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pour si peu. À ce moment, il n’était bruit dans toute l’Allemagne artistique que de ses écrits, de ses manifestes ; ses concerts attiraient la foule, et les représentations de ses dernières œuvres obtenaient le plus éclatant succès ; des cercles wagnériens se créaient ; il profita de cette effervescence, et, sur le conseil, dit-on, d’un de ses plus enthousiastes admirateurs, le pianiste Tausig, il émit 1,000 actions de 1,125 francs l’une, moyennant lesquelles le souscripteur-fondateur acquerrait le droit d’assister aux trois représentations complètes, en quatre soirées chacune, de la Tétralogie, Les actions pouvaient se fractionner en tiers, chaque tiers permettant d’assister à l’une des représentations.

Le conseil d’administration avait pour président M. Friedrich Feustel, riche banquier de l’Allemagne du Sud, et se composait de MM. Adolphe Gross ; Théodor Muncker, de Bayreuth ; Emil Heckel, de Mannheim ; Friedrich Schœn, de Worms.

L’un d’eux, M. Heckel, avait fondé à Mannheim la première des associations wagnériennes et avait acquis la certitude que beaucoup de gens, dans l’impossibilité de verser 1,125 francs, seraient pourtant disposés à venir en aide à l’œuvre, dans la mesure de leurs moyens. Aussi le conseil d’administration, devenant comité de patronage, encouragea et provoqua même la création de cercles wagnériens non seulement en Allemagne, mais dans le monde entier, en France, en Russie, en Hollande, en Belgique, en Suède, en Angleterre, en Italie, en Égypte, aux États-Unis, dont la mission était de recueillir des souscriptions, si minimes qu’elles fussent, pour la triple représentation de l’Anneau du Nibelung, car c’était là le seul but poursuivi : exécuter trois fois la Tétralogie.

À peine avait-on réuni le tiers de la somme totale né-