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Donc, je vous en prie, ne nous dites pas que vous représentez une Allemagne toute nouvelle et que vous ne voulez plus rien savoir de l’ancienne. Notre sourire vous ferait comprendre ce que nous pensons, à savoir que ce que vous reniez de la précédente Allemagne, c’est sa dette et la nécessité de l’expiation.


Ne nous parlez pas non plus d’une « paix de réconciliation ». Vous n’en avez pas le droit ; mais savez-vous pourquoi ?

Parce que cette réconciliation, vous seriez les derniers à la vouloir. Supposez que, dans l’espoir d’obtenir vos bonnes grâces, nous admettions qu’il y a partie nulle, vous ne nous pardonneriez pas la nullité de la partie. C’est la partie pleinement gagnée qu’il vous fallait. Pour vous, partie nulle serait partie à recommencer. D’aucuns ont l’effronterie de l’avouer dans leurs conversations et dans les journaux. Cherchez en vous-mêmes. N’êtes-vous pas de ces d’aucuns ?

Il n’est pas croyable que, d’ici à longtemps au moins, cesse la propagande d’orgueil et de haine où collaborèrent, pour ne parler que de ceux-ci, vos Professoren, vos Oberlehrer, vos Lehrer. Maximilien Harden écrivait, il n’y a pas longtemps, que, déjà, vos maîtres d’école disent aux petits écoliers : « C’est votre génération qui reprendra l’Alsace-Lorraine. »