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12 CABA

{{Alinéa|chanteur tirant sa bourse, et la tenant à la main comme s’il eût voulu la délier : — Pour cette fois, lui dit-il, je vais vous en chanter une qui sera de votre goût. Et il se mit à entonner celle qu’on appelle en Italie la chanson du voyageur, dont les paroles sont : Mettez la main à la bourse, et payez l’hôte, celle-là vous plaît-elle ? — Oui, dît l’hôte. — Vous êtes donc payé, dit le voyageur en s’en allant. (Anecdote traduite de Poggi.)

***

Fils â’un défunt cabaretier.

Un faquin, loin du lieu témoin de sa naissance,

Prenant un nom, un titre, et l’air de l’importance

Voulut un jour battre son perruquier. — Pourquoi cette vive colère ?

Dit le coiffeur bien instruit et malin ?

Imitez monsieur votre père.

Il mettait de l’eau dans son vin.

Cabaretière (la), en latin Copa, petit poëme d’environ quarante vers, généralement attribué à Virgile et digne, en effet, de figurer parmi les œuvres de sa jeunesse. Il est vrai de dire que ce petit tableau alerte et souriant, ou plutôt cette miniature est encore mieux dans le goût de Catulle. « Elle rappelle, dit M. Pierron, ces peintures de Pompéi où se révèle à nous la vie antique, et qui sourient, pour ainsi dire, d’un rayon d’élégance et de beauté, » Ajoutons qu’elle est en distiques et que ce serait le seul poème de Virgile, en dehors des Catalecfes d’une authenticité si douteuse, qui ne fût point écrit en hexamètres. Mais enfin, on la donne à Virgile, et l’on y trouve assez de traits frappés au coin de ce beau génie pour attacher sans scrupule ce gracieux fleuron de plus à sa brillante couronne.

Voici donc une cabaretière syrienne, la tête ornée du bonnet phrygien, qui, les castafnettes en main, dans sa taverne enfumée, anse la tarentelle lascive. Le poète invite le passant à entrer ; il énumère, un peu complaisamment, et plutôt avec l’intarissable babil d’Ovide qu’avec le goût sobre de Virgile, les séductions de ce séjour, les roses, les lis, les coupes et par-dessus tout les baisers à cueillir sur les lèvres de la jeune hôtesse. Arrière, dit-il, les sourcils renfrognés 1

Ah ! pereat cui sunt pritea mpetcitial

Puis, à la façon d’Horace ; « Qu’on apporte le vin et les dés. Malheur à qui se soucie de demain 11

Porte me/mm et talot. Pereant qui crastina curant !

Et c’est Catulle qui semble avoir ajouté ce dernier vers :

Mûri autan vellens : YùMe, ait, vento. « La mort, nous tirant par le bras. Nous dit : Je viens, dépêohez*vous de vivre.

CABARÉTIQUE adj. (ka-ba-ré-ti-ke-rad. cabaret). Propre au cabaret, digne du cabaret ; L hôtesse dit cela d’un ton si cabaré- TiQUB’çue La Bancune jugea qu’elle avait raison. (Scarron.) H Ne peut être employé que dam le style burlesque.

GABARRE s. f. (ka-ba-re). Mar. Se dit quelquefois pour GABABRE.

CABARRUS (François, comte de), célèbre financier, né à Bayonne en 1752, mort en 18io. Fils d’un négociant, il fut envoyé de bonne heure en Espagne, où il se maria, à peine âgé de vingt ans. Tout en s’occupant de commerce et d’industrie, il entra en relation avec les plus grands personnages de Madrid, entre autres avec le ministre des finances, qui, lors de la crise financière de 1779, n’hésita pas à consulter Cabarrus sur les moyens de rétablir le crédit de l’État. Celui-ci proposa de créer un papier-monnaie portant intérêt. Son idée ayant été adoptée, on émit, sous le nom de valès, des bons royaux parfaitement accueillis par le public. Ce succès le fit nommer, en 1782, directeur de la banque de Saint-Charles, dont il avait également conçu le plan. Ce fut encore d’après ses idées qu’on établit, en 1785, la compagnie pour le commerce des Philippines. Nommé conseiller d’État, il tomba en disgrâce sous Charles IV et fut même emprisonné (1790) sous la fausse accusation de malversations ; mais il recouvra bientôt son influence, fut créé comte, surintendant des routes et canaux, directeur des manufactures royales et ministre plénipotentiaire au congrès de Rastadt. Sous Ferdinand VII et Joseph Bonaparte, il occupa le ministère des finances. Il a laissé quelques écrits et mémoires relatifs à l’économie publique et ans finances de l’Espagne. Mais le plus méchant, d’autres disent Je plus excellent de ses ouvrages, fut sa fille, Mlle Thérèse Cabarrus, qui fut successivement veuve Fontenay, veuve Tallien, puis dame Caraman et princesse de. Chimay. V. Taixibn.

CABARSCSSE (concile de), concile qui se tînt en 393 à Cabarsusse, ville de la Byzacène, et qui était composé d’une centaine d’évêques sectateurs de Maximien de Carthage. Ils formaient une branche schématique des donatistes et se réunirent pour juger Primien. Celui-ci, ayant refusé de comparaître, fut condamné pour avoir donné des successeurs à des évêques vivants, pour avoir admis les claudianistes à la communion, pour avoir excité des gens séditieux contre les partisans de Maximien, pour avoir refusé de se présenter devant le concile, enfin pour s’être emparé de plusieurs églises par violence et

Pe

avec l’autorité des juges séculiers, Le concile excommunia Primien, le déposa de l’épiscopat et mit le diacre Maximien à sa place. Pour justifier catte décision, on écrivit à tous les clercs une lettre que saint Augustin cita plus tard et dont il recommanda la lecture comme avantageuse à l’Église.

CABAS s. m. (ka-ba. — Origine incertaine : selon Ménage, du mot grec hypothétique kahakos, venant du verbe inusité kaô, auquel il prête le sens du latin eapt’o, contenir. De là serait venu le bas latin cabacus, cabacius, offrant la même signification. Mais il vaut mieux rapprocher cabas de l’espagnol capazo, capacho, qui a le même sens. M. Littré le rattache au radical celtique cab, hutte, ce qui sert à recouvrir.) Sorte de panier d’emballage, en jonc tressé, en feuilles de palmier ou en sparterie, qui sert, dans le Midi, à emballer des fruits secs :’Un cabas de figues, de panses de Malaga, de prunes de Brignoles. Cent paquets de raisins secs et deux cents cabas de figues. (Volt.)

— Par anal. Sorte de panier aplati, en paille tressée ou en point de tapisserie, dont les femmes se servent pour mettre leurs emplettes : Elle tenait à la main un cabas en paille et un parapluie bleu de roi. (Balz.) Elle fourra la main jusqu’au coude dans son cabas. (G. Sand.) Il Sorte de grand panier dont les commissionnaires, en Espagne, se servaient pour transporter les provisions du marché au domicile de l’acheteur : Ils allaient dans les marchés avec des cabas, pour s’offrir à porter les provisions que les bourgeois y achetaient. (Le Sage.) Vive le cabas 1 il en est de lui comme des beignets, il faut y revenir quand on en a tâté une fois. (Le Sage.)

— Par ext. Sorte d’ancienne voiture publique en osier clisse. Il Grand et mauvais lit où couchent plusieurs personnes : Je sautai hors de ee cabas hospitalier, maudissant cordialement les bons usages de nos aïeux. (Chateaub.)

— Par plaisant. Grande, vieille et mauvaise voiture : Nous sommes venus dans un méchant cabas. (Acad.) H Large chapeau d’homme ou de femme déformé : Être coiffé d’un cabas.

— Ane. art milit. Pavois de bouclier sous lequel s’abritaient les archers, les arbalétriers et les autres assaillants.

— Cost. Chapeau de femme dont la passe n’est pas relevée.

CABAS1LAS (Neil ou Nicolas), théologien grec, qui florissait dans la première moitié du xive siècle. Il prit une part active à la grande querelle qui s’éleva entre l’Église grecque et 1 Église latine, et se montra un des plus ardents adversaires de cette dernière. Il fut nommé archevêque de Thessalonique. On a de lui deux traités intitulés : De causa dissidii Ecelesiarum, etc., et De primatu papes, imprimés d’abord en grec à Londres, puis publiés avec une traduction latine de Flaccius Illyricus (Francfort, 1559, in-8°). Dans ce dernier traité, il a pour but de prouver que le pape n’a qn une simple primauté d’honneur.

CABAS1LAS (Nicolas), théologien grec, neveu du précédent, anquel il succéda sur le siège de Thessalonique en 1360. Ambitieux et courtisan plein de souplesse, il remplit de hautes fonctions à la cour de Constantinople et fut employé par Cantacuzène dans ses négociations avec 1 impératrice Anne. Comme son oncle, il publia plusieurs ouvrages contre les latins, entre autres un traité sur la liturgie grecque, intitulé Compendiosa interprétatio in diuinum officium et publié dans la Bibliotheca Patrum (Paris, 1560). Citons encore de lui une Vie de Jésus-Christ en six livres, traduite en latin par Pontanus (Ingolstadt, 1604).

CABASSE, bourg et commune de France (Var), canton de Besse, arrond. et à 12 kilora. E. de Brignoles, sur l’Isole ; 1,685 hab. Manufactures de draps grossiers ; vignobles ; fourrages. Commerce de fromages et de grès pour filtres. Mines de plâtre ; carrières de pierres de taille ; minerai exploité depuis 1861. Restes d’antiquités gallo-romaines. Près de la chapelle Saint-Loup sont les ruines d’un château uâti par les Sarrasins. Sur la droite se dresse une belle masse de roches calcaires renfermant de vastes grottes.

CABASSE (Prosper), magistrat français, né â Aix en 1785. Il a exercé les fonctions de conseiller de cour dans sa ville natale, et de procureur général à la Guadeloupe. On a de lui : Essais historiques sur le parlement de Provence (1826, 3 vol. in-8°).

CABASSER v. n. ou intr. (ka-ba-sé — rad. cabas). Cacher. || Amasser, entasser :

Pour quelque peine que je mette

A cabasser, à ramasser,

Nous ne pouvons rien amasser.

(L’Avocat Patelin.)

|| Voler, tromper. || Mentir, bavarder. || Vieux mot inusité dans toutes ces acceptions.

CABASSET ou CABACET (ka-ba-sè—dimin. de cabas). Art milit. anc. Sorte de casque sans visière, à bords larges et abaissés, sans crête, sans gorgerin, comme en portaient les reîtres et les argoulets : On peint ordinairement Mercure avec un cabasset ailé. (Acad.) Faute de vaisseaux pour porter l’eau, ils étaient contraints d’en emplir leurs cabassets, (Amyot, xvie siècle.) Il On l’appelait aussi capacbte et

CEHVBLIKHE.

—Ençycl. Le cabasset, dont on voit ornée la

tête des gens d’armes du xt» et du xn« siècle, était une sorte de morion terminé en pointe arrondie, à bords larges et abaissés pour garantir le visage. Son emploi était très-fréquent en raison de sa légèreté, qui ne l’emf)êchait pas de rendre le même service que es casques plus pesants. Le cabasset était la coiffure du soldat proprement dit. Il était fabriqué grossièrement et dépourvu de tout ornement, si ce n’est quelques clous d’airain disposés en cercle au-dessus des bords. Il en existait cependant qui étaient gravés ou ciselés, et dont la surface offrait la représentation d’instruments de guerre ou de chasse, de fleurs, etc. ; mais c’était là l’exception, et le cabasset était généralement nu. Sa seule élégance consistait dans le poli et le brillant du métal dont il était composé.

CABASSEUR, EUSE s. (ka-ba-seur, eu-ze — rad. cabosser). Trompeur, voleur. G Vieux mot.

CABASSOLE (Philippe de), littérateur et diplomate, né à Cavaillon en 1305, mort à Pérouse en 1372. Il fut nommé par Jean XXII évêque de sa ville natale, le 3 août 1334, n’ayant pas encore atteint l’âge prescrit par les canons. Pétrarque, écrivant à ce sujet à un de ses amis, dit en parlant de Cabassole : « C’est un grand homme à qui l’on a donné un petit évêché. • Sous les papes Clément VI, Innocent VI et Urbain V, Cabassole fut employé dans plusieurs affaires graves, et il fut reconnu pour l’un des hommes les plus capables et les plus habiles de son temps. Urbain V le promut au cardinalat le 2ï septembre 1308. Jusqu’à Siffrein Maury, Cabassole a été le seul Comtadin qui ait été admis dans le sacré collège. La bibliothèque de Carpentras possède plusieurs manuscrits de ce savant cardinal, dont un est intitulé : la Vie et les miracles de sainte Marie - Magdeteine, et un autre : De nugis curialium et de miseria curiarium. Cabassole était en relation avec les hommes les plus distingués de son siècle. Pétrarque nous apprend qu’il le voyait souvent passer les nuits entières à étudier, et qu’il avait une grande connaissance de l’histoire. En sa qualité d’évêque de Cavaillon, Cabassole était seigneur du village de Vaucluse. C’est là que Pétrarque se lia d’amitié avec lui.

CABASSON s. m. (ka-ba-son). Ichthyol. Nom provençal d’un très-petit poisson fort commun dans l’étang de Berre et dont on fait une excellente friture.

CABASSOU ou KABASSOU (ka-ba-sou). Mamm. Nom spécifique d’un tatou.

CABASSUT (Jean), savant oratorien français, né à Aix en 1604, mort en 1685. Il abandonna le barreau pour entrer dans la congrégation de l’Oratoire, afin de se livrer entièrement à son goût pour l’étude. Sans le secours d’aucun maître, il apprit le grec ancien et moderne, l’hébreu, le syriaque et le chaldéen. Le cardinal Grimaldi, archevêque d’Aix, ayant pu apprécier son mérite, se l’attacha, l’emmena avec lui à Rome en 1660, et en fit son conclaviste pendantl’élection d’Alexandre VU. Cabassut recueillit dans ce voyage un grand nombre de matériaux pour ses ouvrages, dont les principaux sont : Notitia conciliorum (1685, in-fol.)^ abrégé bien fait de la collection des conciles, et Juris canonici theoria et praxis (Lyon, 1675, in-4<>).

CABAT s. m. (ka-ba). Agric. Espèce de charrue employée dans le Médoe pour déchausser les pieds de vigne.

— Métrol. Ancienne mesure pour le blé.

CABAT (Louis), paysagiste français contemporain, né à Pans en 1812. À l’exemple de M. Fiers, son maître, il abandonna les principes surannés de t’école classique, et, ne prenant que la nature pour modèle, il en peignit, sincèrement, naîvement, les aspects les plus humbles, les recoins les plus ignorés. Il débuta, au Salon de 1833, par de petites toiles d’une exquise simplicité : un Cabaret à Montsouris, le Moulin de Dompierre (Picardie), les Bords de la Bouzanne (Indre), et l’Intérieur d’un bois, qui excitèrent le plus vif intérêt, et qui firent une véritable révolution dans la peinture de paysage. Il exposa, l’année suivante, d’autres ouvrages exécutés dans le même sentiment : la Vue du jardin Beaujon, l’Etang de Villed’Avray, le Bois de Fontenay-aux-Boses, le Hameau de Sarasin sur les bords de la Bouzanne, l’Intérieur d’une métairie dans le Calvados, et, en 1835, la Gorge-aux-Loups (Seineet-Marne), une Hôtellerie des bords de la Bouzanne, la Fête de la Vierge à l’eau, et l’Oiseleur à l’affût. Ces divers tableaux, traités avec une finesse qui rappelait la manière des vieux maîtres flamands, furent tout une révélation pour le public. « On ne saurait s’imaginer aujourd’hui, a dit M. Th, Gautier (Salon de 1864), quellt- surprise et quelle admiration ce fut de voir que, sans sortir de la banlieue, en restant même à Paris, on pouvait faire des paysages fins, vrais, charmants, d’une nouveauté complète, comme tout ce qu’on a sous les yeux et qu’on ne regarde pas. Les premiers tableaux de M. Cabat révélèrent qu’il suffisait, à un artiste naïf et sincère, d’une chaumière, d’une flaque d’eau, d’un moulin à vent, d’une clôture en planches et de quelques arbres poussant au hasard dans un terrain abandonné, pour remplacer avec avantage les wbres-eouHsses, les rochers

CÂBA

ds carton» la fabrique à fronton «recette, montagne bleue dont les Bertin, les Bidault et leur déplorable école avaient abusé si longtemps. Avec quelle joie on rentra dans le sein de cette bonne vieille nature toujours si. jeune 1... Ce bienfait inestimable, on le doit à Cabat ; il ne faut pas l’oublier. Cabat est l’aïeul du paysage moderne, et, certes, il a le droit d’être fier de sa descendance : elle est belle et nombreuse. » Les Plaines d’Arqués, l’Hiver, la Vue de Civrau (Meurthe), la Vue prise à Lisieux, qui figurèrent au Salon de 1836, confirmèrent la réputation naissante de M. Cabat ; mais, tout en reconnaissant que ces peintures étaient « des chefs-d’œuvre de finesse et de pureté, comparables aux plus beaux flamands, » Gustave Planche exprimait le regret que la nature y fût trop littéralement copiée. « Pour transformer ces toiles en tableaux, disait-il, il faudrait interpréter, agrandir les motifs choisis par le peintre, et malheureusement M. Cabat paraît concentrer

toutes ses études dans l’habileté de la main. ;. Jeune et déjà rompu au maniement du pinceau, cet artiste serait coupable envers lui-même s’il ne se hâtait de diriger ses études vers le côté idéul de la nature. » Et, à propos d’une Vue prise dans l’Indre, autre 1 chefd’œuvre de finesse et de grâce, 1 exposé en 1837, avec une Vue de la forêt de Fontainebleau, le célèbre critique disait encore ; « Souhaitons à M, Louis Cabat d’avoir quelque chose de mieux que l’habileté : l’invention. ». Ces exhortations à se préoccuper d’idéal, de style, de composition et d’invention, furent écoutées par M. Cabat et l’entraînèrent dans une voie toute nouvelle, où son talent devaiff perdre de son originalité en gagnant en noblesse. Au retour d’un premier voyage en Italie, il exposa, en 1838, un tableau : Chemin dans la vallée de Nanti, dans lequel les juges les plus compétents s’accordèrent à louer une fermeté, une simplicité dignes de Poussin ; C’est là sans doute un magnifique éloge, disait Gustave Planche enthousiasmé des progrès auxquels il avait pu contribuer par ses conseils ; mais cet éloge résume très-bien l’impression produite par Te tableau de M. Cabat... Cet artiste, qui d’abord rappelait trop littéralement l’école flamande, et ne semblait voir la nature qu’à travers ses souvenirs, se familiarise avec la réalité et la transcrit avec une élégance remarquable. Je ne veux pas m’associer au reproche que lui adressent les admirateurs passionnés de l’Italie, 11 est possible que son tableau ne ressemble pas à la nature italienne ; mais que ce tableau rappelle l’Italie ou la Normandie, peu importe ; ce qui «est constant pour tous les amis de la peinture, c’est qu’il se recommande par des qualités du premier ordre, et marque dans la carrière de l’auteur un progrès éclatant. M. Cabat va, dit-on, retourner en Italie, 11 ne pourra manquer de se transformer, en présence des grandes lignes de la campagne romaine. Jeune, maître de son pinceau, copiant fidèlement ce qu’il voit, comment ne réussirait-il pas à nous montrer l’Italie sous un aspect nouveau ? Il n’est pas, comme tous les paysagistes lauréats de l’école de Rome, garrotté dans les liens étroits d’un système absolu, immuable. Ce qu’il aura vu, il le mettra sur la toile, et, dûtil s’abstenir d’inventer, il serait encore assuré de nous charmer. Mais il y a lieu d’espérer que l’Italie enseignera à M. Cabat la nécessité d’inventer, et qu’il ne transcrira plus la nature sans l’interpréter. » Ainsi, tout en applaudissant aux efforts de l’artiste potlf atteindre à plus de dignité et d’élégance dans le paysage, on trouvait qu’il manquait encore d’invention, qu’il ne composait pas assez. Désireux de donner satisfaction à ce grand goût’. d’idéal qui avait fini par s’emparer de son propre esprit, M. Cabat partit de nouveau pou» l’Italie, espérant trouver sur cette terre classique les moyens d’agrandir le cercle de ses idées. Au retour, il exposa : en 1840, une Vue du tac Némi et deux paysages historiques : le Bon Samaritain et le Jeune Tobie ; en 1841, deux paysages ; en 1846, le Bepos et un ’’huisseau à la Judie (Haute-Vienne). Ces divers ouvrages étaient conçus et exécutés de façon à mériter les éloges des amateurs du style ; mais les vrais connaisseurs regrettèrent que l’artiste eût sacrifié, à cette recherche d’une élégance de convention, la grâce, la naïveté, le charme intime et pénétrant de sas premiers ouvrages. Gustave Planche reconnut lui-même que M. Cabat avait fait fausse route en s’etforeant de suivre les traces de Poussin, et il l’engagea à revenir à sa première manière. De son côté, M. Thoré écrivait (Salon de 1846) ; « L’Italie est funeste au talent sincère et naïf de M. Cabat. Cet artiste ferait mieux d’habiter une ferme de Normandie qu’un couvent. Il a gagné du côté de la composition et du style, mais il a bien perdu du côté de la lumière, de la richesse et de la variété. Le Guaspre l’a ensorcelé comme tant d’autres. Cabat ne songe plus autant à la nature extérieure ; il regarde le paysage dans son esprit, croyant mieux arranger un site que Dieu ne l’a pu faire avec sa magie toute-puissante... Ses deux tableaux (le Repos et le Huisseuu) sont des œuvres de maître, mais d’un maître un peu égaré. Les terrains ont une fermeté rare, les arbres une belle prestance, le ton local une certaine vigueur, mais l’ensemble est monotone et étouffant. » Une fois lancé a la poursuite du style, M. Cabat ne devait plus s’arrêter ; mais, s’il est vrai qu’il ait perdu à cette étude réfléchie plusieurs de ses qualités