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possessions ; mais cette facile victoire contre un ennemi trop faible ne profita guère à l’Autriche. Lorsque vint le partage des territoires conquis, les deux alliés ne s’entendirent plus, et, après les vains efforts de la diplomatie, une guerre terrible éclata entre la Prusse, alliée à l’Italie, d’une part, et l’Autriche de l’autre, ayant pour alliés les principaux États de l’Allemagne (1866). La bataille de Sadowa, perdue par l’Autriche, mit fin à cette guerre. La Prusse se trouva agrandie, et la puissance de l’Autriche, exclue de la Confédération germanique, diminuée d’autant. François-Joseph se vit alors en présence de la situation la plus critique. Non-seulement ses possessions étaient amoindries, mais encore son prestige se trouvait détruit, l’état de ses finances était pitoyable, et les diverses nationalités dont se compose son empire paraissaient en proie à une effervescence révolutionnaire et décentralisatrice, qui annonçait une dislocation prochaine. Pour conjurer la crise, François-Joseph eut la sagesse de comprendre qu’il devait complètement renoncer à la politique de compression suivie par lui jusqu’alors, entrer dans la voie des réformes libérales et réparatrices, satisfaire aux justes exigences des populations en établissant des institutions constitutionnelles, et il mit alors à la tête des affaires l’ancien ministre de Saxe, l’adversaire déclaré de M. de Bismark, le baron de Beust (30 octobre 1866), qui mit aussitôt ce programme à exécution. Le 8 juin 1867, François-Joseph alla se faire couronner à Pesth roi de Hongrie et se concilia ce pays en lui donnant un ministère autonome. Parmi les réformes qui signalèrent cette nouvelle phase du règne de ce prince, nous citerons l’admission des juifs aux droits civils et politiques, la proclamation de l’égalité des confessions religieuses devant la loi, l’abrogation partielle du concordat signé avec Rome, l’établissement du mariage civil (1867), l’abolition de la contrainte par corps (1868), la réorganisation de l’armée sur un pied formidable, etc. En 1867, l’empereur François-Joseph se rendit à Paris pour y visiter l’Exposition universelle. Deux ans plus tard, il fit comprimer l’insurrection fort grave qui éclata dans les bouches du Cattaro, en Dalmatie. Au mois de novembre 1869, il alla assister, en même temps que l’impératrice Eugénie, à l’inauguration du canal de Suez. Peu après son retour, il devait se rendre à Brindisi pour y rencontrer le roi d’Italie Victor-Emmanuel, et amener par là un rapprochement définitif entre les maisons d’Autriche et de Savoie ; mais une maladie du roi d’Italie rendit l’entrevue impossible. L’année suivante, à la suite de la proclamation du dogme de l’infaillibilité papale par le concile, il se décida, bien que catholique fervent, sous la pression de M. de Beust, a déclarer au gouvernement du pape que, les doctrines promulguées par l’assemblée conciliaire plaçant les relations de l’Église et de l’État sur une base toute nouvelle, le concordat passé entre le pape et l’Autriche en 1855 se trouvait frappé de caducité, et que le gouvernement impérial le considérait désormais comme abrogé (30 juillet 1870). À cette époque, la candidature du prince de Hohenzollern ayant tendu les relations diplomatiques de la France et de la Prusse au point d’amener une rupture, François-Joseph proposa, de concert avec l’Angleterre, que les puissances intervinssent pour régler le différend. Mais ces ouvertures furent repoussées par Napoléon III, et, après la déclaration de guerre (17 juillet 1870), l’empereur d’Autriche annonça qu’il conserverait la neutralité entre les belligérants. L’occasion pour lui était belle de se joindre à nous pour tenter de reprendre sa revanche de Sadowa ; mais l’état de son armée, qui n’était pas prête à entrer en campagne, et celui de ses finances, sa position de prince allemand furent autant de raisons qui lui conseillèrent de conserver une attitude purement expectante. Après la chute de Napoléon, il laissa en France son ambassadeur, M. de Metternich, sans reconnaître officiellement, toutefois, le gouvernement de la Défense nationale. Mais, dès que M. Thiers fut proclamé chef du pouvoir exécutif de la République française (17 février 1871), il s’empressa d’accréditer auprès de lui, comme ambassadeur, M. de Metternich. Quelques mois plus tard, M. de Bismark, désirant concilier l’Autriche à la politique prussienne, provoqua les deux entrevues qui eurent lieu à Salzbourg, puis à Gastein, entre l’empereur Guillaume et l’empereur François-Joseph (août-septembre 1871). À la suite de ces entrevues, qui excitèrent si vivement l’attention de l’Europe, François-Joseph fît connaître par M. de Beust aux puissances, et particulièrement au gouvernement français, qu’une entente s’était établie entre les deux grands États allemands en vue du maintien de la paix en Europe, entente naturellement concertée contre la France, au cas où elle voudrait tenter de prendre sa revanche. Depuis cette époque, l’antagonisme permanent qui existe dans les États autrichiens entre les centralistes et les fédéralistes, la prétention de la Bohême à posséder comme la Hongrie un ministère autonome, le refus des Tchèques d’envoyer des députés à la diète centrale, ont amené de graves complications intérieures dans ce pays. À la suite de la dislocation du ministère Hohenwart et de la constitution d’un nouveau ministère, composé d’hommes d’État appartenant aux deux partis en lutte, M. de Beust prit la détermination de quitter le poste qu’il occupait depuis 1866 et donna, au mois de novembre 1871, sa démission de chancelier de l’empire. L’empereur François-Joseph, en se privant des services de cet éminent homme d’État, a tenu à déclarer hautement qu’il continuerait la politique libérale et conciliatrice inaugurée en Autriche par M. de Beust.

François-Joseph (ORDRE DE), ordre autrichien de chevalerie. Il a été fondé, le 2 décembre 1849, par l’empereur François-Joseph Ier, qui lui a donné son nom et l’a destiné à récompenser tous les genres de services. Il se compose de trois classes : les grands-croix, les commandeurs et les chevaliers. Le ruban est rouge foncé.


FRANÇOIS Ier (Janvier-Joseph), roi des Deux-Siciles, fils de Ferdinand IV et de Marie-Caroline, né en 1777, mort le 19 novembre 1830. Il remplaça son père en qualité de vicaire général, en 1812, alors que la souveraineté de sa famille était restreinte à la Sicile, puis à l’époque de la révolution de 1820, et lui succéda à sa mort, arrivée le 4 janvier 1825, À cette époque, les États de Naples étaient occupés par une armée autrichienne, dont le départ n’eut lieu qu’en 1827. Le règne de ce prince fut assez tranquille, et si l’on en excepte le sac de la ville de Bosco, qui s’était soulevée au nom de la liberté (1828), on peut dire que la conduite de François Ier n’a rien de comparable à celle des autres souverains de sa maison. À la veille de la révolution de 1830, il fit un voyage à Paris. Le duc d’Orléans lui offrit une fête magnifique au Palais-Royal ; il y eut un bal splendide, ce qui a fait dire que l’on dansait sur un volcan. Il est le père de Ferdinand II, son successeur ; de la duchesse de Berry et de Marie-Christine, qui fut reine d’Espagne.

François Ier (ORDRE DE), fondé dans le royaume des Deux-Siciles par le roi François Ier, le 28 septembre 1829, et destiné à récompenser les personnes qui se distinguaient dans les arts, les sciences, l’agriculture et le commerce. Le roi était chef et grand maître de l’ordre, qui se divisait en trois classes : les grands-croix, les commandeurs, les chevaliers. Un chapitre de l’ordre soumettait les candidats au roi, qui, seul, pouvait faire les nominations. Les insignes consistaient en une croix d’or, à quatre branches émaillées de blanc, avec large bordure en or et anglée de fleurs de lis en or. Au milieu était un écusson en or avec les lettres F. J., surmontées de la couronne royale. Un cercle en émail d’azur contient cette inscription : De rege optimo merito. Au revers est un écusson, portant au centre ces mots : Franciscus primus instituit mdcccxxix. La décoration, surmontée d’une couronne royale, était suspendue à un large ruban rouge bordé d’un liséré bleu. Les grands-croix la portaient en écharpe de droite à gauche, les commandeurs en sautoir et les chevaliers à la boutonnière.


FRANÇOIS II (Marie-Léopold), ex-roi des Deux-Siciles, né le 16 janvier 1836. Il est fils du feu roi Ferdinand II et de sa première femme, Christine de Savoie, fille de Victor-Emmanuel Ier, roi de Sardaigne. N’étant encore que duc de Calabre, il fut marié, le 3 février 1859, à la princesse Marie-Sophie de Bavière. Lorsque, quelques mois plus tard (22 mai 1859), il succéda à son père, l’attente de ses sujets, les circonstances favorables, les encouragements de la France, de l’Angleterre et du Piémont, tout, en un mot, poussait le jeune roi à accomplir l’œuvre réparatrice qui semblait être la mission de ce règne. Mais, loin d’adopter une politique libérale, François II, timide, mal élevé, inexpérimenté, mal entouré et plus mal servi, ne fit que continuer le triste règne de son père. Il n’y eut de changé à Naples que le nom du roi.

Dominé par la seconde femme de son père, princesse autrichienne, par son confesseur fanatique, Mgr Gallo, par la jeune reine, qui contribua à la perte de sa royauté pour des intérêts qui n’avaient rien de national, entouré de prêtres et de gentilshommes nourris d’idées d’absolutisme et de servilité, défiant et soupçonneux, François II passa son règne de dix-huit mois dans l’irrésolution et l’incertitude. Opposé à toute idée de réforme et de liberté, il remit en vigueur, malgré les représentations de la France et de l’Angleterre, l’odieux système de terreur et d’espionnage employé par son père, et les amis de la liberté n’eurent bientôt plus qu’un planche de salut, l’insurrection. Le 29 mai 1859, il repousse l’alliance du Piémont ; le 29 septembre, il fait arrêter les hommes les plus éminents de Naples ; à la fin de 1859, il fait concentrer un corps d’armée dans les Abruzzes, pour donner la main à l’Autriche en cas de guerre ; en janvier 1860, il repousse de nouvelles offres du Piémont ; trois mois après, nouveau refus à M. de Cavour, qui lui proposait de s’emparer des Marches, tandis que le Piémont aurait pris Ancône ; en mars 1860, nouvelles arrestations : telles furent les fautes dont François II doit partager la responsabilité avec son premier ministre, le général Filangiori. Au printemps de 1860 éclata en Sicile une insurrection qui ne fut étouffée que par une cruelle répression. Mais bientôt apparut Garibaldi, et les choses changèrent de face. Un mois après, il n’y avait plus que la citadelle de Messine qui restât au pouvoir de François II. La main forcée, pour ainsi dire, le roi se décida, comme son père (1818) en pareille occurrence, à donner une constitution (25 juin 1860), et à appeler M. Spinelli au ministère. En même temps il fit faire au Piémont toutes les propositions qu’il avait rejetées précédemment. Sans mettre en doute la nécessité de cette conversion de la peur, M. de Cavour demanda à réfléchir jusqu’au moment où le parlement napolitain se réunirait. Pendant ce temps, le 15 juillet, les soldats de la garde royale de François II simulaient une émeute absolutiste ; le 8 août 1860, Garibaldi passait le détroit, débarquait sans résistance au cap dell’Armi, en Calabre, et se dirigeait vers Naples, plutôt en triomphateur qu’en envahisseur ; le 27 août, François II réclamait vainement la protection des escadres française et anglaise. Il demandait des conseils, et son oncle, le comte de Syracuse, lui proposait d’abdiquer en faveur de Victor-Emmanuel ; le 6 septembre, il quittait Naples, en protestant contre la prise de possession de ses États, pour aller se réfugier à Gaëte, où il allait illustrer d’un dernier reflet de virilité inattendue un règne expirant. Après une courageuse défense, il signe la capitulation de Gaëte, le 13 février 1861, et arrive à Rome le 15 février. Sa protestation contre l’adoption du titre de roi d’Italie par Victor-Emmanuel est datée de Rome, 5 avril 1861. Depuis, son rôle politique s’est borné à fomenter le trouble et le brigandage dans les provinces napolitaines.


FRANÇOIS Ier, II et III, ducs de Modène. V. Este et Modène.


FRANÇOIS IV, duc de Modène, né à Milan en 1779, mort à Modène en 1846. Il était fils de l’archiduc Ferdinand d’Autriche, gouverneur de la Lombardie, et de Marie-Béatrix d’Este, la riche et ambitieuse héritière des États et des trésors des familles souveraines d’Este et de Cybo. Élevé par un chevalier de Malte et par un jésuite, sous la direction de son orgueilleuse mère, le jeune prince reçut de bonne heure des idées politiques et sociales dignes du moyen âge, ce qui donna à son règne une physionomie bien étrange. Après avoir dédaigné la main de Pauline Bonaparte, et s’être vu enlever par Napoléon celle de l’archiduchesse Marie-Louise, qu’il convoitait, François épousa, en 1812, sa propre nièce, Marie-Béatrix de Savoie, fille de Victor-Emmanuel Ier, qui lui apporta une dot considérable. Mais la jeune princesse n’accepta cette union qu’avec répugnance, et se refusa, dit-on, pendant plusieurs années, à la consommation du mariage. Toujours est-il qu’elle ne le rendit père qu’en 1817. Ils eurent pour enfants : Marie-Thérèse, qui a épousé le Comte de Chambord ; François, qui succéda à son père ; Ferdinand, mort en 1849, laissant une fille, à qui reviendra l’immense fortune des ducs de Modène ; et enfin Marie-Béatrix. Cette dernière, qui a épousé l’infant don Juan d’Espagne, a été peu de temps après abandonnée par son mari. En 1814, François IV fut mis en possession des États de la maison d’Este, c’est-à-dire du duché de Modène, auquel vint se joindre, à la mort de sa mère, le duché de Massa-Carrara. Son premier soin fut de remettre le code modénais de 1771 dans toute sa vigueur, y compris la torture, et de rappeler les jésuites. Forcé de quitter ses États, en 1815, pendant la courte campagne de Murat, il y rentra à la suite des Autrichiens et supprima les pensions de tous les anciens militaires du royaume d’Italie qui s’étaient joints à l’armée de Murat. Le nouveau duc détestait presque autant Metternich que Napoléon. Systématiquement hostile aux idées libérales, François réalisa l’idéal du pouvoir personnel et arbitraire. Il confondit sans scrupule les finances de l’État avec les siennes propres, et les économies qu’il fit sur les revenus publics lui permirent d’accroître, par d’importantes acquisitions en Bohême, son immense fortune, la plus considérable de celles des princes souverains en Europe. Il mit tous les établissements d’instruction publique dans les mains des jésuites, se montra hostile à la jeunesse, et lui défendit d’aller étudier au dehors. En même temps, il distribuait les emplois civils et militaires à la noblesse, supprimait les conseils communaux et multipliait les couvents. À tous ces torts il joignait le tort, plus grave encore, de substituer sa volonté à celle des lois, en annulant ou en modifiant, par des rescrits, les décisions de l’autorité judiciaire, et d’avilir la magistrature par l’abus de la police secrète. Aussi, au congrès de Vérone, fut-il chargé de faire la haute police dans l’Italie entière pour le compte de la Sainte-Alliance. Mais son ambition secrète était beaucoup plus vaste : il voulait se créer une sorte de royaume de la haute Italie, soit aux dépens de l’Autriche, soit plutôt en succédant, en Piémont, à la branche aînée de la maison de Savoie à l’exclusion de Charles-Albert : les événements de 1821 encouragèrent cette dernière espérance. Aussi ne manqua-t-il pas d’exciter contre le jeune prince de Carignan le ressentiment du roi Charles-Félix, qui se trouvait à Modène en 1821. Cette même année vit commencer à Modène les procès des carbonari jugés par des tribunaux extraordinaires, composés d’hommes tarés et jouissant, à ce titre, de l’estime du duc. Il fallait au moins une exécution ; elle eut lieu : ce fut celle d’un nommé Andreoli. Le chef de la police ayant été assassiné, on accusa de ce meurtre un innocent qui, bien qu’acquitté par le tribunal, fut, par ordre du duc, jeté dans un cachot, où il eût sans doute pourri jusqu’à la fin de ses jours si la révolution de 1831 ne fût venue l’en tirer. C’est aussi vers cette époque que François imagina de supprimer les universités et d’enfermer les étudiants des Facultés dans les pensionnats des jésuites : c’était pour donner aux jeunes gens l’habitude de la délation. Cependant le duc intriguait avec les carbonari, et notamment avec Cyrus Menotti, soit qu’il comptât réellement sur leur appui pour devenir roi d’Italie, soit qu’il n’agît ainsi que pour mieux connaître leurs secrets. Toujours est-il qu’au moment où la conspiration allait éclater, François, qui, grâce à sa duplicité, en tenait tous les fils, fit arrêter une trentaine des principaux conjurés, le 3 février 1831, et écrivit aussitôt au gouverneur de Reggio un billet qui a été retrouvé et où on lit ces mots : « Envoyez-moi le bourreau. » Signé : François. Mais la nouvelle de l’insurrection de Bologne et de la prochaine arrivée des insurgés ne laissa pas au duc le temps d’accomplir son atroce projet, et, le 5 février, il partait lâchement, sans avoir essayé la moindre défense ; mais il traînait après lui l’infortuné Menotti, qui avait eu le malheur d’être son ami, et qui devait être la victime expiatoire. Le 8 mars, le duc rentrait, toujours à la suite des Autrichiens, et son premier acte d’autorité fut de faire pendre Menotti et l’avocat Borelli, dont tout le crime était d’avoir rédigé la délibération par laquelle un gouvernement provisoire avait été constitué pendant l’absence du duc. Dès lors, le duc fut dominé par la peur et par deux conseillers pires encore : l’un était l’infâme Canosa, Napolitain trop fameux, l’autre le vil Riccini, ministre du buon governo ou de la police. Ces deux misérables exploitèrent habilement les terreurs de François au profit de leurs intérêts et de leurs rancunes privées. Il fallait à tout prix des conspirations imaginaires : de là les procès et les exécutions de Ricci et de Mattioli, victimes de la haine de Riccini. Canosa rédigeait à Modène, sous le titre impudent de la Voix de la vérité, une feuille san-fédiste furibonde et menteuse, et le duc, qui avait refusé de reconnaître tous les gouvernements constitutionnels, n’ouvrait les barrières de ses États qu’aux partisans du comte de Chambord, de don Carlos et de dom Miguel. Sauf cette exception, il était parvenu à élever une sorte de muraille de la Chine autour de ses frontières, dont il prétendit avoir su éloigner le choléra, mais dont il éloigna aussi les journaux, les idées modernes, les congrès scientifiques et les chemins de fer. Vers la fin de son règne, il voyait toujours les ombres de ses victimes. Mais comme il n’est rien ici-bas d’absolument mauvais, il faut ajouter que ce prince, qui ne manquait ni d’intelligence ni d’activité, favorisa l’agriculture et soulagea, dans une assez large mesure, les classes pauvres, se montra généreux envers les émigrés légitimistes, Espagnols et Portugais, encouragea par des subsides la société scientifique des Quarante, résidant à Modène, augmenta de 15,000 volumes sa bibliothèque publique, et forma un musée de 35,000 monnaies et médailles. Stendhal a donné un tableau saisissant de la cour de ce prince dans la Chartreuse de Parme.


FRANÇOIS V, ex-duc de Modène, fils du précédent et de Marie-Béatrix de Savoie, né à Modène le 1erjuin 1819. Il succéda à son père le 21 janvier 1846. Précédemment déjà (30 mars 1842), le jeune prince avait épousé la princesse Aldegonde de Bavière. Peu après son avènement au trône, il donna l’aînée de ses sœurs au comte de Chambord, et la seconde à don Juan d’Espagne. Le règne de François V fut une pâle copie de celui de François IV. La même loi suprême, c’est-à-dire l’arbitraire le plus effréné, continua de régir Modène. Les arrêts de la justice n’étaient comptés pour rien, et le duc les corrigeait à son gré par des rescrits.

Cependant le réveil de l’Italie approchait, et les premiers symptômes éclataient de toutes parts. François V aurait pu consolider à jamais son trône en acceptant les ouvertures de Pie IX relatives à la ligue douanière entre les États italiens ; mais, au contraire, le jeune prince les repoussa avec défiance et se serra de plus en plus contre l’Autriche. Quelque temps après, Metternich lui dictait cet étrange traité qui faisait de Modène une province autrichienne et de son duc un simple proconsul. Le 20 décembre 1847, l’armée autrichienne venait prendre possession du duché. Quelques mois plus tard, à la nouvelle des constitutions qui étaient proclamées dans toute l’Italie, le jeune prince, conseillé par son oncle l’archiduc Ferdinand, qu’on appelait à cette époque le bourreau de la Gallicie, refusa de pactiser avec le libéralisme. Puis, amené malgré lui à quelques concessions insignifiantes qui ne firent qu’exciter les esprits, le duc partit au milieu du mécontentement général. Cependant, sous l’influence d’un honnête homme, le président Scozia, le duc, en quittant ses États, délia les