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—. Conforter à soi : Songez à vous conforter’ J’estamac.

— Antonymes. Débiliter, déconforter.

CONFORTI (Raphaël), avocat et homme d’État italien, né dans le royaume de Naples vers 1808. Il se distingua de bonne heure par ses succès au barreau napolitain. Député au parlement de Naples en 1S4S, il fit partie du ministère constitutionnel Carlo Troya, qui se retira après le coup d’État royal du 15 mai. Conforli, persécuté comme ses collègues après le triomphe de la réaction, fut assez heureux pour échapper à la prison. Il se retira en Piémont, et y fut un des membres les plus influents de l’émigration napolitaine. Fixé à Turin, il y exerça sa profession avec éclat jusqu’au moment où l’entrée de Garibaldi a Naples lui permit de rentrer dans son pays. Accouru à Naples avec ses compagnons d’exil, il fit partie, avec Scialoja, Mancini, etc., du premier ministère dont s’entoura Garibaldi, ministère qui hâta, par tous les moyens, l’annexion immédiate au Piémont, et qui fut désigné sous le nom de Consorteria. Elu député au premier parlement italien, M. Conforti entra, en avril 1862, dans le ministère Rattazzi comme ministre de la justice, à la place de Cordovà, et il fut remplacé lui-même en décembre par M. Pisauelli. Depuis cette époque, M. Conforti n’a cessé de prendre une part aussi considérable que brillante à toutes les grandes discussions qui ont agité le parlement italien. Dans la discussion sur la peine de mort (mars 1866), il s’est fait remarquer parmi discours dans lequel il combattait très-éloquemment l’abolition immédiate et radicale de la peine de mort.

CONFRATERNEL, ELLE adj. (kon-fra-tèrnèl, è-le — du préf. con, et de fraternel). Relatif aux confrères, aux devoirs, aux sentiments de confrères : Des rapports confraternels.

CONFRATERNITÉ s. f. (kon-fra-tèr-ni-té

— du prêt", con, et de fraternité). État de confrères ; relations entre confrères ; rapports d’amitié fondés sur une similitude d’état ou de situation : 11 existe une confraternité naturelle entre tous les sacerdoces. (B. Const.) Celte confraternité, qui attachait les habitants d’une rue les uns aux autres, liait encore plus intimement entre eux les locataires d’une maison. ( !•’. Souliô.)

— Ane. coût. Confraternité de coutumes, Usage où l’on était en Flandre de régler la

"succession d’après la coutume de la ville dont le défunt était bourgeois, et de déférer aux tribunaux de la même ville toutes les difficultés relatives à cette succession.

CONFRÈRE s. in. (kon-frè-re — du préf. con, et de frère). Membre d’un même corps, d’une même association religieuse ou autre : Je suis si peu désuni d’avec mes confrères que c’est de concert avec eux que j’ai donné mon livre au public. (Fén.) Les lois de l’Académie défendent aux académiciens d’écrire ou de faire écrire contre leurs confrères. (La Bruy.) Les hommes de lettres sont maintenant mes coNFRÉRiis. (St-Evrem.) Il n’est point de la dignité de l’homme qui embrasse la médecine dfi marcher sur les brisées de son confrère en le dénigrant. (Gardanne.) Désormais, c’est l’homme d’esprit qui accorde aux gentilshommes le titre de confrère, (Renan.)

Le médecin Tant-Pis allait voir un malade Que visitait aussi son confrère TantMieux.

La Fontaine.

Maître Pointu, procureur en la cour. Atteint au col d’une humeur qui l’obstrue. Au médecin demandait, l’autre jour, Si l’on pouvait y mettre une sangsue ? Le remède, dit-il, peut arrâter le mal ; Mais, entre nous, je doute qu’il opère, Car je crains tort que l’animal

Ne prennépas sur la peau d’un confrère.

Confrère en, S’occupant également de ; également disciple de, : Confrère en Apollon. Confrère en littérature, en érudition.

— Pop. Confrèr.e de la lune, Mari trompé, parallusion aux cornes du croissant de l’astre.

— Hist. rel’i» ;. Clere de l’Oratoire, qui n’est pas encore prêtre.

— Hist. littér. Confrères de la Passion, Première troupe dramatique, au moyen âge, formée de gens associés pour donner des représentations religieuses.

— Syn. Confrère, collègue. V. COLLEGUE.

— Encycl. Use forma, vers la fin du xive siècle, diverses troupes d’acteurs nomades qui représentaient des scènes tirées de l’Évangile et, entre autres, celles de la Passion. Kn 139S, défense fut faite par la police aux habitants de Paris de représenter, sans permission du roi, aucun jeu dont les personnages fussent tirés de la Vte des saints ou de la Passion de Notre-Seigneur, et cette permission fut accordée spécialement aux confrères de la Passion, qui avaient fondé le service de leur confrérie religieuse à l’hôpital de la Trinité, près de la porte Saint-Denis. Privilégiés par cette autorisation, tes confrères louèrent alors une salle de ce même hôpital pour y donner des représentations dramatiques. Un théâtre y fut élevé, et, chaque dimanche et jour de fête, divers spectacles, dont le sujet était invariablement tiré du Nouveau Testament, étaient offerts au public, qui y prit un tel goût que les prêtres, pour ne pas voir déserter les

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églises, se virent contraints d’avancer l’heure des vêpres. La province suivit l’exemple donné par Paris, et Rouen, Angers, Le Mans, Metz eurent des théâtres sur lesquels jouaient les confrères de la Passion. Mais la comédie allait bientôt avoir pour nouveaux interprètes les basoehien.s ; ceux-ci jouèreSt des farces qui menacèrent grandement d’enlever à leur profit la vogue qui s’était attachée aux mystères des confrères. À cette concurrence vint se joindre celle des Enfants sans souci, qui obtinrent de Charles VI le privilège de jouer des soties. Ce que voyant, les confrères de la Passion sollicitèrent et obtinrent une fusion générale, qui fut désignée sous le nom expressif de Jeu des pois piles. L’association dura peu, et les confrères durent se retirer pour reprendre le cours de leurs représentations religieuses. En 1539, ils quittèrent l’hôpital de la Trinité et vinrent se loger à ljhôtel de Flandre, où ils restèrent jusqu’en 1343. Mais déjà le goût s’était épuré parmi les auteurs et les spectateurs de ces jeux scéniques, et si, au siècle précédent, les confrères se. bornaient a représenter des scènes muettes qui émerveillaient les regards des bourgeois et des grands par la fidélité des costumes, le luxe de la décoration et le nombre des personnages appelés à représenter les mystères de la nativité de Notre-Dame, de son mariage, de l’adoration des trois mages, du massacre des Innocents, de la parabole du semeur, etc., déjà était apparu sur plusieurs points un acteur qui, sous prétexte d’expliquer le spectacle, adressait à la foule de -véritables discours en vers. Parfois les confrères donnaient leurs représentations en pleine rue, et c’était à l’aide du cri et de la montre qu’ils se mettaient en communication avec le public. Lors d’une représentation solennelle, les confrères de la Passion parcouraient la ville en grand appareil, et faisaient une proclamation à tous les carrefours par l’organe de quatre personnages vêtus de noir, montés sur des mules garnies de housses, qui marchaient au milieu d’un nombreux cortège, précédés par six trompettes ayant a leurs instruments des banderoles aux armes du roi, et avec eux le trompette ordinaire et le prieur juré de la ville. Cette proclamation de la pièce qui devait être jouée était tout entière en vers bizarres et burlesques, où les jeux do mots les plus puérils se trouvaient associés à des libertés de langage qu’on ne saurait reproduire.

Lors de l’entrée de Louis XII à Paris, le sacrifice d’Abraham et le crucifiement de Jésus entre les deux larrons avaient été représentés, devant l’église de la Trinité, par les confrères, sur un théâtre dressé en plein air, avec un luxe de mise en scène qui avait demandé la participation de machinistes habiles, et, à’cette époque, les mystères étaient devenus de véritables pièces de théâtre. I.p.s confrères portaient un pourpoint noir serré autour du corps par une large ceinture de cuir, et leurs mains étaient recouvertes de moufles de chamois ; c’était sous ce costume que paraissaient tous ceux qui ne représentaient pas un personnage sacré.

En 1543, l’hôtel de Flandre fut démoli par ordre de François Ier. Ce fut alors que les confrères se décidèrent à acheter, sur Remplacement de l’hôtel de Bourgogne, situé rue Mauconseil, une maison qu’ils convertirent en salle de spectacle, et un arrêt de la même année leur accorda le privilège exclusif de l’exploitation dramatique à Paris ; mais ce privilège, qui semblait devoir assurer d’une manière définitive leur existence, eut au contraire pour résultat de les faire disparaître, par la raison qu’il leur défendait de jouer des mystères, et qu’ils devaient s’en tenir à la représentation de pièces profanes. Ceci s’accordait mal avec l’habit religieux dont ils étaient revêtus ; aussi préférèrent-ils renoncer a leur entreprise, et ils transportèrent leur privilège à une troupe de comédiens, se réservant la jouissance de deux loges dans la saile que firent ériger leurs successeurs, sous le nom de salle de !'Hôtel de Bourgogne, qui devint le berceau de la Comédie-Française.

L’opinion la plus générale établit le berceau de la scène française dans le village de Saint-Maur-les-Fossés, situé au delà de Vincennes ; nos arts scéniques prennent naissance auprès des cérémonies religieuses, au milieu de cette foule immense de pèlerins, de pénitents et de gens de toute espèce que la dévotion appeiatt dans ce village pour visiter les reliques de saint Babolein et de saint Maur, ou pour boire l’eau de la fontaine des Miracles, qui, disait-on, guérissait d’un grand nombre de maladies, et spécialement de la goutte. Bien avant les confréries de la Passion, dit M. Charles Magnin, avant ces pieuses associations laïques ou mi-partie laïques, d’autres associations avaient accompli une œuvre de même nature. Un autre système avait fourni sa course et satisfait les imaginations populaires, toujours avides de plaisirs scéniques et des émotions du drame. Les mystères, les moralités, les soties, représentés par les soins des corporations de métiers ou aux frais des compagnies de judicature sur nos places publiques et dans les salles de nos maisons de ville, sont une des formes les plus récentes de l’art théâtral, et par conséquent ne sauraient être considérés comme l’origine directe et véritable du théâtre tel que nous le voyons. On croit trop généralement que le génie aromatique, après sept ou huit cents ans de

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sommeil, s’est réveillé au xn» ou auxiv siècle, un certain jour, ici plus tôt, .là plus tard. Chaque historien s’épuise en efforts pour fixer l’heure où cette révolution dans les facultés humaines s’est opérée. C’est une grande erreur ; en effet, le génie dramatique a toujours existé en France ; seulement son Ian■ gage, son allure, ses interprètes étaient bien différents de ce qu’ils sont aujourd’hui. Les prêtres chrétiens, désespérant d’extirper du cœur des grands et du peuple la passion des fêtes et des représentations scéniques, songèrent de bonne heure à s’emparer de l’instinct dramatique, à le diriger vers les choses saintes, et à le faire servir à augmenter l’attrait des cérémonies de l’Église. En cela ils imitaient, sans s’en douter peut-être, les prêtres du paganisme, qui, dans les mêmes vues, avaient donné à l’art dramatique de l’antiquité ses premiers développements. M. Magnin compte trois phases diverses de progrès ou de décadence, que le drame hiératique a successivement parcourues : l° l’époque de la coexistence, du polythéisme et du christianisme ; 2i> l’époque de l’unité catholique et du plus grand pouvoir sacerdotal ; 3° l’histoire de la participation des laïques aux arts exercés jusque-là par le clergé seul. La première de ces périodes s’étend du i" au vie siècle ; on peut la nommer période romane ; il ne nous reste aucun monument dramatique de cette époque où la langue romane, s’il y en avait une, ait été employée en tout ou en partie. La seconde période s’étend du vie au xue siècle et coïncide avec le plus complet développement du génie sacerdotal ; on peut la spécifier sous le nom de hiératique. C’est à cette époque qu’il faut rapporter les mystères des Vierges sages et des Vierges folles. Enfin la troisième période, ou époque, des confréries, nous montre l’art dramatique échappant en partie, comme les autres arts, des mains affaiblies du sacerdoce, pour passer, au xne siècle, dans celles des communautés laïques, pleines de cette ferveur pieuse et de cet enthousiasme de liberté qui amenèrent, trois

siècles plus tard, l’entier affranchissement de la pensée et l’entière sécularisation des arts. 11 nous est resté de cette époque des monuments dramatiques en langue française, assez considérables et d’une perfection relative assez grande pour que l’on puisse supposer sans témérité qu’elle en a produit davantage ; quoi qu’il en soit, nous tacherons de donner au lecteur, dans une sobre mais substantielle analyse, une idée exacte et complète de ce qui nous en reste. Dès l’ouverture de cette troisième période, nous verrons le drame ecclésiastique obligé de renoncer à la langue

latine et de la remplacer par des idiomes vulgaires. Devenu peu à peu trop étendu pour conserver sa place dans les offices, le drame liturgique fut représenté les jours de fête après le sermon. La Bibliothèque de la rue Richelieu, aujourd’hui Bibliothèque impériale, possède un précieux manuscrit des premières années du xve siècle, qui ne contient pas moins de quarante drames ou miracles, tous en l’honneur de la Vierge, la plupart précédés bu suivis du sermon en prose qui leur servait de prologue ou d’épilogue. Déjà, dans ce recueil, dont la composition remonte au Xive siècle, plusieurs légendes laïques ou chevaleresques, telles que celle.de Robert le Diable, dénotent l’affaiblissement graduel et la prochaine décadence du.drame hiératique. Le premier auteur dramatique dont les confrères de la Passion représentèrent vraisemblablement les œuvres fut Adam de la

Halle ; il peut certainement être mis, avec Rutebœuf et Jean Bodel, au nombre des fondateurs de l’art dramatique en France. Ce poète est encore connu.sous le nom d’Adam le Boçu (Bossu), ou même simplement du Iioçu d’Arras. 11 n’était cependant pas fort affligé de cette difformité, et peut être doit-il ce surnom bizarre à quelqu’un de ses parents, ou bien encore à la finesse de son esprit. Les jongleurs étaient souvent des bossus, témoin le fabliau des Trois boçus dans le recueil de Barbesan. Arras était alors le centre du luxe et du plaisir ; les tournois, les joutes, les cours plénières, toutes les fêtes d’aruiea et d’amour s’y succédaient. Dans une chanson dont l’auteur est inconnu, le poète fait descendre Dieu le Père dans la ville d’Arras pour y apprendre l’art défaire des chansons. Elle montre mieux que toute autre en quelle réputation était la ville d’Arras parmi les trouvères. Adam de la Halle composa le Jeu du mariage pour divertir ses amis d’Arras, vers l’an 1263. Cette date semble résulter, du discours de maître Henri, père d’Adam, relatif aux censures ecclésiastiques que le pape venait de renouveler contre les clercs bigames. On sait que l’irrégularité de bigamie consiste, en droit canon, à épouser des femmes veuves ou des filles qui ont notoirement perdu leur virginité.

Et chascuns le pape encosa

Quand tant de bons clcrs desposa. Ne pourquant n’ira mie ensi.

Car aucun se sont acati

Des plus vaillants et des plus rikes, Qui ont trouve raisons Criques

Qu’ils prouveront tout en apert

Que dus clers par droit ne désert Pour mariage estre asservis ;

Ou mariages vaut trop pis

Que demeurer en soignantage.

■ Et chacun accusa le pape, lorsqu’il déposa tant de bons clercs ; cependant, cela n’ira pas

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ainsi, car quelques-uns des meilleurs et des plus riches se sont roidis ; ils ont trouvé de bonnes raisons par lesquelles ils prouveront clairement que nul clerc, suivant le droit, ne mérite pour se marier d’être réduit en servitude ; ou le mariage est pire que l’état de concubinage. » La colère du poëte était causée par une bulle du pape Alexandre IV, adressée le 13 février 1259 à l’archevêque de Salzbourg ; le pape y renouvelait les anciens canons qui interdisaient les choses saintes aux clercs concubinaires et leur faisait perdre leur privilège de clergie. La pièce à laquelle appartiennent les vers que nous venons de citer et de traduire porte le titre de Li jus Adan ou de la Feuillie ; elle fut représentée à Arras par les confrères de la Passion, et, comme elle est fort connue, nous pouvons en inférer que ces confréries jouèrent le drame d’Adam de la Halle dans les principales villes de France. Cependant la ville d’Arras, dont les poètes du temps ont fait de si joyeuses descriptions, fut frappée par de cruelles calamités. Beaucoup de citoyens furent obligés de s’expatrier. Adam et maître Henri, son père, se retirèrent à Douai. Notre poste a consigné ses regrets dans des adieux ou congés adressés à sa ville et aux  :>ms qu’il était obligé de quitter. L’exil d’Adam ne fut pas éternel ;.il revint dans sa patrie : il célèbre son retour dans sa trente-deuxième chanson. Il finit par s’attacher à la maison de Robert II, comto d’Artois, neveu de saint Louis, et ce fut pendant le voyage de ce prince à Naples qu’Adam de la Halle composa, pour le divertissement de la cour, la jolie pastorale de Robin et Marion ; un auteur inconnu composa le Jeu des pèlerins, qui sert de prologue a la pièce d’Adam. Lijus Adan est notre plus ancienne comédie, tandis que Li giens de Robin et Marion est la première de nos pastorales, et même le premier opéra-comique qui ait été joué en France, Cette dernière pièce obtint dans son temps un grand succès. On pourrait croire qu’elle a donné naissance au proverbe : « Ils s aiment comme Robin et Marion. • Robin et Marion, dans notre littérature romane, sont comme le type des amoureux tendres et naïfs de village ; plusieurs pastourelles du xiiif siècle roulent sur ces deux personnages rustiques. Les divers ouvrages d’Adam de la Halle représentés par les confrères de ta Passion sont donc ceux dont nous venons de parler. En outre, nous avons : Li congiés d’Adam d’Arras ; C’est du roi de Sezile, po6me que nous appellerons la Chanson de Charles d’Anjou, rot de Naples, et des chansons, des’jeux-partis ou tensons, des motets, des rondeaux et d’autres petites pièces dont il n’existe pas de recueil spécial. Parmi les autres pièces d’autres poètes que jouèrent fréquemment les confrères de la Passion, nous citerons encore le Miracle de Théophile de Rutebœuf. Le sujet de ce drame est l’apostasie, puis le repentir de Théophile, vidame de l’Église d’Adana dans la Cilicie Ile ou Trachée, vers l’an 538 de J.-C, lequel, pour rentrer dans sa charge dont il avait été dépouillé par son évêque, s’était donné au diable. L’histoire de Théophile, d’abord écrite en grec par Eutychianus, son disciple, qui dit avoir été témoin oculaire d’une partie des faits qu’il rapporte, et avoir appris les autres de la propre bouche de son maître, a été traduite en prose latine par Paul Diacre, de Naples. Il y en a aussi une ancienne traduction latine par Gentianus Honestus, publiée dans le tome V des Vies des saints Pères d’Aloysius Lipomanus, puis’ par Laurent Surius, d’après Siméon le Métaphraste, qui aurait joint l’histoire de la pénitence de Théophile, écrite par Eutychianus, aux autres vies de saints qu’il a recueillies. Dans le siècle suivant, l’histoire du vidame d’Adana fut mise en vers hexamètres par un écrivain qu’on croit être Marbode, évêque de Rennes ; enfin elle fut rimée en français dans le xm= siècle par Gautier de Coinsi, d’abord moine de Saint-Médard de Soissons, ensuite prieur de Vie-sur-Aisne, où il mourut en 1236. L’histoire abrégée de Théophile était contenue dans le lectionuaire manuscrit de l’église de Saint -Orner, parmi les leçons qu on lit à matines le septième jour de l’octave de la Nativité de la Vierge Marie. Zacharias Lipelons donne aussi, au t février, un autre résumé de cette histoire ; c’est un abrégé de la version de Gentianus Honestus ; enfin Vincent de Beauvais rapporte également un récit du même fait d’après le Manualis de Sigebert. L’histoire de Théophile était populaire au moyen âge ; saint Bernard, dans son sermon Sîgnum magnum, sur les paroles de l’Apocalypse ; saint Bonaventure, dans son Miroir de la sainte Vierge, neuvième leçon ; Albert le Grand, dans sa Bible de la sainte Vierge (ch. m), et d’autres auteurs dont le détail se trouve dans la collection desBollandistes, parlent de la pénitence de ce saint. L’histoire de Théophile n’était pas moins en faveur chez les artistes chrétiens que chez les riineurs du moyen âge ; on la trouve sculptée deux fois à Notre-Dame de Paris, l’une au portail du nord, l’autre contre le mur du nord au rond-point ; elle est peinte dans la cathédrale de Laon sur une verrière du chevet ; on la voit encore dans Saint-Pierre de Troyes, sur un vitrail du chœur, et dans l’église de Saint-Julien du Mans, également sur un vitrail du chœur. Il est peut-être à propos de faire observer ici que la verrière de Lac n donne sur l’histoire de Théophile des détails que ne contiennent pas les textes. La Re-