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Une chose assez remarquable, c’est que certains de ces motifs ont une prédilection marquée pour une tonalité voulue, ou les tonalités voisines ; le motif du Walhalla affectionne les tons fortement bémolisés ; l’Épée apparaît le plus souvent en ut ; le Feu préfère de beaucoup les dièses, et la Walkyrie dort en mi majeur, etc.

Bien qu’il ne soit pas fait des motifs typiques un usage constant et exclusif, ce qui occasionnerait une trop forte tension, il faut reconnaître en eux les plus puissants matériaux de la Symphonie wagnérienne, aussi bien au point de vue mélodique qu’en ce qui concerne l’harmonie.

Wagner ne recherche jamais les voix extraordinaires. Il n’écrit pas en vue de procurer à tel ou tel chanteur l’occasion de pousser une note que lui seul peut atteindre, ou de faire parade de sa virtuosité. Il écrit simplement pour Soprano, Contralto, Ténor et Basse, Mezzo-Soprano ou Baryton, ne demandant à chacun que ce qu’il peut normalement donner ; maintenant chaque voix dans la tessitura qui lui est convenable, mais faisant table rase des fioritures, des roulades, des trilles, que l’école italienne considérait comme l’embellissement du style vocal, et dont jusqu’à lui ni l’école allemande ni l’école française ne s’étaient entièrement débarrassées.

Il écrit surtout et avant tout pour des musiciens, pour des gens sachant chanter juste et rigoureusement en me-

    de l’Ouverture du Vaisseau fantôme (les 15 premières mesures du 6/4) et le début de l’Or du Rhin par l’entrée de Woglinde. C’est exactement le même procédé harmonique, et presque le même contour mélodique.

    (Bien que le Vaisseau fantôme sorte du cadre de cette étude, limitée aux œuvres qui forment le répertoire de Bayreuth, il m’a paru intéressant de signaler cette réminiscence, à onze ans de distance.)