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choses : ou la destruction des individus amène la disparition des émigrants, ou l'adaptation au nouvel habitat s'établit bien avant qu'il ait pu se former une race nouvelle à type accusé.

La fixité des races primordiales s'établit encore par la permanence de certains caractères, par exemple, par la permanence de l’infériorité intellectuelle de la race nègre. En vain affirmera-t-on que le nègre possède, à l'état virtuel, des aptitudes qu'une éducation semblable à celle du blanc développerait dans la même mesure ; les faits n'ont pas justifié cette assertion, et le nègre d'Amérique, le nègre au Mexique mème, où il ne vivait pas dans l'état d'esclavage, n'a pas sensiblement manifesté des aptitudes intellectuelles bien prononcées.

L'argument fondamental de la doctrine monogéniste reste encore entier, il est vrai : la fécondité illimitée de toutes les races entre elles semble prouver la communauté d'origine. Cependant nous ne voulons pas préjuger une question aujourd'hui si discutée, et nous ne craignons pas de conclure qu'elle est insuffisamment éclairée par expérimentation. Il appartiendra, sans doute, aux générations futures de la résoudre ; nous ne pouvons que la présenter et la livrer à la libre discussion.

— 3° Hypothèse de l'origine simienne. Lorsque cette hypothèse se traduit audacieusement, par une affirmation brutale, on comprend sans peine que l’orgueil humain s'en révolte ; la démonstration d'une telle origine frapperait au cœur la vieille orthodoxie chrétienne, elle détruirait le fondement primitif du dogme révélé à nos pères. Nous ne pouvons pas nous illusionner sur ces conséquences essentielles de l'hypothèse dont il s’agit ; mais, quelque réserve que nous devions apporter dans une matière aussi délicate, il nous est impossible de passer sous silence une doctrine qui se produit scientifiquement, et qui peut $e juger scientifiquement. Des hommes considérables l'ont soutenue et discutée ; des arguments d'une certaine valeur ont été apportés, et la grande bataille qui se livre sur ce terrain est au moins digne d'appeler l'attention de tous ceux qui s'intéressent aux hardiesses de la science et à l'émancipation de l'esprit humain.

L’opinion qui donne le singe pour ancêtre à l’homme n'est pas nouvelle ; on en trouve les traces dans les auteurs les plus anciens, Au siècle dernier, Du Maillet, consul de France en Égypte, écrivain plus enclin aux affirmations audacieuses qu'aux recherches scientifiques, affirmait que tous les animaux avaient été primitivement poissons, et faisait descendre l’homme d'un poisson tout comme les autres animaux. Du Maillet ne réussis qu'à s'attirer les sarcasmes de Voltaire. Un peu plus tard, Schelver d'Osnabruck, né en 1778, et professant à Halle, à Iéna et à Heidelberg, montra quels rapports rapprochent le singe de l’homme ; mais, loin de conclure que le singe fût un ancêtre de l’homme, il représenta, au contraire, le singe comme un homme dégénéré. Il professait que l'origine commune de ces deux êtres nous était inconnue, et que peut-être les parties inexplorées de l'Afrique centrale recélaient les descendants de la race primitive intermédiaire entre le singe et l’homme. L'hypothèse de l'origine simienne se pose de nos jours plus correctement. Suivant les défenseurs de cette doctrine, nous dérivons directement du singe, dont nous ne sommes, en quelque sorte, qu'un descendant perfectionné. Trois ordres d'arguments sont invoqués à l'appui de cette doctrine : 1° les ressemblances évidentes par lesquelles l’homme se rapproche du singe ; 2° la possibilité des transformations d'une espèce animale en une espèce voisine ; 3° l'existence de formes intermédiaires existane entre le singe et l'homme et établissant d'une manière plus évidente encore le lien de parenté qui unit notre espèce aux espèces animales.

Nous avons déjà fait remarquer qu'il est impossible de nier, au point de vue zoologique, les rapprochements nombreux qui unissent le singe anthropomorphe à l’homme des races inférieures : identité presque complète de formes extérieures, identité absolue des dispositions des organes de la nutrition, identité de la forme et de le structure du cerveau, etc., etc. Où seraient donc les caractères distinctifs d'une certaine valeur ? On les a bien souvent énumérés, et il serait inutile de les rappeler ici ; mais aucun d'eux n’est de nature à établir une ligne de démarcation aussi fondamentalement tranché que le veulent les antagonistes de la similitude. Mais c'est à un autre point de vue que ceux-ci se placent : ce sont les caractères d'ordre psychiques qu'ils invoquent. Sur ce terrain nouveau, la supériorité de l’homme, disons mieux, la dissimilitude est accusée d'une manière bien plus sensible. Quand on promène un orgueilleux regard sur les œuvres de notre civilisation, quand on considère les monuments impérissables de notre industrie, de nos arts, de notre littérature, quand on parcourt d'un œil satisfait les pages de notre histoire illustrée par tant de héros, de philosophes et de moralistes, il n'en faut pas tant pour creuser un abîme infranchissable entre l’homme et l'animal. C'est à ces caractères d'ordre psychique qu'on fait une inévitable allusion chaque fois qu'on veut établir les dissemblances qui séparent l'homme du singe : la moralité, la religiosité (nous nous servons des termes acceptés par les naturalistes de l'école française), la faculté de concevoir les abstractions, l'aptitude à la culture des sciences, des lettres et des arts, la sociabilité, etc., sont les attributs essentiels de l'humanité, et il n'y a aucune apparence que jamais famille de singe arrive à jouir de la plus minime de ces facultés. Ceci est un fait que nous ne pouvons nier ; nous nous contenterons seulement de faire remarquer que l'on a généralement trop de tendance à comparer au singe l’homme industrieux et civilisé des races supérieures ; mais lorsqu'on met à côté du singe un des représentants arriérés de nos races inférieures, quand on compare l'intelligence de certains animaux, et du singe particulièrement, à celle de ces êtres dégradés qui portent le nom d'Australiens, de Boschimans, etc. ; lorsqu'on veut bien se souvenir qu'en fin de compte l’homme civilisé n'est pas un produit de la nature, mais un produit de l'éducation acquise par cinq cents siècles peut-être d'expérience ; lorsqu’enfin on veut comparer l'existence actuelle du singe avec celle de nos premiers pères, telle qu'elle nous est révélée par les traces qu'ils ont laissées de leur passage sur la terre, alors, disons-nous, les différences profondes s'effacent et les similitudes apparaissent plus saillantes et plus réelles.

En restant dans les termes où nous venons de poser l'hypothèse de l'origine simienne, nous ne sommes guère plus avancés ; car, quelle que soit la source des ressemblances et celle des différences entre l'homme et le singe, il resterait toujours à expliquer comment la distance qui sépare l'un de l'autre, si petite qu'on veuille la supposer, a pu être comblée. Ici se présente la célèbre doctrine de la variabilité des espèces, si remarquablement présentée de nos jours par le naturaliste anglais Darwin. Nous n'entreprendrons pas d'exposer cette doctrine, qui a été l'objet de plusieurs articles spéciaux (v. ESPÈCES et DARWINISME); nous nous contenterons de faire remarquer qu'elle contient la solution du problème que nous poursuivons ; que, seule, elle est de nature à expliquer les relations qui existent entre tous les êtres naturels, l'évolution ascensionnelle qu'ils accomplissent sur la voie d'une perfectibilité progressive, et la place qu’occupe l’homme, au point le plus élevé de l’échelle des êtres. On voit alors, d'un coup d'œil, se dérouler l'ensemble majestueux des créations antérieures. Le puissance organisatrice a d'avance tout disposé pour l'accomplissement de cette œuvre immense, et la vie s’enchaîne à la vie par une suite non interrompue d'êtres de formes et d'aptitudes différentes, mais qu'un lien commun rattache à la forme primitive. Dans cette hypothèse, l'origine de la vie sur la terre se résume dans la cellule primordiale, être inférieur, dont une légère modification va faire un infusoire pour le règne animal, un protococcus pour le règne végétal. Puis l'être primitif se développe et se féconde ; il subit l'influence des milieux ; il lutte pour se maintenir, et (résultat inévitable de cette lutte) il se transforme ou disparaît de la surface du globe. Et les êtres vont ainsi pendant des milliers de siècles, se multipliant dans la forme qu'ils reçoivent, luttant pour la maintenir au milieu des changements incessants do la planète, disparaissant ou se transformant pour s’adapter à des milieux nouveaux.

S'il existait un être qui pût être considéré comme représentant une forme intermédiaire entre l’homme et le singe ; si, à plus forte raison, on pouvait découvrir une série plus ou moins considérable de ces êtres, on ne peut se dissimuler que leur existence serait un argument d'une immense valeur dans la question qui nous occupe. C'est donc sur ce point qu'il importe d’appeler l'attention. L'antiquité avait préjugé la question ; sur la foi de Strabon, et, plus tard, sur les récits du voyageur Marco-Polo, on admit l'existence d'une foule de monstres à figures d'animaux. Parmi ceux-ci se trouvaient des formes incohérentes qui pouvaient prendre place entre l’homme et le singe. Linné semblait admettre leur existence, et mentionna, dans son Systema naturae, un homo troglodytes, un pygmaeus, un lucifer et un satyre, espèce d’homme à queue, qui réalisait mieux encore le type intermédiaire. Ces êtres n'ont pourtant jamais existé, du moins à l'état de peuplades ; des monstruosités accidentelles ont pu reproduire des types analogues, mais ils n'ont apparu que d’une manière exceptionnelle, et rien ne justifierait leur installation dans la série normale des êtres. C'est encore au rang des mystifications qu'il faut placer la prétendue existence des niam-nians ou hommes à queue, qu'on a placés dans les parages de la côte d'Aden, et qui, en réalité, n'ont existé que dans l’imagination des voyageurs crédules. V, NIAM-NIAMS.

Meckel, Serres et Geoffroy Saint-Hilaire ont amené la question sur un autre terrain, plus scientifique d'ailleurs. Suivant ces naturalistes, l’homme parcourt, pendant la période embryonnaire de sa vie, une série de transformations qui reproduisent dans une succession constante toutes les formes de la série animale, depuis le plus obscur infusoire jusqu'à la forme humaine qu'il revêt au moment de son complet développement. Ainsi l’homme serait tour à tour, dans le sein de sa mère, helminthe, zoophyte, mollusque, poisson, reptile, oiseau, et ne prendrait qu'au dernier moment la forme mammifère. Il y a au moins quelque exagération dans cette manière de voir. l’homme, à aucune époque de son existence, n'a été zoophyte, poisson, reptile, etc. mais il est une autre manière de poser la question. Si, par accident, l’homme naît avant son complet développement, quelle forme revêt-il ? Ici les faits ont répondu. Qu'est-ce que l'idiot microcéphale ? Il est impossible d'assimiler cet être aux monstres chez lesquels apparaissent des soudures anomales, des altérations de formes de diverses parties, etc. L'idiot microcéphale est un être de forme humaine, chez lequel toutes les fonctions s'accomplissent normalement comme chez l’homme ; il ne diffère de ce dernier que par un seul point : l'arrêt de développement a porté sur la botte crânienne, et il en est résulté une altération fonctionnelle de l'organe fondamental. Quel est actuellement le type du microcéphale ? Carle Vogt, qui a porté son attention sur ce point, le représente comme accusant le type simien de la manière la plus manifeste : mêmes allures, même physionomie, même prognathisme bestial, même intelligence bornée, compliquée de mutisme et d'absence de toute idée humaine. En un mot, pour Carl Vogt et les naturalistes de son école, le microcéphale réalise le type intermédiaire entre l’homme et le singe.

On a cru encore apercevoir une forme intermédiaire dans les Aztèques. Il ne peut être question, en ce cas, que de ces quelques individus promenés en Europe comme des curiosités, et qui reçurent très-improprement la dénomination sous laquelle on les désignait ; ils n'ont aucune parenté avec la grande famille Nahuati ou Aztèque, qui avait établi sa domination dans le Mexique et fondé ce mémorable empire qui prit fin lors de la conquête de Fernand Cortez. Les Aztèques amenés en Europe n'étaient vraisemblablement que de petits monstres, n'ayant jamais constitué une peuplade ; il n’y a donc pas lieu de s'arrêter plus longtemps sur cet objet.

La question des formes intermédiaires avait peut-être quelque chose à attendre de la découverte récente du gorille. Ce grand singe d'Afrique, d'après Gratiolet comme d'après les naturalistes qui ont étudié son organisation, est certainement un type élevé de la race à laquelle il appartient ; le développement de son thoras, la forme de son pied, la démarche qui lui est propre, tout semble répondre à l'idée d'une forme de transition.

La découverte des êtres fossiles pouvait éclairer la question d'un jour nouveau. Ainsi, lorsque le naturaliste, jetant un regard sur la série animale, y constatait d'importantes lacunes, il faisait appel à la paléontologie et y découvrait les formes de transition qui devaient rattacher ensemble les types éloignés. Les découvertes se multipliaient, et (chose merveilleuse) ces êtres nouveaux que la science exhumait péniblement des profondeurs de la terre venaient s'adapter à nos séries zoologiques et y former comme des séries intermédiaires entre les espèces actuellement existantes, On pourrait en citer de nombreux exemples ; le monde végétal lui-même s’est enrichi de ces découvertes. D’après Agassiz (et les exemples qu'il fournit justifient sa manière de voir), les êtres fossiles appartenant aux créations antérieures sont reliés à la faune actuelle d'une manière bien plus directe encore : ils sont les formes embryonnaires de nos animaux actuellement existants. Ainsi, dans la série des êtres, il n'y a, pour ainsi dire, qu'une forme primordiale ; celle-ci passe par une suite de transformations qui ne sont que l'expression des formes transitoires ou embryonnaires d'un type plus élevé ; tout être est relié à une série d'êtres qui l'ont précédé, et qui ne sont, par rapport à lui, que des êtres moins avancés dans leur développement, ou, mieux encore, frappés d’un arrêt de développement.

Aux quelques faits que nous venons d'exposer se borne, en fin de compte, l’argumentation des partisans de l'origine simienne : non-seulement nous devons avouer qu'ils ne suffisent pas à autoriser actuellement une conclusion, mais encore nous devons dire qu'à l'encontre des faits mêmes qu'ils invoquent d'importantes objections se sont produites. Il est essentiel de noter la principale : si l’homme descend du singe, a-t-on dit, il est d'inévitable conséquence que l'on admette la descendance d'un seul couple ; et comment expliquer alors que les partisans avancés du polygénisme le plus audacieux soient précisément les mêmes hommes qui se rattachent à l'hypothèse de l'origine simienne ? Carl Vost, un des plus ardents défenseurs de cette doctrine, loin de se laisser effrayer par l’objection, y voit une occasion de développer ses conceptions relatives à l'origine de l’homme. Suivant ce naturaliste, l'hypothèse simienne n'est pas en contradiction avec la doctrine polygéniste : seulement on doit noter que nous ne descendons pas d'un seul singe, mais de trois singes. Selon Vogt, trois grands singes anthropomorphes ont donné naissance à trois grandes races humaines : ce sont l'orang, le chimpanzé et le gorille. L'orang est l’ancêtre d'une race brachycéphale, aux bras longs, au poil brun rougeâtre (négritos) ; le chimpanzé est l'ancêtre d'une race dolichocéphale, dont la couleur est noire, les os plus faibles et la mâchoire moins massive (nègre) ; enfin, le gorille est l’ancêtre d'une race plus élevée, qui se distingue par la capacité de la cage thoracique, et qui fut peut-être représentée par l’homme des cavernes, contemporain du mastodonte. Ces inductions, purement hypothétiques, doivent être soumises à un examen sérieux, que les découvertes géologiques permettront un jour de faire avec fruit ; mais d'ici là, tout jugement serait prématuré et toute conclusion attaquable.

— III. HOMME PRIMITIF, CONDITION PREMIÈRE DE L'HUMANITÉ. L’homme des temps antéhistoriques est encore aujourd'hui bien peu connu. Ses ossements ont été retrouvés sur plusieurs points du continent européen, et ils seront sans doute retrouvés en beaucoup d'autres régions, au fur et à mesure que les recherches se multiplieront ; mais d'obscurs débris sont les seuls monuments historiques qu'il nous ait laissés. Quelques fragments d'os, des instruments grossiers, des essais informes de sculpture, des cendres, des fragments de poterie, voila tout ce que l’homme primitif nous a légué, voilà tout ce qui nous reste comme témoignage de son existence, voilà les seuls éléments à l'aide desquels nous puissions essayer de reconstituer son histoire.

Par les débris de son industrie primitive, nous pouvons former des conjectures assez vraisemblables sur le premier habitant des Gaules et des contrées situées au nord de la Gaule ; c'est par milliers que l'on compte aujourd'hui les fragments de pierre et de silex travaillés par l'homme primitif dans cette contrée, avec l'intention évidente de s'en faire des armes. Ce sont d'abord des haches de pierre, grossièrement façonnées, bien rarement pércées d'un trou pour recevoir le manche ; car, le plus souvent, elles s’emmanchaient dans le trou même du bois. Ces haches servaient évidemment à l’homme d'armes de guerre, car, dans un ancien tombeau trouvé en Danemark, on vit un squelette d’homme ayant eu l'épaule fracassée par une de ces haches, qui était demeurée fixée dans l'os. Malheureusement, ce squelette précieux tomba en poussière quand on voulut le relever. Outre les haches, faites d'un silex plus ou moins dur, les collections de l'industrie primitive contiennent un nombre considérable d'instruments divers : marteaux, pierres de fronde, pierres arrondies et perforées, racloires, couteaux de silex, têtes de lance, pointes de flèche, harpons. Les pierres arrondies servaient, les unes à tenir sous l'eau les filets servant à la pêche, les autres de marteaux ; d'autres se lançaient comme des balles ; enfin d'autres servaient peut-être à échauffer l'eau dans des vases de bois. Les racloires servaient sans doute à préparer les peaux ; les têtes de lance, les pointes de dague et de flèche étaient faites avec une rare perfection. Quelques-unes de ces dernières portent des crans dans lesquels on engageait le lien qui les retenait au bois ; d'autres sont perforées pour recevoir la tige, sans doute barbelée ; d'autres enfin sont à trois pointes comme les fers de flèche les plus modernes, et très-délicatement aiguisées. On est étonné de la perfection de ce travail, quand on songe à la grossièreté des moyens d'exécution ; on douterait même de la possibilité d'exécuter un pareil travail si l'on n'avait vu les Esquimaux et d'autres peuples sauvages tailler la pierre de cette manière par percussion et même par pression, à laide d'un simple morceau de bois.

À côté des instruments de pierre, on a retrouvé encore quelques fragments d'os travaillés, des cornes de cerf, des bois de renne façonnés en poinçons ou en aiguilles. Quelques-uns de ces instruments ont pu, dit-on, servir de moules à faire le filet ; mais l’art de tisser était certainement fort peu avancé, car on n'a pu retrouver que quelques tissus très-grossiers de fibres de chanvre et de paille, appartenant à cette époque primitive. L'art plastique a laissé quelques traces : on a trouvé dans les cavernes de France quelques tentatives de sculptures qui, et, ce qui établit d'une manière bien évidente la contemporanéité de l’homme et des mammifères disparus de l'époque quaternaire, c'est que quelques-unes de ces sculptures représentent très-manifestement des animaux aujourd'hui bannis des régions tempérées, ou même détruits ; nous citerons le mammouth, dont on a cru retrouver la représentation dans une sculpture sur os, et le renne, très-distinctement représenté sur un manche en bois de renne de l'époque des cavernes,

Au reste, la période primitive des cavernes a dû avoir une très-longue durée, à en juger par l'épaisseur des couches dans le sein desquelles on trouve les vestiges de la primitive industrie, et on a dû reconnaître la nécessité de la diviser au moins en deux périodes, suivant la perfection avec laquelle la pierre était travaillée. La première époque est dite de la pierre brute ou palaeolithique, caractérisée par le travail grossier des instruments de silex, l'absence de tout autre vestige d'une industrie avancée ; la seconde est dite de la pierre polie ou néolithique. C'est à cette dernière qu'appartiennent vraisemblablement les instruments de pierre les plus parfaits, les instruments d'os, peut-être quelques tumuli ou sépultures de terre, et quelques fragments d'une poterie grossière, façonnée avec les doigts et cuite au soleil. Les