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tre du même genre ; art de les composer ; genre littéraire qu’elles constituent : ta comédie a été portée par Molière à la plus grande perfection connue. (Acad.) La comédie est un poème ingénieux qui, par des leçons agréables, reprend les défauts des hommes. (Mol.) Si l’emploi de la comédie est de corriger les viens, je ne vois pas par quelle raison il y en aura de privilégiés. (Mol.) La comédie est l’art d’enseigner la vertu et les bienséances, en actions et en dialogues. (Voit.) La comédie doit instruire par des exemples agissants. (J.-B. Kouss.) La malice naturelle aux hommes est le principe de la comédie. (Marmontel.) La comédiu est le tableau de la vie mise en action. (Grimm.) Molière donne à ta comédie la moralité de l’apologue. (Chamfort.) La comédie corrige les manières et le théâtre corrompt les mœurs. (De Bonald.) La comédie doit s’-abstenir de montrer ce qui est odieux. (J. Joubert.) La comédie ne doit draper que les ridicules du temps passé. (N. Lemercier.) Les atellanes, d’origine osque, n’étaient qu’une sorte de comédie grossière. (Lamenn.) Selon les anciens, la tragédie produit ta terreur et la pitié, la comédie excite le rire. (Lamenn.) La comédie politique dénonce plutôt qu’elle ne critique. (tit-iVlarc Girard.) bans un pays où les mœurs ■ changent tous les dix ans, la comédie est éternelle, (J. Sandeau.) La comédie française sourit là où, la comédie romaine éclate d’un rire effronté. (P. de St-Victor.)

La comédie apprit a rire sans aigreur.

BOILEAU.

La bonne comédie est celle qui fait rire.

ANDItlEDX.

La comédie, enfin, par d’heureux artifices, Fait aimer les vertus et détester les vices, Dans les âmes excite un noble sentiment. Corrige les défauts, instruit en amusant, En morale agréable en mille endroits abonde, Et, pour dire le vrai, c’est l’école du monde.

Poisson.

Il Comédie de caractère, Celle dont l’intérêt est principalement fondé sur le développement que l’on donne au caractère d’un des personnages : La comédie de caractère est celle qai demande le plus de génie chez l’auteur, le plus d’intelligence et de vrai goût chez le public. Autant la comédie de caractèréest vivace, autant la comédie de genre est fugitive. (J. Janin.) Il Comédie de mœurs, Celle qui peint les mœurs d’une époque ou d’une classe d’individus, il Comédie d’intrigue, Celle qui base l’intérêt sur la complication des faits qui y sont représentés : Le mérite de la comédie d’intrigue est dans la Curiositéqu’elle excite, son écueil dans l’attention qu’elle exige. Le Mariage de Figaro est notre meilleure comédie d’intrigue, h Comédie de genre, Celle qui met en scène des habitudes, des moeurs, des ridicules de certaines classes, de Certaines coteries, de certaines professions ; co terme est une allusion à celui de tableaux de genre. Il Comédie épisodique ou à tiroir, Celle dont les scènes se succèdent sans être bien liées les unes aux autres ni à une action générale : Les Originaux de Fagan, le Mercure galant de Boursault sont des comédies épisodiques. Il Comédie larmoyante, Celle dans laquelle le pathétique domine le comique ; on préfère généralement aujourd’hui le nom de drame : La comédie larmoyante, à la honte de la nation, a succédé au seul vrai genre comique, porté à sa perfection par l’inimitable Molière. (Volt.) La comédie larmoyante fit à La Chaussée un grand parti dans le public, toujours avide de nouveautés. (Viennet.) [[ Comédie héroïque, Celle qui met en scène des rois, des princes et d’autres hauts personnages, il Comédie historique, Celle qui emprunter l’histoire ses principaux personnages, il Comédie pastorale, Celle qui se passe à la campagne et représente des amours de bergers et de bergères : La Sylvie de Méret et la Mélicerte de Molière sont des comédies pastorales. || Comédie-ballet, Celle dont chaque acte finit par des danses : Les < Amants magnifiques de Molière sont une co-. médiu-ballet. il Comédie-féerie, Pièce où l’on admet des interventions surnaturelles et un i étalage extraordinaire de magnificence et de variété dans les décors. On disait autrefois comédie à machines. Il Comédie à couplets ou à ariettes, Ancien nom des vaudevilles actuels. Il Haute comédie, Genre qui comprend la comédie de mœurs et la comédie de caractère : Le Tartufe et le Misanthrope sont les deux chefs-d’œuvre de la haute comédie. Se dit fig. d’une dissimulation profonde et bien déguisée ; Ceci est de la haute comédie, il Comédie ancienne, Dans l’histoire du théâtre grec, Celle où les personnages et même les masques dont s’affublaient les acteurs qui les jouaient représentaient des contemporains : L’ancienne comédie jouait sur la scène des hommes célèbres encore vivants. (Michelet.) Des succès fortunés du spectacle tragique Dans Athènes naquit la comédie antique.

Boileau.

Bientôt parut l’ancienne comédie, Elle fut libre, et parut si hardie Qu’une loi sage arrêta ses excès.

M.-J. Chésier.

Il Comédie moyenne, Celle qui succéda à la précédente, et dont les sujets étaient véritables, mais les noms supposés. Il Comédie nouvelle, Comédie grecque dont les sujets et les noms sont inventés, et où il n’y a de vrai que les caractères et les passions. C’est, à peu do chose près, la comédie de tous les peuples

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modernes : Ménandre fut nommé le prince de la mouvelle comédie des Grecs. (Acad.) Il Comédie italienne, Genre de pièce bouffonne d’origine italienne : La comédie italienne sur nos théâtres n’est qu’une bouffonnerie. (StEvrern.)

— Représentation d’une pièce du même genre, ou même d’un genre quelconque : Donner la comédie. Aller à la comédie. Louis XIV consultait Bossuet pour savoir s’il était permis à un chrétien d’alter à la comédie. « Il y a de fortes raisons contre, et de grands exemples pour, » répondit le prélat prudent.

Et jamais il ne fit si bon

Se trouver a la comédie.

La Fontaine.

Et j’ai maudit cent fois cette innocente envie Qui m’a pris à dîner de voir la comédie.

Molière.

Ainsi quand Richelieu revenait de Mahon, Partout sur son passage il eut la comédie.

Voltaire.

— Théâtre, bâtiment où l’on joue des comédies ou d’autres pièces : Être logé derrière la comédie. La rue de ÏAncienne-ÙoMÈmu. Il Ce sens a vieilli, il Comédie-Française, Nom que porta longtemps le théâtre appelé aujourd’hui Théâtre-Français, et qu’on lui donne encore quelquefois : La Comédie-Française a des retours inattendus de faveur et de vogue. (SteBeuve.)

— Troupe d’acteurs ; s’est dit plus particulièrement des acteurs attachés à l’ancien Théâtre-Français, et de ce théâtre lui-même : La Comédie-Française. Les acteurs de la Co 1 MÉDiE-/VaHpaise.

— Par ext. Action de ridiculiser : La médisance est la comédie des dévots. (Mn|e de Flahaut.) Il Fait ou ensemble de faits, d’actions ridicules ou grotesques : C’est une vraie comédie. Le monde est une comédie ; malgré l’intérêt que j’y prends, je m’en amuse et j’étudie les ridicules différents. (Favart.)

— Fig. Parade d’un sentiment qu’on n’éprouve pas ; feinte, dissimulation, hypocrisie : Ces démonstrations de dévouement ne sont qu’une comédie. Une infinité de monde pense que la vie des courtisans est une comédie perpétuelle. (La Rochef.)

Oh I que pour la punir de cette comédie Ne lui vois-je une vraie et longue maladie !

BOILKAU.

Jouer la comédie, Prendre part à la représentation d’une comédie ou d’une autre

pièce de théâtre : Dans les soirées de M. N..., on joue la comédie, il Fig. Afficher des sentiments que l’on n’éprouve pas : Il faut convenir qu’il est impossible de vivre dans le monde sans jouer de temps en temps la comédie. (Chanifort.) Les femmes ne sont pas plus dupes des comédies que jouent les hommes que des leurs. (Balz.)

Est-ce que nous jouons ici la comédie ?

Molière.

Donner la comédie, Jouer des pièces de théâtre. || Fig. Prêtera rire au public : Le fat est tout à la fois l’auteur et l’acteur de la comédie qu’il donne au public. (Sanial-Dnbay.) Ungrandvicaire, ayant fait un mandement sur un prétendu miracle du diacre Paris, en adressa un exemplaire à Voltaire, qui lui envoya Aizire, avec ces quatre vers :

Vous m’envoyez un mandement,

Recevez une tragédie,

Afin que mutuellement

Nous nous donnions ta comédie.

Voltaire.

—r Se donner lu comédie, Se procurer l’amusement, la distraction : Donnez-vous la comédie, quelque jour, de parler de vous-même à des gens de simple connaissance, et vous verres l’indifférence succéder à l’intérêt wué. (Balz.)

Secret de la comédie, Chose dont on veut faire un secret, quoiqu’elle soit connue de tout le monde, comme les faits que les acteurs sont censés ignorer et que tous les specta- ! teurs connaissent : Cela ne dura pas long- j temps sans devenir le secret de la comédie. ’ (St-Simon.)

Personnage de comédie, Celui dont les belles apparences extérieures n’ont rien de réel :

Je doutais qu’il pût être une âme assez hardie Pour ériger Carlos en roi de comédie.

Corneille.

Portier de la comédie, Ancien employé des théâtres, qui recevait à la porte l’argent de ceux qui entraient. Il Celui qui n’ouvre pas sans se faire payer :

Ma foi, j’étais un franc porlter de comédie, On avait beau prier et m’eter son’chapeau, On n’entrait point chez nous sans graisser le marteau.

Point d’argent, point de suisse

Racine.

— Epltbètes. Gaie, joyeuse, amusante, divertissante, bouffonne, désopilante, belle,

admirable, charmante, morale, utile, instructive, humble, décente, libre, risquée, indécente, immorale, cynique, froide, languissante, larmoyante, attendrissante.

— Antonymes. Drame, mélodrame, tragédie.

— Iconog. Thaliûj Muse et personnification de la comédie, était représentée par les ar COME

tistes de l’antiquité sous les traits d’une jeune tille souriante, couronnée de lierre, chaussée de brodequins, et tenant un masque scénique à la main (v. Thalie). On voit dans la Salle ronde du musée Pio-Clémentin, au Vatican, un hermès colossal, provenant de la villa Adriana (Tivoli), ouvrage d’une belle conservation, que le catalogue désigne comme une figure symbolique de la Comédie : la tête, couronnée de pampres, a une expression de gaieté malicieuse. Les artistes modernes ne se sont çiière écartés des données de l’art antique. Le peintre Nicolas Vleughel a représenté la Comédie sous la figure- d’une femme assise, tenant d’une main un musqué, et s’appuyant de l’autre sur les ouvrages de Ménandre et d’Aristophane. Un bas-relief en pierre, d’Kdme Dumont, dans la cour du Louvre, nous la montre couronnée de lierre, et ayant pour attributs le masque satirique, un bâton pastoral et un tambourin. Dans une autre sculpture du Louvre, exécutée par Matte, elle tient un miroir, emblème de sa fidélité à reproduire les mœurs. Nous donnons ci-après la description de la Comédie sérieuse et de la Comédie enjouée, figures de marbre dont Pradier a décoré les angles du piédestal de la statue de Molière, à la fontaine qui porte le nom de co grand homme, à Paris. Il a été fait une foule d’autres figures de la Comédie ; pour ne parler que de celles qui sont d’une date récente, nous citerons une statue en marbre-exécutée par M. Duret pour le Théâtre-Français, et qui a été exposée au Salon de 1857 ; un basrelief de l’escalier d’honneur du même théâtre, par M. Leharivel-Durocher ; une statue en plâtre de M, Scheenewerk (Salon de 1804) j un bas-relief exécuté par M. Jules Girard au nouvel Opéra (1807) ; une statue (la Muse comique) sculptée en pierre par M. Chatrousse pour le théâtre du Châtelet, etc.

— Encycl. La comédie, la haute comédie, la bonne, la seule vraie, a pour objet la peinture des défauts, des ridicules, des vices. Son but est de flageller ces vices, de censurer ces défauts, de railler ces ridicules. Elle est une école de mœurs, et la meilleure. Mais, avant qu’on en arrive a se servir d’elle comme enseignement, la comédie devra passer par diverses et nombreuses phases ; jusqu’à Ménandre, on peut dire avec Perrault :

La gaillarde Thalie incessamment folâtre Et de propos bouffons réjouit le théâtre.

On peut la représenter chaussée de brodequins, couronnée de lierre ettenant.à la main un masque riant. Rire, en effet, railler, se moquer de son prochain, le bafouer même sans retenue, sans pudeur, sans vergogne, et cela dans le seul but de bafouer, tel a été le principe de la comédie, son commencement, la cause et la façon dont elle est née.

Donc, il faudrait aller chercher bien loin son origine, car la satire est dans la nature humaine ; dès que trois hommes se Sont rencontrés, deux d entre eux ont dû rira du troisième, exercer leur malice à son endroit. Nous ne remonterons pas si haut.

On a dit que l’histoire de la comédie, aussi bien que celle de la tragédie, devrait commencer à Homère. Le grand poëte, en effet, a écrit de la bonne et vraie comédie ; dans quelques-uns de ses portraits, ceux de Theisite, par.exemple, et de Margites, et, en faisant parler alternativement chacun do ses héros, il a pu donner l’idée du dialogue. Quoi qu’il en soit, les premiers auteurs comiques ont peu profité d’Homère, et, depuis l’immortel poëte jusqu’à eux, un temps bien long s’est écoulé.

Toutes les branches de la poésie avaient porté des fleurs, des fleurs dont le parfum, après tant de siècles, enivre encore ; déjà avaient brillé Homère et Tyrtée, Alcée et Snpho, Corinne et Pindare, Callimaque et Archiloque, et cependant le théâtre n’existait pas.

Nous accorderons à Thespis, comme l’ont fait tous les critiques, l’honneur d’avoir donné naissance à la comédie. Thespif, cependant, ne fut qu’un bateleur au costume bigarré, un farceur, un grimacier, amusant les badauds à la façon de Tabarin ou de Galimette, son gendre, bouffon à l’hôtel de Bourgogne. Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie, Promena par les bourgs cette heureuse folie. Et, d’acteurs mal ornés chargeant un tombereau, Amusa les passants d’un spectacle nouveau,

a dit Boileau traduisant Horace. Seulement, celui qu’on est convenu d’appeler le législateur du Parnasse a oublié un mot de la citation qu’il emprunte à Horace, le mot dicitur (on dit). Et, en 1 effet, Thespis, duquel on a dit qu’il avait fait des tragédies avant Eschyle, qu’il avait inventé les chœurs, toutes choses qui sont peu en harmonie avec les mascarades, les bouffonneries dont on le gratifie, Thespis est une figure peu ou même point historique. Aussi peu connus sont Susarion, Epicharme, Timocréon,

Les auteurs comiques que nous venons de nommer composent cependant la pléiade de laquelle est formé le premier âge de la comédie, qui en compte trois, d’après les canons d’Alexandrie : l’âge de fer, Vàge d’argent, l’âge d’or, tout au rebours de l’humanité.

En ce premier âge, en cette première période, la comédie est effrontée, insolente, sans vergogne ; elle use et abuse de ce gouvernement démocratique d’Athènes qui autorisait la

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liberté illimitée des discussions, les attaques, les dénonciations, et elle discute, elle attaque, elle dénonce ; rien n’est à l’abri de ses coups, ni les mœurs, ni la religion, ni la politique ; personne n’est épargné, ni ceux qui sont grands par leur fortune, ni ceux qui sont grands par leur renommée, par leur pouvoir, par leur vertu ; elle les nomme et les condamne a l’exil ou à la ciguë.

Enfin le gouvernement s’émeut d’une telle licence, d’une telle audace, et défend aux auteurs de nommer ceux qu’ils attachaient à leur pilori.

De cette défense date le second âge, l’âge d’argent de la comédie ; il fut illustré parCratinus, Eupolis et Aristophane. Tous les trois avaient fait partie de la comédie ancienne ; mais nous aimons mieux les retrouver ici, Aristophane surtout, qui, malgré toutes les accusations portées contre lui, et dont quelques-unes sont justes ; malgré quelques, détails obscènes dont il ne faut pas se souvenir, fut un vrai et grand comédien, un poète, ennemi des agitateurs, ennemi des sophistes, ami du repos de son pays. Ainsi, nous comprendrons Platon lorsqu’il dit : « Les gi âces, cherchant un sanctuaire indestructible, trouvèrent l’esprit d’Aristophane. » Quintilien disait, en parlant d’Aristophane, que, par l’éclat de son nom et la beauté de ses ouvrages, il effaça la gloire de tous ceux qui avaient écrit dans le même genre, et saint Chrysostome gardait toujours sous son chevet les œuvres du comique grec.

Mais pourquoi nous attarder devant Aristophane ? Notre Dictionnaire a donné de lui déjà une longue et consciencieuse étude. Revenons à la comédie, dont on venait de réprimer la licence.

Alors ainsi qu’aujourd’hui, à Athènes comme à Paris, le public se montrait friand de tout ce qui pouvait être de nature à ridiculiser les gens jouissant d’une certaine popularité ; les auteurs s’ingénièrent à se soustraire à l’interdit prononcé, et ils imaginèrent de donner aux acteurs des masques offrant la parfaite ressemblance du visage des gens qui servaient de but à leurs railleries, et, de cette façon, il fut aussi facile de les reconnaître que si on les avait désignés par leur nom ; en effet, le masque dont l’acteur se couvrait la tête était lo portrait de celui qu’il faisait revivre sur la scène, le portrait rendu bizarre, grotesque, ridicule, sa charge en un mot. Cette subtilité déplut aux intéressés, et les magistrats se virent dans la nécessité de défendre le masque, qui resta néanmoins comme le symbole de la comédie, et fut la marque distinctive de la comédie moyenne, dans laquelle, laissant do côté la ressemblance physique, l’auteur s’attacha à faire reconnaître le personnage qu’il voulait représenter par la peinture de ses mœurs et de son caractère, laissant chacun maître de placer un nom sur le portrait, s’il le trouvait ressemblant.

Le troisième âge, l’âge d’or de la comédie grecque, fut illustré par les successeurs d’Aristophane : Eubolus, Antiphane, Apollodore ; par Diphile et surtout par Ménandre (342-290). Ménandre substitua à la crudité de l’expression une parole polie, élégante, attique ; il s’interdit les personnalités, se ferma la vie privée et n’exploita que le cœur humain, l’éternel et vrai domaine de la comédie.

Ménandre avait composé quatre-vingts comédies, et voulez-vous savoir par qui ce trésor nous a été ravi, celui-là et bien d’autres du même genre ? Voici comment Halcynonius, savant du xvr= siècle, fait parler Jean do Médicis, qui fut plus tard Léon X : » J’ai entendu dire dans mon enfance à Démétrius Chalcondyle, homme très-savant dans les lettres grecques, que des prêtres chrétiens avaient eu assez de crédit auprès des empereurs byzantins pour obtenir d eux la faveur de brûler en entier un grand nombre d’ouvrages des anciens poètes grecs, qui contenaient des peintures amoureuses et des sentiments licencieux, et qu’ainsi furent détruits les comiques Ménandre, Diphile, Apollodore, Philémon, Alexis, et les lyriques Sapho, Erinne, Anacréon, Mimnerme, Bion, Alcman, Alcée. On les remplaça par les poèmes de notre Grégoire de Nazianze, qui, s ils inspirent des sentiments religieux, ne peuvent pas cependant prétendre à une élégance aussi attique. » Si ces comédies du créateur du genre chez les Grecs ne nous sont point parvenues, — et disons ici, affirmons sans hésitation que c’est la plus grande perte, le plus beau fleuron égaré delà couronne du génie antique, — les imitations romaines, jointes aux fragments nombreux et assez étendus que nous possédons encore, suffisent pour nous donner une idée assez claire de l’ensemble et des détails d’une pièce de Ménandre, et nous prouvent que ce poëte était très-difficile pour l’invention de la fable, du nœud et du dénoûment dramatique, qu’il regardait comme la chose capitale. Nous pouvons encore affirmer que dans toutes ses comédies régnait le même ton, celui de la conversation polie ; et qu’au moyen de ses constructions brisées il donnait plus de liberté et de vivacité au débit des acteurs. Ménandre composa ses pièces vers l’an 300 avant J.-C., à l’époque ou l’art, devenu plus sévère et plus régulier, exigeait des poètes comiques plus d’imagination, plus d’égards pour les convenances, plus de dignité, plus de goût, de décence et de vérité. Néanmoins, comme il était passionné pour les