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Charivari (i.b), comédie de Dancourt, en un llcte et en prose, avec divertissement, jouée au Théâtre-Français, en 1607. il s’agit d’une vieille, qui, retirée a la campagne, se propose d’épouser son jardinier ; elle refuse d’unir Angélique et Marianne, ses deux filles, à Eraste et àClitandre. Ceux-ci, déguisés en paysans, prennent, avec l’oncle de ces demoiselles, des mesures tendant à faire consentir leur mère a ce double mariage. Celui qu’elle voulait contracter en secret, et qui se trouve découvert, la met dans une sorte de nécessité de souscrire à tout. Le jardinier lui-même, trompé par leurs habits, est charmé d’avoir pour gendres des hommes de sa condition, et hâte la signature des deux contrats. C’est au divertissement qui le suit, et non à, l’intrigue, que es petit ouvrage doit son titre de Charivari.

CHARIVARIQOE adj. (cha-ri-va-ri-kerad. charivari). Néol. Qui tient du charivari ; bruyant, tumultueux. : Enfin, ce repas chariVaric.uk s’acheva. (P. Kéval) II tempête, il crie, U hurte, il effonlre (es armoires, casse bras et jamoes aux fauteuils, et se livre aux tintamarres les plus chaîîivakiques. (Th. Gaut.)

— Fig. Qui aime le bruit, J’éolat tapageur, la contradiction bruyante : M. About excelle dans le genre Que j’oserais appeler cijakivariqce. (E. Scherer.)

CHARIVARISÉ, ÉE (chu-l-i-v i-ri-zé) part, passé du v. Charivariser. À qui l’on a fait un charivari ; Les ma :*.és furent charivarisks trois jours durant.

CHARIVARISER v. a. ou tr. (oha-ri-vari-zé —rad. charivari). Néol. Donner un charivari : On l’a joliment cHarivarisé. // faut charivariser cette noce.’fl On a dit aussi CHahivarier :

— ïntransitiv. Faire un charivari, un grand tap»ge : On A assez cijarivarisé comme cela.

CHARIVARISEUR, ÏCSE s. (ûha-ri-va-rizeur, eu-ze — rad. charivariser). Personne qui charivarise, qui prend part à un charivari, qui donne un charivari, il On a dit aussi

CIIARIVARISTK et CHA *tWJOUEUR.

CHAIUZl ou AL HA II 17.1 (Jehuda ben Salotnon bon), rabbin espagnol, né à Xérès, mort en 1835. Il étudia la poésie arabe, dont la sienne propre conserva toujours l’empreinte, traduisit en hébreu les Séances du poëte Hariri, et composa lui-même en prose rimée un ouvrage analogue : le Taklcemoni, où il donne le tableau de la vie et des mœurs des juifs contemporains. Cet ouvrage a été imprimé à, Constantinople en 1578, et à, -Amsterdam «if 1729.

CHARKE (Charlotte), actrice anglaiseyinorte en 1760. Elle était fille du poète Colley Cibber, qui lui fit donner une éducation-toute vi-rile. Charlotte aimait l’escrime, la chasse, la lutte, etc., et excellait dans tous Içs exercices du corps. Elle épousa un nommé Charke, à la fois musicien, acteur et dansgur, dont elle ne tarda pas à se séparer, et eile entra alors au théâtre. Elle devint une des meilleures actrices de Londres ; mais son humeur bouillante et difficile amena une rupture entre elle et le directeur de Drury-Laiie. Elle s’engagea successivement dans diverses troupes ambulantes, et finit par mourir dans une profonde misère. Eile a laissé des mémoires sous le titre de : Narrative of tàe life ofmiss Charlotte Charke (Londres, 1785).

CHA.KKOW, ville de Russie. V. Kiiarkow.

CIIARLAS (Antoine), théologien français, natif de Couserans, mort à Itoine en 1COS. II fut supérieur du séiniuMre de Pamicrs et se signala par son zèle a défendre la cause de levêque de cette ville, ;«n procès avec la cour au sujet de la régale, vit ses écrits condamnés au feu par le parlement de Toulouse et s’enfuit à Home pour év^er d’être emprisonné. Ses principaux ouvrages sont : Jraclatus de libertatibus Ecctesix Gallicanœ (1G64), et Causa régaliœ penilus exptieala (1685).

CHARLATAN, ANE (char-la-tan, a-ne — ital. ciarlatano ; de ciarlare, babiller ; ou, selon Ménage, de circulatanus, pour circulator, qui circule, qui va de ville en ville). Personne qui vend des drogues sur les places et dans les lieux publics, qui débite ordinairement sa marchandise avec un grand flux de paroles emphatiques : Remède de charlatan. La témérité des charlatans et leurs tristes succès, qui en sont les suites, font valoir la médecine et les médecins : si ceux-ci laissent mourir, les autres tuent. (La Bruy.) Il n’appartient qu’à un charlatan de promettre la guérison d’une maladie incurablet. (Gardanne.) Ne croyez pas aux guérisseurs, car ce sont des charlatans. (Cormen.) Où manquent les médecins, les charlatans sont en crédit. (Guizot.) Les charlatans sont tout simplement des filous qui profitent de la crédulité des honnêtes yens. (Boitard.) || S’est dit pour banquiste : Les chalatans font mille tours avec une adresse merveilleuse. (Trév.)

Peu d’écrivains pratiquent la morale, Qu’ils débitent pieusement. Le charlatan prend rarement Les grands remèdes qu’il étale !

— Par anal. Médecin vantard, qui prône à l’excès l’étendue de sa science et l’efficacité de ses remèdes : Ce n’est point un médecin, ce n’est qu’un charlatan. (Acad.) Je n’aime point un charlatan qui veut me faire accroire que je suis malade pour me vendre ses pilules. (Volt.)

— Par ext. Personne qui, dans un genre quelconque, exploite la crédulité publique, la connaissance de quelque secret merveilleux : Les marchands du Palais-Royal sont des charlatans. (Richelet.) J’aime mieux la charlatane, Mlle  Duraney, gui enchante le public. (Volt.)

Le monde as jamais manqué de charlatans ; Cette science, de tout temps, Fut en professeurs très-fertile.

La Fontaine.

|| Personne qui cherche à en imposer par un étalage fastueux d’actions ou de paroles : Charlatan politique. Charlatan de vertus. Défiez-vous des charlatans qui ont usurpé, en leur temps, une réputation de passade. (Volt.) Le merveilleux d’un charlatan impose aux sots ; le merveilleux du talent impose aux gens d’esprit. (La Harpe.) Le véritable charlatan, celui qui monte sur des tréteaux pour vendre ses drogues, est moins à redouter que le charlatan spirituel. (Gardanne.) On doit toujours éviter de prendre une enseigne de charlatan. (Boissonade.) Macpherson est un charlatan qui a trompé ses contemporains. (Boissonade.) Le peuple passe sa vie à changer de charlatans qui lui promettent la félicité de ses vices. (St-Marc-Gir.) Comme les charlatans trouvent que rien ne donne plus de peine que les actes et ne coûte moins que tes paroles, ils parlent beaucoup et ne font rien. (E. de Gir.) Turgot mourait méconnu, après avoir été renversé du pouvoir par l’épithète de charlatan d’administration que lui avait donnée Monsieur, frère de Louis XVI, et depuis Louis XVIII. (E. de Gir.) Les Hébreux, au dire des païens, étaient des charlatans de vertu. (Peyrat.)

Des charlatans toujours le public fut la proie.

Viennet.

Un certain charlatan, qui s’est mis en crédit, Prétend qu’à son exemple on n’ait jamais d’esprit.

Voltaire.

Le monde où nous vivons est plein de charlatans Qui tachent d’arrêter les regards des passants.

Étienne.

Que l’Église est fertile en dévots empiriques !

Que de saints charlatans !

Saint-Evremond.

On connaît ces vieillards sur le Pinde honorés, PojHiques adroits, charlatans illustrés.

Gilbert.

… Je prétends qu’un cavalier bien né En sache assez pour n’être pas berné Par l’impudence et l’air de dictature Des charlatans de la littérature.

J.-B. Rousseau.

C’est à Paris, dans notre immense ville. En grands esprits, en sots toujours fertile. Mes chers amis, qu’il faut bien nous garder Des charlatans qui viennent l’inonder.

Voltaire.

— Adjectiv. Qui fait le charlatan, qui pose, qui cherche à en imposer : Un médecin charlatan. La race charlatane des orateurs. Ce que j’ai toujours aimé en vous, madame, parmi plusieurs autres genres de mérite, c’est que vous n’êtes point charlatane. (Volt.) Quand on veut éviter d’être charlatan, il faut fuir les tréteaux ; car si l’on y monte, on est bien forcé d’être charlatan, sans quoi l’assemblée vous jette des pierres. (Chamfort.) Il y a bien des académiciens qui sont charlatans. (V. Hugo.) Il se rencontre des hommes qui sont charlatans d’extérieur et de bonne foi. (Balz.) || Qui est propre, qui convient, qui est habituel aux charlatans : Un ton charlatan. Une majesté charlatane. C’étaient les parents ou les amis qui faisaient les oraisons funèbres chez les Romains : l’étranger qui s’en mêle a toujours l’air charlatan. (Volt.)

L’homme est ami du style charlatan.

Lamotte.

— Encycl. Un charlatan disait au peupla assemblé : « Mon baume se compose de simples, et tant qu’il y aura des simples ici, je ne m’en irai pas. • Ce mot indique k lui seul quand a commencé le charlatanisme et à quelle époque il doit finir. La crédulité humaine et l’imposture sont deux sœurs jumelles, contemporaines des plus vieilles sociétés, et que l’on trouve avec elles, à l’origine des âges, couchées dans le même berceau ; elles sont nées avec le monde, elles ne finiront qu’avec lui. Aussi voyons-nous un naïf et curieux écrit du xvn«. siècle, le Charlatan découvert (Toulouse, 1687), installer le premier de ces industriels dans le Paradis terrestre, et comme l’auteur ne pouvait faire qu’Adam et Eve, qui existaient seuls, fussent dupes d’un de leurs semblables, le père de tous les Tabarins futurs nous est montré sous la forme d’un serpent, ou plutôt sous la forme de Satan lui-même : «Les propriétés et conditions de tous temps, vues et observées en ces gens qu’on nomme charlatans, dans l’exercice de leur art, sont au nombre de cinq. La, première condition, c’est de se déguiser, — et le diable dans le paradis se déguise en serpent ! La seconde, de monter en banc, — et le serpent monta sur un arbre ! La troisième, dédire et raconter des mensonges, — et le mauvais ange dit à nos parents -.Nequaquam niorieminit La.quatrièine, de se moquer de la simplicité du peuple, — et iedémon ajouta : et eritis sicul dit’/La dernière, de vendre des boulettes, —et c’est une pomme que le tentateur offrit à notre mère !... En vérité, le charlatan, c’est Satan en personne. » Voilà qui est pousser un peu loin la réclame à l’antiquité du charlatanisme. Nous voulons être moins hardi. Nous ne remonterons pas même jusqu’au déluge, quoique l’histoire nous ait conservé ces paroles mémorables d’un empirique de carrefour : Voici, voilà l’élixir de Mathusalem. Le secret de sa composition fut sauvé du déluge par l’un de mes ancêtres, qui s’était réfugié sur le pont de l’Arche, en mémoire de quoi l’on appelle encore Pont-de- VArche un endroit célèbre de la contrée où vinrent se fixer ses descendants, et qui est mon propre pays natal... » Ne citons même que pour mémoire un Eudamus, qui vendait des anneaux contre la morsure des bêtes venimeuses ; un Chariton, exploitant des sachets contre l’épilepsie, un Clodius qui spéculait sur des peaux souveraines contre l’apoplexie. U y a encore, au temps de Pompée, un certain Asclépiade, qui d’avocat se fit marchand de drogues sur la place publique ; le sot charlatan que ce devait être, avec ses phrases creuses et ses gestes emphatiques 1 Et cet autre dont parle Phèdre :

Mahtsquim su/or inopta deperditus Medicina ignoto facere cœpisset loco Et vendîlaret falso antidotum nominc ! Yerbosis adquisivit sibi famam slrophis.

Un savetier qui se fait médecin en plein vent et devient célèbre aussitôt, il y a là de quoi surprendre. À coup sûr, il taisait des souliers comme Spinosa polissait du verre, et devait se préparer dès longtemps à sa nouvelle carrière ; car, en définitive, il fautet c’est Mengin qui l’a dit — il faut vingt ans pour faire un bon charlatan.

Venons à une époque plus rapprochée de nous. Les vrais charlatans, les. types du genre, datent, en France, de la fin duxvie siècle. Ce fut alors une véritable immigration d’hommes à part, bizarrement accoutrés d’oripeaux et de costumes tous plusou moins excentriqueset bariolés de diverses couleurs. Ils allaient de ville en ville, tout leur bagage sous le bras, et dès qu’ils arrivaient sur une place publique, ils attiraient la foula autour d eux au son du violon ou de la guitare. Puis, c’était l’annonce obligée, le boniment traditionnel, qui dorait la pilule à ce bon public et poussait à la recette. Et d’aller leur train les bourdes les plus effrontées, les fables les plus invraisemblables, surtout le panégyrique le plus outrecuidant de la drogue à vendre : Prenez, prenez ; ceci guérit tous les maux, les coliques et le mal de dents, les brûlures et la rage, la teigne et les crevasses au sein. Venez, on arrache les dents, on panse les plaies, on raccommode les jambes cassées... » — C’est chose plaisante, dit le Discours de l’origine des charlatans, de voir les artifices dont se servent ces médecins pour vendre leurs drogues, quand, avec mille faux serments, ils affirment avoir exercé leur art auprès du roi de Danemark ou d’un prince de Transylvanie et de souverains de contrées lointaines ou imaginaires. Du reste, ils ne manquaient jamais d’exhiber et les attestations et les lettres patentes signées do ces il-lustres potentats. Quand la parole était insuffisante pour stimuler le spectactour, le charlatan recourait volontiers a la démonstration des faits. Au signe convenu s’avançait un gueux auquel il arrachait nombre de dents qu’il lui avait ajustées d’avance ; l’illusion devenait complète, grâce à une liqueur rouge, que le compère crachait en guise de sang. Et laissez-nous, puisque nous parlons de compères, laissez-nous vous dévoiler les secrets du charlatan, vous montrer la ficelle, le truc de sa comédie. Entre les roueries singulières, les plaisantes piperies dont il usait pour émerveiller les badauds, nous citerons les suivantes : le charlatan, — il est à regretter que le nom de celui-ci ne soit pas parvenu •jusqu’à nous — après avoir agité ses g".elots et débité sa harangue ordinaire, provoquait la foule à expérimenter son élixir ; l’essai n’en coûtait rien. » A cetappel. on voyait du milieu des spectateurs s’avancer un homme... le pauvre homme ! jamais condamné marchaut au supplice n’eut mine plus piteuse. Deux valets du charlatan étaient obligés de l’aider à monter les degrés du temple d’EscuIape, Le turc ou l’arlequin ; n’importe, interrogeait alors la victime ; il l’auscultait, la percutait, l’interrogeait encore. Enfin, se tournant vers ceux qui l’entouraient, il déclarait que le malade n’avait pas deux heures à vivre, et en appelait effrontément à toutes les personnes présentes, docteurs ou non, qui voudraient s’approcher. Et si quelque incrédule s’avisait de vouloir confondre le charlatan, il se préparait à être confondu lui-même. Le pouls du malade ne bat plus, s’écriait aussitôt Je mécréant, ses forces s’en vont, la vie lui échappe... au secours ! vite au secours ! ou cet homme est mort... Personne ne venant, l’homme de l’art administre au malade quelques gouttes de sa panacée... Et voilà que, par enchantement, le pouls devient normal et l’agonisant renaît à la vie, à une vie pleine de force et de santé. Et la foula de se demander quel est ce nouveau Messie qui ressuscite les morts, décrier au miracle... et de tendre à l’envi des pièces d’argent ou de cuivre pour obtenir une fiole du merveilleux élixir. Or voici le dessous des cartes : le nouveau Messie, quand l’incrédule est présent, Ïiose négligemment la main sur le bras du maade

— du compère — en serrant un bracelet caché sous la manche de la veste et le desserrant h volonté, il interrompt la circulation du sang ou la laissé libre. Passons à Un autre truc ; Un étranger se présente, un jour de fête, dans l’auberge la plus apparente d’un bourg populeux. Il est mis avec recherche et s’exprime d’un ton d’autorité ; aussi tout le personnel de l’auberge se montre-il empressé envers ce personnage important ; toute l’assistance, qui est nombreuse, le regarde avec ébahissement. On lui sert un excellent dîner ; mais, à peine y a-t-il goûté, qu’il se livre aux gestes les plus tragiques, se tient les mâchoires à deux mains et pousse des cris à fendre la pyramide de Chéops. Chacun l’entoure et veut lui porter secours : « Qu’a vez-vous ? où souffrez-vous ? — Une dentl c’est une dentl Oh ! quel supplice de damné ! et voilà quinze ans que cela dure ! Si j’avais le courage de me la faire arracher, .. Mais non, la vue seule du baume d’acier me fait frissonner. » Chacun s’apitoie sur les douleurs de ce pauvre homme. Sur les entrefaites, un charlatan fait son apparition dans la salle, le chef orné d’un chapeau à plumes multicolores, le dos couvert d’un manteau de

velours incarnat semé de paillettes d’or. Us’assoit dans un coin et se fait servir un modeste petit verre. En entendant les soupirs de l’étranger, il s’avance vers lui : « Oserais-je vous demander, monsieur, où se trouve le siège de la souffrance que voua paraissez endurer ?

— Hélas I c’est une dent qui fait mon martyre. Il n’y a rien à y faire ; tous les remèdes que j’ai employés jusqu’à ce jour ont été inutiles.— Eh bien, moi, reprend le charlatan en souriant d’un air de suffisance, je prétends vous guérir en moins d’une minute. » Tirant alors un petit paquet de sa poche, il y puise une pincée de poudre blanchâtre qu’il délaye dans un demi-verred’eau. «Maintenant, monsieur, veuillez tremper un coin de votre mouchoir dans ce mélange, et l’appliquer ensuite sur la dent malade. À peine l’étranger s’est-il conformé à cette prescription qu’il s’écrie : « Mais c’est extraordinaire, prodigieux, merveilleux, miracuïeuxlJe ne souffre plus, la douleur a disparu comme par enchantementement. Je le crois bien, répond l’empirique, et ce qu’il y a de plus admirable encore, c’est que jamais cette dent, cariée jusqu’à la racine, ne vous occasionnera la plus légère souffrance.—Monsieur, reprend l’étrangerd’un ton ému, il me faut ce petit paquet. En voulez-vous 20 fr., 30 fr, 40 fr ? > Ici la physionomie du charlatan devient froide et digue : « Si j’avais voulu exploiter la reconnaissance do tous ceux que j’ai guéris, je ne voyagerais qu’en carrosse doré ; mais j’obéis à un plus noble motif. Vous me payerez ce paquet de poudre le prix que je le vendrai tout à l’heure aux bons habitants de ce bourg.-50 centimes.

— Je vous admire et je n’insiste pas ; mais vous me ferez l’honneur de partager mon dîner ! > Invitation que notre homme accepte sans se faire prier.Ûne heure après, trombone etgrosse caisse marient leur charivari sur la place, tandis que des centaines de mains impatientes se tendent vers le charlatan, qui, impassible, ne semble même pas y prendre garde, sachant bien qu’il ne perdra rien à... faire attendre. En cinq minutes, tous ses paquets sont vendus, et il n y en a pas pour tout le monde. Mais si, à quelques jours de là, un paysan, tourmenté pur cette insupportable douleur qu’on appelle le mal de dents, veut appliquer le topique infaillible, il a beau délayer le paquet tout entier ; semblable aux divinités du paganisme dont les oracles sont muets, la fumeuse poudre est devenue impuissante.

Voicienfin, comme dernier exemple, unetroisième variété des trucs à l’usage de MM. les charlatans. Deux artistes se donnent rendezvous dans la même localité et s’entendent comme larrons en foire pour attraper le public. Le premier a’yant déjà étalé et sa vente " allant bon train, te second paraît, se met à pérorer, et l’on fait cercle autour de lui. • Vous voyez devant moi, dit-il, mon plus grand antagoniste. Je suis honnête homme, messieurs, et connu pour tel dans tous les coins de l’Europe ; mais, pour lui, vous pouvez être assuré que c’est le plus grand fourbe qui existe sur la surface de la terre. Cependant, messieurs, comme je ne suis au monde que pour le soulafement du public, et particulièrement de cette onorable assemblée, je dirai toujours la vérité, même à mes dépens. Méfiez-vous de son purgatif médicinal ; c’est un composé de dro gués fortes, dont je ne me hasarderais pas à donner une dose au cheval de bronse, sM de venait poussif. Mais une chose dont je ne peux en conscience dire du mal, c’est son baume. Oh ! pour celui-là, c’est un remède admirable ; j’aurais tort si je disais autrement. Vous pouvez me reconnaître, messieurs, à ce trait désintéressé. • Tandis que celui-ci harangue en ces termes son auditoire séduit par tant de franchise, l’autre lâche les mêmes bordées aux gobe-mouches qui.l’entourent. Il dénigre la baume de son confrère, et vante ses pilules purgatives, pour l’honneur de la vérité. Pour résultat, le premier vend tout son baume et garde son purgatif ; le second débite un boisseau de pilules.

Passons maintenant en revue quelques-uns des plus illustres charlatans. Tabarin parut, Tabarin dont on disait : « U fait rire depuis les pieds jusqu’à la tête ; Tabarin, dont nous devrions ici parler longuement. Mais ce maître charlatan, ce roi des Bateleurs mérite un article à part. (V. Tabarin.) Nommons encore « les triacleurs jurés de l’université de la place