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nier siècle, et qui consistait en un buffet contenant divers instruments dont on jouait à l’aide d’un clavier.

— Moll. Coquille du genre des vis. il Clocher chinois, Nom vulgaire de la cérite obélisque.

— Encycl. Divers monuments prouvent que les architectes chrétiens bâtissaient déjà des clochers au vue siècle et que des constructions de ce genre existaient en assez grand nombre au siècle suivant. Les cloches dont on faisait usage à cette époque n’étaient pas d’ailleurs d un volume assez considérable pour exiger l’érection de cîoefters bien vastes : on les suspendait d’ordinaire dans de petites tourelles élevées à côté des églises ou au-dessus des combles, ou dans des arcatures ménagées au sommet des pignons. Toutefois, le plan de l’abbatiale de Saint-Gall, dessiné en 820, indique l’existence de deux tours ou clochers, de forme cylindrique, qui dominaient toutes les autres parties du monastère et dont les étageâ supérieurs contenaient des chapelles dédiées aux archanges saint Michel et saint Gabriel : des escaliers tournants ou en vis conduisaient au sommet de ces tours. Il est probable, comme l’a pensé Albert Lenoir, que la forme cylindrique fut généralement adoptée à l’origine, pour la construction des clochers ; mais, dès le ixe siècle, la forme quadrangulaire prévalut. La plupart des clochers élevés à Rome, à cette époque et pendant les siècles suivants, sont des constructions carrées, divisées en nombreux étages par d’étroites corniches ornées de modifions : des fenêtres en arcades, que décorent souvent des colonnettes de marbre blanc, sont pratiquées à chacun de ces étages et donnent a l’ensemble de l’édifice une extrême légèreté. Parmi ceux de ces clochers qui se distinguent le plus par la hardiesse de leurs proportions, nous citerons les clochers de la basilique des Saints-Jean-et-Paul et de l’église de Sainte-Pudentienne. Les basiliques latines, établies avec des murailles peu épaisses, des colonnes d’un faible diamètre et des plafonds en bois, n’auraient pas pu supporter des clochers énormes e.omme ceux qu’élevèrent les constructeurs des périodes romane et ogivale. Ce fut a l’atrium qu’on plaça généralement les tours destinées à contenir les cloches, soit aux angles de cette cour sacrée, comme à l’église Saint-Laurent de Vérone, Soit Sur la porte qui y donnait accès, comme a l’église du monastère des Quatre-Saints-Couronnés, à Rome. Souvent même les clochers furent construits isolément, tantôt devant la porte principale de l’église, comme à Sainte-Marie de Toscanella, tantôt près des faces latérales, comme à Saint-Laurent-hors-les-murs, à Rome, et à Saiut-Pierre de Toscanella, quelquefois même derrière l’abside, comme à Torcello, près de Venise. Il est a remarquer, d’ailleurs, que les clochers cités ici sont d’une date postérieure à celle des églises qu’ils accompagnent. Lorsqu’on voulut ériger des tours sur les basiliques elles-mêmes, on dut les consolider en murant une ou plusieurs travées de l’intérieur, comme à Saint-Georges au Vélabre ; mais les clochers établis dans ces dernières conditions sont rares en Italie ; les clochers isolés y sont au contraire très-nombreux ; on les désigne ordinairement sous le nom de campaniles.

L’usage des cloches et des clochers paraît s’être répandu en Orient plus tard qu’en Occident. Les premiers clochers byzantins furent probablement cylindriques, comme ceux de l’Italie ; mais, bientôt aussi, la forme quadrangulaire prévalut en Orient, avec cette

différencé seulement que l’étage supérieur resta parfois circulaire et fut couronné d’une voûte hémisphérique. Les monastères du mont Athos possèdent des clochers qui, pour la plupart, sont quadrangulaires et décorés de plusieurs rangs de fenêtres, comme ceux des églises de Rome. Lorsque, à la suite des croisades, l’architecture byzantine se fut modifiée sous l’influence occidentale, on vit s’é•ever eu Grèce des clochers semblables à ceux qu’imaginèrent les constructeurs romans et gothiques. Le clocher de l’église de Samari, en Morée, est un clocher roman à quatre pignons ; celui de l’église de la Vierge, à Mistra, est une belle construction ogivale. On rencontre . ainsi en Grèce un assez grand nombre d’églises ayant leurs cloches placées dans des arcatures ménagées au sommet des pignons : Albert Lenoir donne à ces sortes de constructions le nom de clochers-arcades.

. Les plus anciens clochers construits en France présentent des dispositions analogues à celles qui furent adoptées en Italie et chez les Byzantins. Le clocher de l’église de Saint-Front, de Périgueux, qui date des premières années du xie siècle, s’élève en dehors du

{>lan de cette église, sur les restes d’une basiique latine du vie ou du vue siècle. Il se compose de deux étages carrés en retraite l’un au-dessus de l’autre, et surmontés d’une calotte conique portée par une colonnade circufaire. Chaque étage est percé de deux rangs de fenêtres séparées par des colonnes et des pilastres engagés ; ces fenêtres sont toutes cintrées, fa. l’exception de celles de la base du clocher, qui sont carrées. Le clocher de Saint-Front est d’une hardiesse très-grande popr l’époque où il fut élevé, et cependant il accuse la plus grande inexpérience de ce genre de construction. Les deux étages carrés sont superposés de manière & produire la plus, dan-.

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gereux porte à-faux qu’il soit possible d’imaginer, et l’on peut s étonner qu’une pareille tour ait pu se maintenir debout pendant tant de siècles. On retrouve dans le sud-ouest de la France et jusque vers la Loire un grand nombre de clochers auxquels le clocher de Saint-Front parait avoir servi de type ; mais, à la même époque et dans la même contrée, on construisit des clochers d’une forme assez différente, dont le clocher de l’église abbatiale de Brantôme, près de Périgueux, peut être regardé comme le type le plus remarquable. Ce clocher, bâti isolément sur un roc qui longe l’église et qui s’élève de. 18 m. environ au-dessus du pavé de la nef, renferme à son étage inférieur une grande salle à voûte elliptique, fermée d’un côté par un gros mur

adossé au roc, et percée sur les trois autres faces de six arcs épais, dont cinq ont été bouchés postérieurement a l’époque de la construction. L’étage supérieur comprend une

seconde salle fermée comme la première du côté du roc, et ajourée sur les trois autres faces ; cette salle n’était pas voûtée, mais recevait un plancher qui portait le beffroi en charpente destiné à soutenir les cloches (v. bkffroi). La partie haute du clocher qui contenait ce beffroi se compose d’étages superposés en retraite avec beaucoup d’habileté, et épaulés extérieurement par de grands pignons pleins et de petits contre-forts d’angles. La pyramide à base carrée qui couronne la tour est bâtie en petits moellons, bien que le clocher soit tout entier construit en pierres de taille d’appareil. « Tout indique dans la tour de Brantôme une origine latine, dit M. Viollet-le-Duc : le système de construction, l’appareil, la forme des arcs ; c’est un art complet développé au point de vue de la construction. Il y a même, dans les proportions de cet édifice, une certaine recherche qui appartient à des artistes consommés ; les vides, les saillies et les pleins sont adroitement répartis. La rudesse de la partie inférieure, qui rappelle les constructions romaines, s’allié par des transitions heureuses à la légèreté de l’ordonnance supérieure. » Il faut rapporter & la même école la construction du beau clocher de Saint-Léonard (Haute-Vienne), qui date, comme celui de Brantôme, du milieu du xie siècle. L’étage supérieur de ce clocher est construit sur un plan octogonal, de manière que quatre de ses angles portent sur les milieux des quatre faces de la tour carrée que forment les étages inférieurs. Le clocher de l’église d’Uzerches (Corrèze), postérieur de quelques années au clocher de Saint-Léonard, présente aussi un étage supérieur octogonal ; mais quatre des faces de cet étage sont parallèles à celles de la base carrée ; les quatre autres sont portées par des encorbellements intérieurs. Le clocher de la cathédrale de Limoges et celui de la cathédrale du Puy-en-Velay, bâtis dans la seconde moitié du xic siècle, présentent un système de construction qui peut être considéré comme un développement de celui dont Brantôme offre un type primordial. Leurs étages carrés forment des retraites successives dont la plus élevée porte de fond sur quatre piles isolées au rez-de-chaussée.

Les clochers que nous venons de citer, comme tous ceux qui furent construits dans de grandes dimensions, au xie siècle, n’étaient pas seulement destinés à loger des cloches ; ils servaient encore, ils servaient surtout à signaler de loin l’église et a, marquer la puissauce, la richesse des chapitres, des abbayes ou des communes qui les avaient fait construire. « Au x«e siècle, dit M. Viollet-le-Duc, la féodalité était constituée ; elle élevait des châteaux fortifiés sur ses domaines ; ces châteaux possédaient tous un donjon, une tour plus élevée que le reste des bâtiments et commandant les dehors. Or les églises cathédrales et abbatiales étaient en possession des mêmes droits que les seigneurs laïques ; elles adoptèrent les mêmes signes visibles, et voulurent avoir des donjons religieux, comme les châteaux avaient leurs donjons militaires. Du moment que l’érection d’un clocher devenait une questioji d’umour-propre pour les monastères, les chapitres ou les communes, c’était à qui- construirait la tour la plus élevée, la plus riche, la plus imposante. Bientôt on ne se contenta pas d’un seul clocher ; les églises en eurent deux, trois, cinq, sept et jusqu’à neuf, et c’est principalement dans les contrées où la féodalité séculière élève ses châteaux les plus formidables que les cathédrales, les abbayes, et plus tard les paroisses, construisent des.clochers magnifiques et nombreux... Il est certain que les architectes qui élevèrent ces clochers cherchèrent, pour les couronner, des dispositions surprenantes et de nature à exciter l’admiration ou l’étonnement. Il n’était pas besoin, pour placer des cloches, de ces combinaisons étudiées ; on voulait, avant tout, attirer l’attention des populations en érigeant, à côté de l’église ou sur ses constructions inférieures, un monument qui fût

aperçu de loin, et qui, par sa forme, contrastât avec les tours des châteaux ou des palais, en rivalisant de hauteur avec elles.«Ajoutons avec M. Viollet-ie-Due que, dès le xtc siècle, les clochers des églises cathédrales servaient souvent de beffroi pour les villes (v. bkffroi) : la cité était dès lors aussi intéressée que le ebapitre à marquer sa richesse et sa puissance pair des constructions hardies dominant les habitations privées et les monuments publics.

A. partit du xie siècle, toutes les églises,

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grandes ou petites, cathédrales, paroissiales ou abbatiales, sont donc pourvues de clochers ; mais toutes n’offrent pas les mêmes dispositions quant à la forme et à la place affectées à ces constructions. Dans le principe, les architfictes romans n’élevèrent le plus souvent qu’un seul clocher sur la face occidentale des églises, et ils le placèrent tantôt à l’un des angles ou devant la porte et en saillie, de manière à former un porche (églises de Saint-Benoît-sur-Loire, de Poissy, de Créteil, de

Saint-Martin de Tours, de Saint-Savin en Poitou, etc.), tantôt sur la porte elle-même et au même plan que la façade, pour former un vestibule intérieur (églises d’Aiuay, de Moissac, etc.). Quand l’art roman fut complètement développé, d’immenses tours carrées s’élevèrent à chacun des angles de la façade, assez éloignées l’une de l’uutre pour laisser voir le pignon ou fronton supérieur, la rose ou les fenêtres cintrées qui éclairaient la nef principale. Souvent, un grand porche saillant fut établi entre les bases de ces tours, comme à l’église abbatiale de Jumiéges ; mais, plus fréquemment encore, les clochers furent bâtis au même plan que le porche et furent percés a leur base de portes latérales, dont les sculptures formaient, avec celles de la porte principale, un bel ensemble décoratif. Des tours semblables furent établies aussi dans quelques églises, aux angles des façades latérales des transsepts. Les constructeurs romans imaginèrent enfin d’élever des clochers sur le milieu de la croisée, au point d’intersection des transsepts et de la nef, et ce fut à ces tours centrales qu’ils donnèrent les développements les plus considérables. Nous allons faire connaître les modifications principales que subirent, suivant-les pays et suivant les époques, ces divers genres de clochers, en commençant par les clochers centrais.

Gomme nous l’avons dit, le clocher de Saint-Front fut un des types que suivirent de préférence les architectes du xie et du xn.e siècle, dans plusieurs provinces de l’ouest : le Périgord, la Saintonge, l’Angoumois et le Poitou ; mais les imitateurs, dit M. Viollet-le-Duc, évitèrent les vices de construction que l’on remarque dans ce clocher, et qui avaient nécessité le bouchement de presque tous ses ujours ; ils cherchèrent, au contraire, adonner à leurs clochers une grande solidité, au moyen d’angles puissants en maçonnerie et de combinaisons ingénieuses. Entre autres exemples, nous citerons le clocher central de l’abbaye des’Dames, à Saintes, qui date de ta fin du xie siècle ; il se compose d’un étage carré, percé sur chaque façade de trois arcades soutenues par des piles formées de colonnes engagées ; au-dessus s’élève un étage circulaire qui porte sur une voûte hémisphérique et qui est éclairé par douze arcades séparées par de petits contre-forts cylindriques, et divisées chacune par une colonne. Ce second étage est coiffé d’un toit conique légèrement convexe, couvert d’écaillés retournées. Des pinacles s’élèvent aux quatre angles de la base carrée. Dans quelques provinces du centre, en Auvergne, dans le Languedoc, dans le Bourbonnais et jusqu’en Bourgogne, on voit des clochers centrais du Xie, du Xlie et du xm<s siècle, qui portent sur des coupoles et arrivent brusquement au plan octogone à deux ou trois étages, couronnés par une pyramide à huit pans. Tels sont les clochers des églises d’Issoire, de Notre-Dame-du-Port à Clermont, de Saint-Nectaire (Puy-de-Dôme), qui ont été rétablis dernièrement par M. Mallay, architecte, d’après les plans primitifs ; tels sont encore les clochers des églises d’Obasine (Corrèze), de Saint-Sernin de Toulouse (xme siècle), de Cogniat (Allier), de Paray-le-Monial (Saône-et-Loire), etc.

Dans les provinces françaises de l’fïst, des constructeurs romans élevèrent, sur un grand nombre de leurs églises, des clochers centrais en pierre, tantôt carrés, sur les bords du Rhône supérieur, dans la Haute-Saône, la Haute-Marne, tantôt octogones, en se rapprochant du Rhin. Le clocher de l’église d’Ainay, à Lyon, construit du xi" au-xu<> siècle, a une forme Carrée et trapue. Sa base, bâtie en moellons avec angles en pierre, porte sur quatre arcs doubleaux et contient une coupole ; elle est percée d’une petite baie seulement sur chacune de ses faces. Au-dessus est un étage, construit en pierre et éclairé par des arcades que divisent des colonnettes. La corniche qui termine cet étage est formée d’une tablette portée par des corbeaux ; elle soutient un toit plat en charpente recouvert de tuiles. Les clochers de la Haute-Saône et de la Haute-Marne sont moins écrasés ; ils conservent le plan carré jusqu’au couronnement ; mais la flèche, construite en pierre, est souvent octogonale et accompagnée à sa base de pignons et de pinacles de l’effet le plus pittoresque. Un des clochers les plus anciens et les plus curieux en ce genre est le clocher de la petite église d’isomes (Haute-Marne), qui date de la seconde moitié du xiie siècle. M. Viollet-le-Duc, qui nous sert de guide dans cette étude, pense que ce fut sous l’influence de l’architecture rhénane que les constructeurs de la Haute-Saône et de la Haute-Marne adoptèrent parfois le plan octogone pour les flèches de leurs clochers. Ce plan avait prévalu, en effet, dans les provinces rhénanes, dès le xie siècle, et y avait été suivi pour la construction des clochers tout entiers. Le clocher central de l’église de Guebwiller et celui.de l’église Sainte-Foi à Schlestadt sont d’intéressants

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spécimens de cette famille de clochers à huit pans.

Parmi les églises construites au xne siècle, dans les provinces du domaine royal de France, plusieurs reçurent des tours centrales octogones : l’église de Poissy est de ce nombre ; mais, dès la fin de ce même siècle, les architectes de l’Ile-de-France adoptèrent le plan carré pour la construction du corps des clochers et conservèrent seulement la forme octogonale pour les flèches. Le clocher de Limay, près de Mantes, est un des plus anciens modèles qui se soient conservés de cette sorte de constructions ; celui de Vemouillet, qui remonte aux dernières années du xn« siècle, se distingue entre tous par sa légèreté et sa hardiesse : il se compose d’une base carrée, sans ouverture, d’un étage percé de deux baies sur chaque face et renforcé aux angles par des colonnes engagées formant contreforts, et d’une flèche octogone qu’entourent quatre pinacles portés par des colonnes et quatre grandes lucarnes surmontées de gables. « Les proportions des différentes parties du clocher de Vemouillet, dit M, Viollet-le-Duc, sont étudiées par un véritable artiste et contrastent avec les étages divisés en zones égales des clochers de l’Est, avec les couronnements écrasés de ceux des provinces de

l’Ouest. Les détails des moulures et de l’ornementation, bien exécutés, fins et fermes à la fois, sont habilement calculés pour la place

u’ils occupent ; si bien que ce clocher, qui est une dimension très-exiguë, parait grand, et grandit le très-petit édifice qu’il surmonte au lieu de l’écraser. On reconnaît là, enfin, l’œuvre d’artistes consommés, de constructeurs savants et habiles. Un clocher de cette époque, bâti sur la croisée d’une cathédrale et suivanl ces données si heureuses, devait être un monument de la plus grande beauté ; malheureusement nous n’en possédons pas un seul en France. Les incendies et la main des hommes, plus que le temps, les ont tous détruits, et nous ne trouvons plus sur nos grands édifices religieux que les souches et les débris de ces belles constructions. La cathédrale de Coutances seule a conservé son clocher central du xme siècle ; encore n’est-il pas complet : sa flèche en pierre fait défaut. Quant à son style, il appartient a l’architecture normande et s’éloigne beaucoup de l’architecture française. « Les grandes tours centrales des églises de Normandie n’ont pas, à proprement parler, le caractère de véritables clochers ; elles sont bien plutôt des lanternes destinées a donner de la lumière et de l’élévation au centre de la croisée. Celle qui couronne l’église de Saint-Georges de Bocherville et qui est la plus complète peut-être de toutes, ne possède qu’un étage supérieur de 4 m. de haut pour contenir les cloches ; la partie inférieure forme lanterne. La Normandie fut d’ailleurs, de toutes les provinces françaises, celle qui persista le plus longtemps à élever des clochers gigantesques sur la croisée de ses églises. Le magnifique clocher central de l’église Saint-Ouen, de Rouen, date du xvie siècle : sa base carrée est percée sur chaque face de deux grandes fenêtres surmontées de pignons élégamment découpés ; la partie supérieure, de forme octogone, est accompagnée de quatre, jolies tourelles qui se rattachent aux angles de la base ; une couronne, travaillée à jour et d’un effet incomparable, la surmonte. Dans l’Ile-de-France, la Picardie et la Champagne, on renonça, dès la fin du xme siècle, a surmonter tes croisées des églises par des clochers de pierre ; on se borna, le plus souvent, à élever à cette place des flèches en charpente recouvertes de plomb. V. flicches.

Les clochers contigus aux façades ou construits sur elles offrent plus de variétés encore que les clochers centrais. Ils servaient, à l’origine, de défense et durent être naturellement élevés devant la porte de l’église ou audessus. Parmi les plus anciennes constructions de ce genre, il faut citer le clocher bâti sur le porche occidental de l’église abbatiale de Saint-Benoit-sur-Loire : ce clocher est porté par huit piLes extérieures et quatre pites intérieures, disposées en quinconce régulier, et s’appuie sur le mur-pignon de la nef ; il n’a qu’un étage percé en façade de trois fenêtres romanes, correspondant aux trois entrées du porche ; mais, suivant l’opinion de M. ViolUt-Je-Due, les quatre piles intérieures étaient destinées à porter.un beffroi à jour, contenant les cloches. Le clocher de Lesterps (Charente) présente, au rez-de-chaussée, à peu près la même disposition que celui de Saint-Benoît. Deux étages supérieurs, construits en retraite l’un sur 1 autre, contiennent de belles salles voûtées à plein cintre ; un troisième étage, dont on distingue l’amorce, n’a pas été achevé ou a été détruit ; une flèche couronnait probablement cet étage et donnait au clocher des proportions imposantes. Dans l’Ile-de-France et dans les provinces environnantes, les clochers-porches de l’époque romane n’ont pas une importance égale a ceux des provinces de l’Ouest et du Centre : on peut en juger par ce qui reste du vieux clocher de Saint-Germain-des-Prés à Paris et de celui de la collégiale de Poissy, et par le clocher de l’église de Morienval (Oise). Mais, pendant la période ogivale, et dès le milieu du xne siècle, ces sortes de constructions prennent un développement extraordinaire et deviennent un des plus beaux ornements des églises ; au lieu de s’élever sur les porches, elles prennent place aux angles des façades, et, par un besoin de