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la conquête du trésor et les sages conseils de l’oiseau merveilleux. Quand le héros est arrivé à ce point de son récit, Hagen mêle en cachette à son breuvage un philtre réveillant ses souvenirs endormis ; Siegfried, dès lors en pleine possession de sa mémoire, raconte devant tous, au profond étonnementde Gunther, qui l’écoute avec une émotion croissante, son odyssée victorieuse pour aller délivrer Brünnhilde et la délicieuse récompense qui l’attendait pour prix de sa vaillance. Gunther, abîmé de stupéfaction, semble commencer à comprendre. À ce moment, deux corbeaux sortant d’un buisson voisin viennent tournoyer au-dessus de Siegfried, qui se retourne pour les regarder ; Hagen profite de ce moment pour fondre sur celui que sa haine guette si lâchement, et lui enfoncer son épieu entre les deux épaules. Gunther, plein d’horreur, s’élance, trop tard hélas ! pour détourner le bras du meurtrier. Siegfried lève son bouclier pour écraser le traître, mais ses forces l’abandonnent, et il tombe sur le sol, tandis que son lâche assassin s’éloigne tranquillement et gagne la hauteur. Avant d’expirer, Siegfried peut encore envoyer un suprême adieu à la bien-aimée qu’il n’a toujours pas conscience d’avoir trahie et dont le radieux souvenir adoucit ses dernières souffrances. Il meurt en emportant la chère vision dans son cœur extasié.

Les vassaux placent le corps du héros sur une litière de verdure. Le funèbre cortège se forme : Gunther le premier suit le cadavre, en donnant les signes du plus profond désespoir. Les rayons de la lune éclairent le lugubre défilé, puis des brouillards se dégageant du Rhin viennent envahir le devant de la scène. — Quand ils se dissipent, le théâtre représente de nouveau la grande salle du palais des Gibichs, plongée cette fois dans l’obscurité.