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même fécondes, qui succèdent à de grands siècles. Accablées par l’héritage du passé, elles sont plutôt tentées d’être savantes. La philosophie emprunte aux philosophes de tous les temps ; la poésie reproduit les formes de tous les pays ; l’architecture excelle dans tous les styles ; la peinture puise dans toutes les écoles. Des œuvres nobles, ingénieuses, exquises sont sorties de ce mélange ; on recherche les jouissances que donne l’érudition dirigée par le goût ; l’éclectisme ne règne pas seulement, il est populaire. » Voici maintenant l’appréciation de la musique moderne, et de la voie réaliste dans laquelle des novateurs voudraient la précipiter : « Lorsqu’on pousse si loin la vérité des détails, on perd de vue la condition fondamentale de l’art, qui est de simplifier, et son but suprême, qui est la beauté. La marque du génie, c’est qu’il est simple, et qu’il répand, sur tout ce qu’il crée, une lumière presque divine, qui s’appelle la proportion. La musique est une langue poétique ; elle a par conséquent des limites qu’elle ne franchit pas impunément. Si elle se pose des problèmes, et veut produire l’illusion matérielle ; si elle prétend tout peindre et rivaliser avec la métaphysique ; si elle s’astreint à traduire chaque sens du texte par une intention, chaque mot par une note, elle imprime à l’imagination des secousses fébriles, mais elle cesse de verser dans l’âme ces délices et cette sérénité qui découlent du beau ; aux prises avec le monde réel, elle ne peut s’élever dans la sphère de l’idéal, où se rencontrent les chants inspirés et sublimes, la noblesse des lignes, la perfection des contours mélodiques, la pureté des rhythmes et des harmonies, et surtout ces notes tendres, vibrantes, émues, qui pénètrent sans effort jusqu’à la source de nos larmes. » M. Berlioz, le concurrent de M. Beulé pour la place de secrétaire à l’Académie des beaux-arts, peut être plus savant en musique que M. Beulé ; cependant, sur un semblable sujet, il n’en eût pas dit davantage, et peut-être ne l’eût-il pas si bien dit.


BEUMLER (Marc), savant suisse, né en 1555 à Volketswyl, cant. de Zurich, mort en 1611. Après avoir rempli, en Allemagne, divers emplois ecclésiastiques, il revint, en 1594, à Zurich, y professa la théologie et publia un grand nombre d’ouvrages de philosophie, de théologie, de philologie, etc., qui lui acquirent une grande réputation. Ses ouvrages les plus estimés étaient : sa Grammaire (1533), une Rhétorique (1629) et un Catéchisme, en allemand et en latin (1609).


BEUNER v. n. ou intr. (beu-né). Pop. Faire une visite à l’heure du repas pour être invité : Il est venu beuner pendant que nous dînions, et il n’a pas manqué d’accepter l’offre de manger avec nous.


BEURARD (Jean-Baptiste), minéralogiste français, né à Nancy en 1745, mort en 1825. Il fut agent du gouvernement français à Meisenheim et membre d’un grand nombre de sociétés savantes. Son principal ouvrage est un Dictionnaire allemand français, contenant les termes propres à l’exploitation des mines, à la métallurgie et à la minéralogie, etc. (Paris, 1819, in-8°).


BEURMANN (Paris-Ernest, comte DE), général français, né à Strasbourg en 1775, mort vers 1835. Il fut d’abord enfant de troupe, puis simple soldat, et gagna tous ses grades en prenant part à toutes les campagnes de la République et de l’Empire. Après l’abdication de Napoléon, il servit les Bourbons, et, en 1830, il commandait à Toulon.


BEURNONVILLE (Pierre Riel, marquis de), maréchal de France, né en 1752 à Champignolle (Aube), mort en 1821. Engagé volontaire en 1774, il servit dans l’Inde sous Suffren, de 1779 à 1781, devint major et commandant des milices à l’île Bourbon, où il se maria avec une jeune et riche créole, et, de retour en France, il acheta la lieutenance de la compagnie des suisses du comte d’Artois. Aide de camp du maréchal Luckner en 1792, nommé maréchal de camp et lieutenant général la même année, il prit part, sous les ordres de Dumouriez, à la première guerre de la Révolution, se signala aux batailles de Valmy et de Jemmapes ; fut appelé au commandement de l’armée de la Moselle et éprouva des échecs dans diverses rencontres avec les Autrichiens. Pour en atténuer l’effet, il donna dans ses rapports, notamment dans celui qui concernait le combat de Grewenmacheren, un exemple de réticences et de mensonge qui est resté le chef-d’œuvre du genre : « Après trois heures d’une action terrible, écrivait-il, les ennemis ont éprouvé une perte de 10,000 hommes ; celle des Français s’est réduite au petit doigt d’un tambour. » Ce bulletin ridicule donna lieu à cette épigramme :

Quand d’ennemis tués on compte plus de mille,
Nous ne perdons qu’un doigt, encor le plus petit ;
            Holà ! monsieur de Beurnonville,
            Le petit doigt n’a pas tout dit.

Et les soldats eux-mêmes, commentant l’hyperbole, ajoutaient plaisamment que le petit doigt s’était retrouvé. Nommé ministre de la guerre en 1793, il dénonça à la Convention les projets de Dumouriez, qui venait de lui adresser une lettre confidentielle, et fut chargé d’accompagner à l’armée les commissaires envoyés pour surveiller la conduite du général et s’emparer de sa personne ; mais ce projet ayant échoué, Beurnonville et les commissaires furent livrés aux Autrichiens, puis échangés plus tard contre la dauphine, fille de Louis XVI (1795). De retour en France, Beurnonville devint successivement commandant en chef de l’armée du Nord (1796), ambassadeur à Berlin et à Madrid (1800-1802), sénateur (1805), comte de l’Empire, etc. En 1814, il demanda le rappel des Bourbons, fit partie du gouvernement provisoire choisi par Talleyrand, et fut nommé ministre d’État et pair de France par Louis XVIII. Proscrit pendant les Cent-Jours, il se rendit à Gand, d’où il revint avec le roi, qui le réintégra dans ses dignités, lui donna le bâton de maréchal en 1816 et le titre de marquis en 1817.


BEURRE s. m. (heu-re — lat. butyrum, même sens ; du gr. bous, vache ; rares, fromage). Substance grasse, onctueuse, jaune ou blanchâtre, que l’on retire de la crème du lait en la battant : Les Romains ne se servaient du beurre que comme d’un remède. (Encycl.) Le beurre est une espèce d’huile animale concrète, très-fusible, et qui parait devoir son état solide à la présence d’une certaine proportion d’oxygène. (Fourcroy.) Le beurre se conserve lorsqu’on l’a imprégné de sel ou lorsqu’on l’a fait fondre pour enlever les parties caséeuses, qui sont très-putrescibles. (Francœur.) Les connaisseurs seuls ne rebutent pas le beurre blanc. (Joigneaux.) En ce moment, le fils et la mère étaient ensemble dans la salle à manger, où ils déjeunaient d’une tasse de café accompagnée de beuîîre et de radis. (Balz.) Le beurre de la Prévataye, fabriqué dans certains cantons des environs de Rennes, jouit, dans toute la France et même à d’étranger, d’une réputation méritée. (Abel Hugo.) Je m’entends à l’hébreu comme une pie à étendre du beurre sur du pain. (Gér. de Nerv.)

Beurre frais, Beurre nouvellement fabriqué, et qui n’a été ni fondu ni salé pour être conservé : On inventa des charges de conseillers du roi contrôleurs aux empilements des bois, des contrôleurs visiteurs de beurre frais, des essayeurs de beurre salé. (Volt.) n Beurre fort, Qui a une odeur et un goût forts. On dit à peu près dans le même sens beurre rance. Il Beurre fondu, Beurre que l’on fond et que l’on épure pour la conservation : Chaque famille restait au coin du feu, dans une maison soigneusement close, fournie de biscuits, de beurre fondu, de poisson sec, de provisions faites à l’avance pour les sept mois d’hivor. (Balz.) il Beurre salé, Beurre frais qu’on lave soigneusement à plusieurs eaux et qu’on sale ensuite pour le conserver.

Pot de beurre. Pot dans lequel il y a du beurre. U Pot à beurre, Pot à mettre du beurre, il Lait de beurre, Espèce de petit-lait qui demeure dans la baratte après qu’on a fait le beurre. Il Beurre de mai, Beurre préparé au mois de mai, et auquel lo peuple attribuait des propriétés merveilleuses pour la guérison des plaies :

De la graisse de loup et du beurre de mai.

RÉGNIER.

— Art culin. Beurre noir, Beurre fondu qu’on a laissé noircir dans la poêle : Baie, oiufs au beurre noir. Il Beurre d’anchois, Beurre pétri avec’des filets d’anchois, et qui sert de sauce et d’assaisonnement : Bifteck au beurre : d’anchois. Il Beurre d’ail, Ail pilé et beurre mêlés ensemble et passés au tamis pour s’en servir au besoin, n Beurre d’écrevisses, Beurre mêlé à des carapaces d’écrevisses séchées au four et réduites en poudre, pour servir de condiment. Il Beurre de homard, Rouge de la tête du homard et œufs pris sous la queue, que l’on pile dans un mortier en y ajoutant une quantité égale de bon beurre frais : Le beurre de homard doit être d’une belle couleur rouge, il Beurre de Provence, syn. de aillolis.

— Loc. fam. Comme dans du beurre, comme du beurre, Aisément, sans peine, avec la plus grande facilité : La hache entra dans l’arbre comme dans nu beurre. Voilà un gigot qui se coupe comme du beurre, il Fondre comme du beurre, Fondre à la moindre chaleur, maigrir rapidement, suer abondamment, se dissiper proinptement : Ces bougies fondent comme du beurre. Sa fortune a fondu dans ses mains comme du beurre. Il faudrait se résoudre à fondre comme du beurre, si ce n’était un petit vent frais qui a la charité de souffler de temps en temps. (Racine.) il Avoir du beurre, Être riche. Il Faire son beurre, Faire sa fortune, amasser de l’argent, surtout d’une manière adroite ou illicite : Après ça, les maîtres sont bien ridicules, et j’espère pour lui qu’il a fait son beurrf.. (Balz.) Le père, qui va claquer (mourir) fin courant^ a fait son beurre dans le poult de soie. (L. Pollct.) Un fonctionnaire puni pour avoir fait son beurre trouve quelquefois ce beurre un peu salé. (Commerson.) Il Vendre du beurre, Faire tapisserie, être négligé, délaissé dans une société : Savezvous ce que les jeunes filles, même du meilleur monde, appellent vendre du beurre ? c’est être au bal et ne pas y danser faute de danseurs. (A. Legendre.) Je recommande cette chasse au miroir à toutes les femmes qui ne tiennent pas à vendre du beurre ; depuis que je suis en possession de cette recette, je n’en jamais vendu. (Legendre.) !l Mettre au beurre sur son pain, Augmenter son pécule, ses gages, se procurer un supplément de paye : Le teneur de livres entra dans l’orchestre dirigé par Pons, pour pouvoir mettre quelquefois du beurre sur son pain. (Balz.) il Mettre

BEUR

du beurre dans les épinards, Améliorer sa situation, passer de la gêne à une aisa»ce relative : Ma chère amie, je viens d’être augmenté de cinquante francs par mois ;’cela va mettre un peu de beurre dans nos épinards. Il Promettre plus de beurre que de pain, Faire des promesses exagérées, promettre plus qu’on ne veut ou qu’on ne peut tenir : Votre lettre me plait beaucoup, quoiqu’elle ne me

PROMETTE pas PLUS DE BEURRE QUE DE PAIN.

(Mme du Deff.) Défiez-vous des programmes, des professions de foi, etc. ; ils promettent souvent plus de beurre que de pain. (L.-J. Larcher.) il Avoir les yeux au beurre noir, Avoir les yeux gonflés et meurtris par un coup ou autrement, n II y a du beurre, Se dit d’une affaire qui doit donner quelques profits : // parait qu’il, y a du beurre. (F. Soulié.)

— Prov. On ne saurait manier du beurre qu’on ne s’en graisse tes doigts, Se dit de ceux qui manient de l’argent, et qui s’arrangent pour en garder une partie. C’est dans ce sens que 1 on a comparé les impôts, qui vont de la poche du contribuable dans les caisses de l’État, à un morceau de beurre qui s’amoindrirait de plus en plus en passant de

main en main.

— Argot d’atelier, Empâtement : En voilà des toilesI quelle huileI qvel beurre ! quelle pâte ! était-ce léché, torché, tripoté crânement ! (Ed. Plouvier.)

— Comm. Substance grasse et concrète que l’on retire de différents végétaux : Beurre de bambouc, de cacao, de coco, de muscade, de galam.

— Miner. Beurre de montagne, de pierre) de roche, . Sulfate naturel d’alumine, mêle d’argile et d’oxyde de fer, qui forme des masses opaques, jaunes, onctueuses, ayant un aspect analogue à celui.du beurre : Le beurre de montagne se trouve sous forme de stalactiques, dans les cavités de quelques montagnes schisteuses, dans la haute Lusace, en Sibérie, dans Vile de Bornholm, dans la Saxe, etc.

— Métall. Nom que l’on donnait improprement à certaines préparations métalliques, appelées aujourd’hui chlorures ou muriates : Beurre d’antimoine, d’arsenic, de bismuth, d’étain, de zinc.

— Loc. adj. Beurre frais, ou simplement Beurre, Se dit d’une couleur particulière analogue à celle du beurre : L’importance sociale se réfugie tout entière dans le glacé de leurs gants beurre frais et le lustre de leurs bottes vernies. (F. Soulié.) Vêtements négligés, l’éternel brûle-gueule à la bouche, et aux mains des gants beurre frais toujours un peu longs pour ses doigts. (Rog. do Beauv.) Les crânes beurre frais pâlirent d’horreur. (Th. Gaut.) Gigonnet ota sa terrible casquette verte, et montra son crâne couleur BEURRE frais dénué de cheveux. (Balz.) Ce qui fait que tout est au mieux dans te plus galant des quartiers et dans le plus arthuriste des petits tomes beurre frais. (Mornand.)

Une après-midi de dimanche,

Tl s’en vint maquillé de frais,

En habit salants et proprets, .

En gants beurre, en cravate blanche,

Et ruisselant d’eau de senteur.

Rendre visite à son chanteur,

Figaro.

— Encycl. Il est à peu près hors de doute que les Grecs et les Romains ignoraient la. préparation et l’usage du beurre ; il est du. moins certain qu’ils ont dû s’en servir tout au pjus en médecine, à peu près comme on faisait à l’égard du sucre au moyen âge. Le moï grec boutyron, qui désignait le beurre, passe généralement pour un mot d’origine scythi» que ; Pline parle du beurre comme d’une substance rarement employée, et dont on avait emprunté, pour quelques cas, l’usage aux peuples barbares. Le fait est assez curieux, car on sait généralement quelle place importante tenait la vache dans la vie domestique des Aryas primitifs, dont descendent incontestablement les Latins et les Grecs. Le lait, le fromage, le beurre furent les premiers aliments de cette race antique, dont la principale richesse consistait en immenses troupeaux. L’emploi du beurre pour les sacrifices, dit avec beaucoup de sagacité M. Pictet, qui plus tard a pris une si grande extension chez les Aryas de l’Inde, paraît être propre à ces derniers, car la riche synonymie du sanscrit pour le beurre clarifié qu’on versait sur l’autel ne s’étend pas au dehors de l’Inde.

Les autres races aryennes : germanique, slave, celtique, etc., ont, au contraire, conservé l’usage de faire le beurre et gardé fidèlement les noms qui servent à désigner tout ce qui s’y rattache, et qu’on retrouve en sanscrit. Ainsi, la philologie vient ici nous apporter des arguments décisifs pour la solution d’une question historique, sinon très-importante, du moins fort intéressante ; et la plupart des noms servant à désigner la baratte et le barattement dans les différentes langues parlées par les peuples ci-dessus mentionnés, dérivent d’une racine sanscrite : malh, manth, agiter, secouer. Nous n’insisterons pas davantage sur ce sujet ; nous nous bornerons seulement a appeler l’attention de nos lecteurs sur un fait curieux : le mot espagnol manteca, beurre, ne peut évidemment être rattaché à aucun primitif latin ; il faut donv. admettre qu’il est d origine celtibère, et partant celtique, hypothèse d’autant plus vraisemblable que manteca ressemble

BEUR

singulièrement au mot sanscrit manthaga ou mantadja, qui signifie littéralement né de la baratte, mot composé de la racine manth, indiquée plus haut, et de dja, né.

Le beurre est un corps de nature grasse ou huileuse, qui, sous la forme de globules, est en suspension dans le lait et qui s’élève à la surface en vertu de sa moindre densité, entraînant avec lui du sérum et de la matière caséeuse, avec lesquels il forme la crème. Il commence à fondre à 24° du thermomètre centigrade.

D’après M. Broméis, le beurre est composé de cinq corps gras différents, dans les proportions suivantes :

’ Oléine ou butyroléine 30

Margarine. ^ 68

Butyrine.. * j

Caprine [ g

Capréine)

Total iôô-

Les meilleurs beurres de France sont : 1° ceux de Gournay et d’Isigny, en Normandie, expédiés, pour les beurres lins, en petits pots de 250 à 500 grammes, en pots de grès et en tinettes de bois pour les gros beurres, les pots appelés tallevarmes pèsent de 3 à 20 kilogr., les tinettes de 10 jusqu’à 100 kilogr. ; 2« le beurre de Bretagne, ’ habituellement salé à demi-sel, c’est-à-dire a raison de 30 gr. par kilogr. ; 3<> le beurre de Flandre. La Hollande, l’Angleterre et l’Irlande nous fournissent quelquefois aussi des beurres estimés.

La bufflonne, la chamelle, la jument, l’ânesse et même la chèvre et la brebis peuvent donner du beurre ; mais le lait de vache est celui qui sert à fabriquer presque tout le beurre du commerce. Celui qu’on fait avec le lait de brebis est gras, d’un jaune pâle en été, blanc en hiver, et il se garde difficilement ; le beurre de chèvre est blanc, il se conserve mieux, mais il a un goût particulier ; le beurre fait avec le lait d ânesse est blane, meu, fade et difficile a extraire.

Considéré comme aliment, le beurre possède les propriétés nutritives et digestibles de la graisse. « Toutefois, a dit Soubeiran, a raison de l’arôme qui le caractérisu, lo beurre paraît d’une digestion plus facile que les autres graisses, et est plus souvent employé seul que celles-ci, qui servent principalement d’assaisonnement. » En médecine, il sert quelquefois de base a diverses pommades, et notamment a la pommade antiophthalmique du Régent. Destiné à cet usage, le beurre doit toujours être choisi très-frais :

Conditions nécessaires à la fabrication du bon beurre. La première et la plus importante de ces conditions est, sans contredit, la propreté. Sans elle, il est impossible de faire du beurre de bonne qualité, alors même qu’on emploierait le meilleur lait et les procédés de fabrication les plus parfaits. On ne se fait pas généralement une idée assez juste de tous les soins minutieux que les bonnes ménagères de Bretagne ou de Normandie doivent prendre pour confectionner ces beurres renommés qui portent les noms d’Isigny ou de la Prévalaye. Le bon lait faisant le bon beurre, il est indis| pensable que le lait soit débarrassé, aussitôt après la traite, de toutes les matières étrangères qui peuvent le salir ou l’altérer. On devra surtout avoir soin de no pas le laisser s’aigrir. Le lait aigre donne un beurre plus abondant, mais qui est presque toujours d une qualité inférieure. Dans la plupart de nos contrées, le beurre est fuit avec de la crème, non avec du lait. On s’y prend de la manière suivante : le lait de la traite est d’abord versé dans des terrines. Il ne faut jamais faire usage de terrines dont le vernis intérieur se trouve ébréché ; car la présure qu’on emploie pour faire cailler le lait s’introduit dans la terre cuite non vernissée et détermine l’acidification du lait avant que la crème ait pu monter. M. Malaguti conseille aussi d’ajouter au lait de 1 à 1 1/2 pour 100 de carbonate de soude, qui empêche l’acidification du lait et active la formation de la crème.

Le lait est abandonné à lui-mémo dans l’état de repos le plus complet. Quand la température de la laiterie est convenable, et, pour qu’elle le soit, il importe qu’elle ne s’établisse ni au-dessous de 12° ni au-dessus de 15°, la crème monte à la surface au bout de vingt-quatre heures environ. Après trente-six heures, la séparation est complète ; mais, le plus souvent, la température de la laiterie est trop basse ou trop élevée. Dans le premier cas, en automne et en hiver, il faut attendre de quarante-cinq a soixante heures, à moins de chauffer la laiterie ; dans le second cas, la crème monte très-vite, souvent trop vite, et il en reste dans le fromage ; au bout de quinze ou seize heures, au plus de vingt-quatre heures, toute la crème qui peut se séparer est à la surface.

La crème qui se sépare la première est toujours la plus grasse et la meilleure ; c’est la seule qu’on doive employer lorsquon veut faire du beurre très-fin.

Nous avons vu que la température de la laiterie ne doit être ni trop basse ni trop haute ; en effet, pour que l’agglomération des globules butyreux puisse avoir lieu, il faut que la matière grasse ne soit ni trop solide ni trop liquide. Il en est de même de la crème : pour qu’on puisse en extraire le beurre, il faut une chaleur de 12 à 14°. À une températura