Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/221

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Wälsungs, valeureux et brave ; que ce soit lui son sauveur et son maître !… Sur le nouveau refus du dieu, elle le supplie au moins de permettre qu’un obstacle terrible se dresse autour d’elle pendant le fatal sommeil, afin que seul un mortel inaccessible à la crainte puisse, en triomphant du danger, s’assurer sa conquête. Le dieu, enfin touché par la vaillance de son enfant infortunée, sent son cœur paternel se fondre devant tant de fierté dans la détresse ; il consent à exaucer son dernier vœu : autour d’elle il élèvera un foyer ardent, dont le feu dévorant chassera les timides, et que seul sera capable de franchir le héros désiré ; puis, la relevant, il la tient longuement embrassée sur son sein en lui faisant de tendres adieux. — Que ces lèvres, qui chantaient si joyeusement la gloire des héros, se taisent ; que ces yeux lumineux qu’il a si souvent baisés avec bonheur et dont la vue l’a maintes fois réconforté aux heures de tristesse, se ferment à jamais pour l’éternel infortuné, et ne se rouvrent que pour le mortel heureux qui saura la conquérir. — Dans un suprême baiser, il lui enlève sa divinité et lui clôt les paupières. Brünnhilde, vaincue par le sommeil, s’endort peu à peu ; il la conduit alors sur un tertre de mousse ombragé par un sapin aux lourdes branches, à l’abri duquel il l’étend inanimée. Il la contemple, ému, puis ferme son casque, étend à côté d’elle sa lance en signe de commandement, et la couvre de son long bouclier d’acier de Walkyrie.

Puis, frappant trois fois le roc de son épieu, il évoque Loge, le dieu du feu. Une flamme s’allume, grandit et enveloppe bientôt le rocher d’une redoutable et grandiose ceinture de feu, formant un rempart inaccessible autour de la vierge endormie.

Ici le rideau se referme très lentement.