aller habiter le