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libre et joyeux, quitter la forêt et parcourir le monde ; cette épée, il la lui faut de suite ; il exige que Mime la lui forge sans retard, et s’élance hors de la grotte après avoir menacé le nain, qui, resté seul, se désespère : il ne sait pas plus comment faire pour manier l’acier rebelle que pour retenir près de lui celui dont le bras inconscient devait, selon ses ténébreuses machinations, lui conquérir le trésor qui fait son envie et qui est si bien gardé dans le repaire par l’effroyable dragon.

Scène ii. — Pendant qu’il se livre à ces décourageantes réflexions, entre dans sa caverne un inconnu amplement drapé dans un sombre manteau, coiffé d’un large chapeau lui cachant une partie du visage. Cet inconnu, qui n’est autre que le dieu Wotan, refuse de révéler sa personnalité à Mime ; il s’intitule le Voyageur et demande à se reposer des fatigues de la route. Malgré le mauvais accueil du gnome, qui voit en lui un espion dont la présence l’effraye et l’inquiète, le dieu entre et, s’asseyant au foyer, dit à son hôte que souvent, errant sur le dos de la terre, il a payé l’hospitalité reçue, par les sages conseils qu’il donnait à qui voulait l’interroger, et il offre sa tête en gage à Mime si celui-ci, le questionnant, n’apprend point, par ses réponses, ce qu’il lui importerait de savoir. Le nain, pour se débarrasser de l’importun, accepte la gageure et lui pose trois questions, que le Voyageur promet d’élucider : « Quelle est la population vivant dans les entrailles de la terre ? demande tout d’abord Mime. — Ce sont les Nibelungs, que leur chef Alberich avait asservis grâce à la puissance de l’anneau magique, lui répond l’inconnu. — Quelle race respire à la surface du globe ? — La race des géants, dont les princes, Fasolt et Fafner, ont conquis les richesses du Rhin et l’anneau maudit. Fafner a tué son frère, et, changé en dragon,