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grosse affaire dans laquelle il a été roulé — « J’ai acheté un stock de chaussures dont le cuir est tout simplement du carton et de la colle forte. Je n’y ai rien vu ! J’ai pourtant pas l’habitude de me faire « emplir » mais cette fois « icite » on m’a empli jusqu’aux oreilles ! » On s’amuse de la mésaventure de ce riche commerçant ; le paysan qui n’a rien dit, s’écrie : « Ne vous plaignez donc pas ! Je suis « ben » certain que vous allez nous revendre ces chaussures en jurant sur vos grands dieux que la semelle est du meilleur cuir ! Les rires redoublent : jusqu’au bout du trajet la bonne humeur s’exhale, les bons mots pétillent, les moqueries rebondissent. Nous sommes en France, en pleine province ! Cette bonne humeur française est encore une qualité dominante des Canadiens-Français. Quel contraste avec les Ontariens si puritains, si silencieux, si peu abordables ! Les Canadiens-Français sont essentiellement gais, d’une gaieté communicative et de bon aloi : ils aiment le rire et leur rire est franc, jovial, il sonne bien, c’est le rire français.


Ils sont aussi éminemment sociables, si sociables qu’en certains endroits (ô miracle !) des Canadiens-Anglais se sont entièrement assimilés à eux. La chose est rare, il est vrai, comme tous les miracles.


Le contraire se produit aussi : quelques Canadiens-Français, isolés dans des villages anglais, dans des admi-