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signes et astronomiques de France, et conséquences qui en résultent relativement à la figure de In terre, par le colonel du génie Puissant, membre de l’Institut. Cet ouvrage est suivi d’un appendice contenant des observations barométriques et thermométriques faites sur le parallèle moyen et appliquées avec les distances zénithales à la mesure des différences de niveau.

Nouvelle détermination de la distance méridienne de Jllnnijouy à Fermentera, dévoilant l’inexactitude de celle dont il est t’ait mention dans la Buse du système métrique, par le même. C’est le colonel Puissant qui a le premier donné l’explication de la singulière erreur qui a empoisonné les jours du pauvre Méchiiin et qui a abrégé sa vie. Cette erreur était de G9 toises.

Parmi l^s Traités de géodésie, nous citerons entre autres :

Traité de géodésie, ou Exposition des méthodes Iriganomélriqiies et astronomiques applicables soit à la mesure de la terre, soit à la confection du canevas des cartes et des plans tnpoyrnp/iiques, par le colonel Puissant (3e édit., 2 vol. in-4o avec planches). Cet ouvrage, spécialement destiné à compléter l’instruction des élèves de l’École polytechnique admis dans le corps des ingénieurs géographes, est cependant rédigé d’une manière si élémentaire que ceux qui ne sont pas versés dans les mathématiques peuvent aisément se mettre au fait des méthodes d’observation et de calcul qui y sont employées. Après les théories et les méthodes astronomiques qui se rapportent à la haute géodésie, viennent les questions relatives à la détermination de la figure de la terre par les observations du pendule, et la mesure des hauteurs par les observations barométriques.

Traité de géodésie, ou Traité de la figure de la terre et de ses parties, comprenant la topographie, l’arpentuge, le nivellement, la gé(jiui>r/iliie terrestre et astronomique, la construction des cartes et la navigation, par L.-B. Francœur, membre de l’Institut. Cet ouvrage est le résumé des leçons données par l’auteur à la Fuculté des sciences de Paris. Il est suivi de Notes sur ta mesure des bases, par M. Hossard, lieutenant-colonel aux ingénieurs géographes, professeur d’astronomie à l’École polytechnique.

Cours de topographie et de géodésie fait à l’École d’application du corps d’état - major, par M. Salneuve, ancien élève de l’École polytechnique.

Cours de géodésie professé à l’École polytechnique, par M. Laussedat, chef de bataillon du génie. Cet ouvrage n’existe qu’en feuilles lithographiées.

Arpentage et géodésie pratique, par M. Thorel, géomètre de première classe du département de l’Oise.

Tables géodésiques donnant tous les multiplicateurs nécessaires à la division de toutes espèces de quadrilatères irréguliers, piécédées d’un Traité de géodésie théorique et pratique des triangles et des quadrilatères irréguliers, par A, Mercier, géomètre.

GÉODÉSIGRAPHE s. m. Cé-o-dézi-gra-fe

— de géodésie, et du gr. graphe, j’écris). Géod. Instrument propre à l’arpentage, qui se manœuvre comme le graphomètre, et inscrit les résultats comme la planchette.

GÉODÉSIMÉTRIE s. f. Cè-o.-dè-zi-mè-tr]

— de géodésie, et du gr. melron, mesure). Arpentage d’après les méthodes géodésiques.

GÉODÉSIQUE adj. Cé-o-dé-zi-ke — rad. géodésie). Geoin. Qui a rapport à la géodésie : Traité géodésiqub. Il Qui est connu par la géodésie : En comparant les longueurs Giio-DÉsiQUiiS des diverses parties de cet arc avec leurs amplitudes astronomiques, on arrivera à un résultat certain. (L. Figuier.)

— Encvel. Les distances qu’on mesure a la surface de la terre, soit directement, soit à l’aide des méthodes trigonométriques, sont toujours les plus courtes entre leurs extrémités : de là est venu l’usage de désigner sous le nom de géodésit/ues les lignes les plus courtes, sur une surface quelconque, entre deux de ses points.

Soit F(x, y, z) — 0 l’équation d’une surface, et supposons qu’il s’agisse de trouver sur cette surface le plus court chemin entre deux de ses points : le calcul des variations donnera immédiatement, pour déterminer ce chemin, la condition

d&.&c + dQ.dy + d^dmo, ds ds " ds

qui devra être satisfaite quels que soient dx, dy et ds, pourvu que ces variations remplissent la condition

(IF, , dF, , dF, n —r-dx + -rdy + -r-dz = 0. dx dy dz

La condition se décomposera donc en dF

.dz

d-r-.

ds

(1)

et

(2)

, dx dx.dz ds dF ds dz

dF dy dy dz ds dF ds

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Et l’une de ces deux dernières, jointe à F(x, y, z) = o, qui en est une conséquence, déterminera la courbe cherchée.

Les lignes géodésiques d’une surface quelconque jouissent de cette propriété remarquable, que leur plan osculateur est en tout point normal à la surface. En effet, le rayon de courbure principal d’une courbe à double courbure fait avec les axes des angles dont les cosinus sont proportionnels à

.dx.du d—, d-f- et ds ds

D’un autre côté la normale à la surface au point x, y, z fuit avec les axes des angles dont les cosinus sont proportionnels à

dF tfF tfF

dx’ dy dz'

Mais, d’après les équations (1) et (ï),

dF rfF dF

dx dy ds

Les deux directions de la normale principale à la ligne géodésique et de la normale a la surface sont donc identiques.

GÉODÉSIQUEMENT adv. (jé-o-dé-zi-keman — rad. géodésique), Par la géodésie ; d’après les règles de la géodésie : Points relevés GÉODÉSIQUEMENT.

GÉODIE. s. f, (jé-o-dî — du gr. geodês, terreux). Zooph. Genre de spongiaires, comprenant plusieurs espèces qui vivent sur nos cotés : La oéouih bosselée provient des mers de la Guyane. (P. Gervais.)

GÉODIQUE adj. Cè-o-di-ke — rad. géode). Miner. Qui a ia forme d’une géode : Cavité

GÉODIQUB.

CÉODORE s. in. Cé-o-do-re — du gr. , terre ; doron, présent). Bot. Genre de plantes, de la famille des orchidées, triba des vandées, comprenant trois espèces, qui croissent aux Indes orientales.

GÉODROME s. m. Cé-o-dro-me — du gr. , terre ; dromos, coureur). Entoin. Genre d’insectes coléoptères pentamères, de la famille des carabiques, tribu des harpaliens, dont l’espèce type vit au Sénégal.

GÉOÉCIEN, IËNNEadj.(jé-o-é-si-ain, iè-ne — du gr. , terre ; oikia, maison). Qui habite la terre, qui vit sur ia terre.

GEOFFRIN (Marie-Thérèse Rodet, dame), femme célèbre du xvmo siècle, née à Paris en 1A99, morte en 1777. Son salon fut l’un des plus fréquentés de ce siècle où les bureaux d’esprit eurent tant d’influence sur le mouvement littéraire et philosophique. Son père était valet de chambre de la dauphine ; son mari, Pierre-François Geoffrin, était un simple bourgeois, assez riche, l’un des fondateurs de la manufacture de glaces, et, par surcroît, lieutenant-colonel de Ta milice, — la garde nationale d’alors, — à Paris.

Quoique dépourvue d’instruction, car elle savait a peine l’orthographe, Mm(J GeofTrin avait un esprit remarquable, une intelligence fine et beaucoup de goût ; l’aristocratie littéraire comme la plus haute noblesse, les princes comme les philosophes, tenaient à honneur d’être reçu3 chez elle ; aussi réunit-elle bientôt dans son salon toutes les sommités de son temps. M. Geoffrin était un excellent homme, parfaitement nul, qui ne l’aidait que bien peu dans le rôle difficile d’une maîtresse de maison dont les réceptions étaient si courues ; les spirituels habitués des dîners ne tarissaient pas sur la bonhomie iiioffeusive de cet obscur bourgeois, qui jamais n’ouvrait la bouche. On racontait qu en lisant un volume de l’Encyclopédie, imprimée sur deux colonnes, il continuait, dans sa lecture, la ligne de la première colonne avec la ligne correspondante de la seconde ; et l’ouvrage lui paraissait fort bien écrit, mais un peu abstrait. On lui donna le premier tome, toujours le même, d’une Histoire des voyages, et.au bout de quelque temps, il trouva que l’auteur se répétait un peu. Un jour, un habitué de la maison demanda ce qu’était devenu ce vieux monsieur, qui assistait régulièrement aux dîners et qu’il ne voyait plus. « C’était mon mari, répondit Mme Geoffrin, et il est mort. »

On trouve, dans une lettre de Mms Geoffrin à l’impératrice de Russie, la grande Catherine, quelques détails sur son enfance et sa jeunesse. Ils sont assez curieux et expliquent la nature particulière de ses goûts et de son esprit. ■ J’ai perdu, écrit-elle, mon père et ma mère au berceau. J’ai été élevée par une vieille grand’mère, qui avait beaucoup d’esprit et une tête bien faite. Elle avait très-peu d’instruction ; mais son esprit était si éclairé, si adroit, si actif, qu’il ne l’abandonnait jamais-, il était toujours à la place du savoir. E>le parlait si agréablement îles choses qu’elle ne savait pas, que personne ne désirait qu’elle les sût mieux, et quand son ignorance était trop visible, elle s’en tirait par des plaisanteries qui déconcertaient les pédants qui avaient voulu l’humilier. Elle était si contente de son lot, qu’elle regardait le savoir comme une chose très-inutile pour une femme. Elle disait : « Je m’en suis

« si bien passée, que je n’en ai jamais senti le

« besoin. Si ma petite-fille est une béte, le « savoir la rendrait confiante et insupportable ; si elle a de l’esprit et de la sensibilité,

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elle fera comme moi, elle suppléera par » adresse et avec du sentiment à ce qu’elle ne

« saura pas ; et quand elle sera plus raison « nable, elle apprendra ce à quoi elle aura ■ plus d’aptitude, et elle l’apprendra bien

« vite. > Elle ne m’a donc fuit apprendre, dans mon enfance, simplement qu’à lire ; mais elle me faisait beaucoup lire ; elle m’apprenait à penser en me faisant raisonner. »

Ce n’est que dans la seconde moitié de sa vie et alors que l’âge lui avait donné une certaine gravité, que iMme Geoffrin inaugura, dans son salon de la rue Saint-Honoré, ces réunions restées célèbres. Mme de Tenein, dans ses dernières années, la voyant fort assidue chez elle, disait : « Savez-vous ce que la Geoffrin vient faire ici ? elle vient voir ce qu’elle pourra recueillir de mon inventaire.» En effet, Mma Geoffrin recueillit quelque chose de l’inventaire de Mine de Tenein, et ce qu’elle y avait de meilleur : laissant à d’autres les intrigues politiques et religieuses, elle se contenta de cultiver le champ de la littérature et des arts.

Deux dîners par semaine réunissaient alternativement les gens de lettres et les artistes ; les artistes peintres, sculpteurs, architectes avaient leur couvert mis le lundi ; le mercredi était le jour des littérateurs, des poètes, des philosophes, des savants. On ne se rend pas bien compte de la raison qui l’avait déterminée à parquer ainsi ses invités dans deux catégories distinctes. Les soirées, que terminait un petit souper, étaient consacrées aux réceptions des gens de haute noblesse et des étrangers de distinction. Autre bizarrerie : tous les dîneurs du mercredi recevaient invariablement une calotte de velours. Il va sans dire que les familiers de la maison, les amis du cœur étaient reçus tous les jours et n’avaient point à se préoccuper des catégories ; c’étaient La Harpe, Diderot, d’Alembert, Thomas, Mannoiitel, Morellet et Stanislas Poniatowski, avant qu’il devînt roi de Pologne. Ainsi choyés par elle, les gens de lettres, dispensateurs de la renommée, ont donné à Mm<* Geoffrin le renom qu’elle possède encore aujourd’hui ; il est question d elle dana tous les Mémoires. Voici ce qu’en dit La Harpe : ■ Mmc Geoffrin n’a ni naissance ni titre : elle est veuve d’un entrepreneur de la manufacture de glaces ; elle jouit d’environ quarante mille livres de rente, fortune médiocre à Paris ; mais elle est remarquable par un esprit d’ordre et d’économie qui double son revenu. Sa maison est devenue le rendezvous du talent et du mérite en tout genre, et ce désir da vivre avec des hommes célèbres a fait rechercher sa société, où l’on était sûr de les trouver. On demande souvent si cette femme, qui a tant vécu avec les gens d’esprit, en a beaucoup elle-même ; non ; mais elle est née avec un sens droit, un caractère sa^e et modéré. Elle a cette politesse de bon goût que donne un grand usage du monde, et personne ne possède mieux le tact dos oonvonances. Elle est bonne et bienfaisante ; elle a rendu des services et aime à en rendre. »

Horace Walpole écrivait, le 25 janvier 1766, à son ami Gray ; « Mme Geoffrin, dont vous avez beaucoup entendu parler, est une femme extraordinaire, avec plus de sens commun que je n’en ai presque jamais rencontré ; une grande promptitude de coup d’œil à déoouviir les caractères, de la pénétration à aller au fond de chacun, et un crayon qui ne manque jamais la ressemblance, et elle est rarement en beau. Elle exige pour elle et sait se conserver, en dépit de sa naissance et de leurs absurdes préjugés d’ici sur la noblesse, une grande cour et des égards soutenus. Elle y réussit par mille petits artifices et bons offices d’amitié, et par une liberté et une sévérité qui semble être sa seule fin en tirant le monde à elle ; car elle ne cesse de gronder Ceux qu’elle a une fois enjôlés. Elle a peu de goût et encore moins de savoir, mais elle protège les artistes et les auteurs, et elle fait la cour à un petit nombre de gens pour avoir le crédit d’être utile à ses protégés. Elle a fait son éducation sous la fameuse Mm& de Tenein, qui lui a donné pour règle de ne jamais rebuter aucun homme ; car, disait l’habile matrone, * quand même neuf sur dix ne

> se donneraient pas un liard de peine pour

> vous, le dixième peut devenir un ami utile. > Elle n a pas rejeté ni adopté en entier ce plan, mais elle a tout à fait gardé l’esprit de la maxime. En un mot, elle nous offre un abrégé d’empire qui subsiste au moyen de récompenses et de peines. •

Ou a cité d’elle un grand nombre de traits charmants, d’un esprit et d’une délicatesse infinis, qui peignent son caractère. Quelqu’un lui faisait remarquer un jour que tout chez elle était en perfection, tout, excepté la crème, qui n’était point bonne. «Que voulez-vous ? dit-elle, je ne puis changer ma laitière. — Eh ! qu’a donc fait cette laitière, pour qu’on ne la puisse changer ? — C’est que je lui ai donné deux vaches. » Ce mot est exquis.

Elle avait fait graver sur des jetons des maximes, dont quelques-unes ont été rappelées par d’Alembert, par Thomas et par Morellet, et qui toutes mériteraient d’être retenues, t II ne faut pas, disait-elle, laisser croître l’herbe sur le chemin de l’amitié.» — « Il y a trois choses que les femmes de Paris jettent par la fenêtre : leur santé, leur temps et leur argent. • — ■ Vous m’assurez, disait-elle un jour de quelqu’un qu’on lui disait être un homme simple, vous m assurez que cet homme

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est simple ; prenez garde : l’est-il avec simplicité ? »

Elle disait de son esprit : « C’est un rouleau plié qui ne se développe et ne se déroule que par degrés, » et elle ajoutait : • Peut-être, à ma mort, le rouleau ne sera - il pas déployé tout entier. » Elle prenait, il est vrai, le mot espi’it dans sa haute acception ; quant à 1 autre esprit, celui qui consiste, par exemple, dans la finesse des reparties, elle en dépensa beaucoup. D’Alembert était à table chez elle, lorsqu’un des convives, connu pour menteur, se mit à raconter une chose extraordinaire. Tout le monde se récria, et soutint que le fait était faux. «Cela est pourtant vrai, dit tout bas d’Alembert à M111» Geoffrin. — Si cela est vrai, répondit-elle, pourquoi le dit-il ?»

C’est Mme Geoffrin qui a dit de l’abbé Trublet, qu’on appelait devant elle un homme d’esprit : «Lui, un homme d’esprit 1 c’est un sot trotté d’esprit. » Et du duc de Nivernais : « Il est manqué de partout, guerrier manqué, ambassadeur manqué, auteur manqué. ■ Un jour son esprit fut méchant : Rulhière faisait chez elle la lecture de ses anecdotes sur ta Russie ; M"10 Geoffrin le pria de les jeter au feu, lui proposant de l’indemniser par une somme d’argent. L’historien se récria, s’in. digna ; mais elle ne lui répondit que pur ces mots sanglants, comme le fouet de Juvénal : « En voulez-vous davantage ?»

Lorsque le comte Poniatowski fut devenu le roi Stanislas et lui écrivit : ■ Maman. jo suis roi ! » elle ne put résister au désir d’aller le voira Varsovie, ce dont il la priait instamment. Elle se mit en route malgré son âge ; elle avait soixante-sept ans. Kn passant par Vienne, elle reçut de l’empereur et de l’impératrice d’Autriche les marques de la plus délicate et de la plus haute considération ; l’impératrice alla au-devant n’elle, et, l’uyant rencontrée, fit arrêter son carro-.se, et pré-. senta ses filles à la petite bourgeoise.

Arrivée à Varsovie, elle trouva dans le palais du roi un appartement absolument semblable u celui qu elle occupait à Paris, et, comme de complicité avec Stanislas, ses amis purent lui faire croire qu’elle était encore dans son salon de la rue Suint Honoré. Chaque courrier lui apportait un paquet de lettrès : c’était Voltaire, qui lui écrivait pour la prier d’intéresser le roi de Pologne a. la famille Sirven ; c’était Marmontel, qui, voyant la considération, les honneurs dont une petite bourgeoise était comblée, lui demandait quelle révolution dans ses idées allait en résulter. Elle lui répondit : « Non, mon voisin (Marmontel logeait dans sa maison), non, pas un mol de tout cela : il n’arrivera rien de tout ce que vous pensez. Toutes choses resteront dans l’état ou je les ai trouvées, et vous retrouverez aussi mon cœur tel que vous le connaissez, très-seusible à l’amitié. »

Elle écrivait k d’Alembert : • Ce voyage fait, je sens que j’aurai vu assez d’hommes et de choses pour être convaincue qu’ils sont partout à peu près les mêmes. J’ai mon magasin de réflexions et de comparaisons bien garni pour le reste de ma vie. •

Les uerniers jours de Mme Geoffrin furent attristés par des dissentiments domestiques. Amie de tous les encyclopédistes, ayant même contribué aux frais d’impression de ce grand ouvrage, elle n’avait que fort peu de religion, quoiqu’elle allât parfois à la messe et qu’elle eût même un confesseur, un Père capucin ; mais sa fille, la marquise de La Ferté-Imbault, celle dont elle disait qu’en la voyant elle eunt aussi étonnée qu’une poule qui a couvé une oie, cette tille était avec elle en complet dissentiment sur ces matières, et surtout ne pouvait supporter l’entourage favori de sa mère. À peine M’"e Geoffrin fut-elle malade, que la marquise ferma les salons et expulsa tous ces gens de peu, littéiateurs et encyclopédistes. Ai armontel et d’Alembert reçurent leur congé, comme les autres. Trop souffrante pour résister, Mme Geoffrin laissait faire, en disant : «Que voulez-vous, ma tille est comme Godefroy de Bouillon, elle veut défendre mon tombeau contre les inridèles. » Puis, ^ans rien aire a cette fille, elle rédigeait son testament, qui devait prouver à d’Alembert, à Thomas et à tous, que jusqu’à la fin elle était restée leur amie. Elle mourut ; c’était le 6 octobre 1777. D’Alembert, qui venait de perdre M"" de Lespinasse, chez laquelle il allait tous les soirs, s’écria, en apprenant la mort de Mm= Geoffrin, chez qui il passait ses matinées : « Maintenant il n’y a plus pour moi ni soir ni matin. »

Terminons par cet aperçu de Sainte-Beuve, qui a analysé la vie et l’influence de Moae (jeoffrin avec beaucoup de sagacité, dans ses Causeries du lundi. « L’esprit que Mme Geoffrin apportait dans les ménagements et l’économie de ce petit empire qu’elle avait si largement conçu était un espnt de naturel, de justesse et ne tinesse qui descendait aux moindres détails, un esprit adroit, actif et doux. Elle avait fait passer le rabot sur les sculptures de sou appartement : c’était ainsi chez elle au moral, et n’en en relief semblait sa devise. «Mon esprit, disait-elle, est comme mes jambes : > j’aime à me promener dans un terrain uni, mais je ne veux point monter une montagne pour avoir Je plaisir de dire, lorsque j’y suis « arrivée : J’ai monté cette montagne. » Elle avait la simplicité, et, au besoin, elle l’aurait affectée un peu. Son activité était de celles qui se font remarquer principalement pur le