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tendre ; c’est le signal convenu pour annoncer la bonne nouvelle. Déjà Kurwenal, qui, sur les instances de Tristan, est monté en haut de la tour, voit flotter parmi les voiles le pavillon d’allégresse. C’est Iseult qui arrive ; le navire a passé le cap redouté et entre au port. La bien-aimée fait des signes, elle s’élance sur le rivage, et Kurwenal va la recevoir, laissant Tristan en proie à la plus grande agitation. Le blessé, croyant désormais pouvoir défier le trépas, se précipite au-devant de son amie ; mais il a trop présumé de ses forces : elles l’abandonnent, et il tombe en expirant dans les bras de l’adorée.

La mort, appelée autrefois avec tant d’ardeur, l’a enfin exaucé ; la nuit, bienheureuse adversaire du jour hostile, l’enveloppe de ses voiles. S’agenouillant près de lui, Iseult l’enlace doucement et le supplie de la laisser guérir sa profonde blessure, de vivre encore, ne fût-ce qu’une heure ; mais, le voyant à jamais sourd à sa voix, elle tombe mourante sur le corps de celui qu’elle a tant aimé.

Scène iii. — Kurwenal a assisté, muet de douleur, à cette scène navrante ; ses regards ne peuvent se détacher de Tristan. On entend à ce moment un cliquetis d’armes : le berger accourt pour annoncer qu’un second navire vient d’entrer dans le port. Une grande confusion se produit alors. Kurwenal, croyant à une incursion hostile de la part du roi Marke, se précipite sur Mélot, qui entre un des premiers, et le tue. Il est lui-même blessé mortellement dans la lutte et vient expirer auprès du corps de son maître bien-aimé. Cependant, quelle méprise était la sienne ! Le noble et magnanime roi, instruit trop tardivement, hélas ! par Brangaine, des désastreux effets du philtre et enfin convaincu que la fatalité seule a rendu traîtres les deux êtres qu’il a tant chéris, venait leur apporter son pardon et les unir à tout jamais. Il reproche