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BAH

BAHMLIN, AOBAL ou RADJAH, groupe d’îles situé dans le golfe Persique, sur la côte i E. de l’Arabie, par 26» ÏO’ lat. N. et 4$° 20’ ïong. E, Les lies principales sont : Bahrein, i qui a donné son nom au groupe tout entier ; : Maharag, Arag et Tamahoy, bordées de bri- i santsoù se trouventles fameux bancs d’hultros qui fournissent les plus belles perles d’Orient. I Ces lies sont gouvernées par un cheik arabe, tributaire de Piman de Mascate, et résidant à M ah arag. I

BAIIR-EL-ABIAD (fleuve blanc), nom que ] porte le Nil dans la partie supérieure de son icours jusqu’à sa jonction avec le Bahr-el- | Azreck. Il Bahr-el-Abiad, nom proposé par ( M. Balbi pour là contrée arrosée par le Nil, supérieur et comprenant le royaume desBehrs, les territoires des Dinkas, des Barrys et des. Schelouks. Il Bahr-el-Azrkck (fleuve bleu), rivière de l’Afrique orientale, prend sa source | en Abyssinie, dan3 le pays des Agaous, traverse le lacDembéa, arrose les pays de Goyam, de Damot, de Sennaar, forme plusieurs cascades dont la plus élevée a 03 m. de hauteur, et se joint au Bahr-el-Abiad après un cours ! de 1,000. kil. Il Bahr-el-Giiazal, vallée de i l’Afrique orientale, entre 9<> et 10° de lat. N., et 26°-27° long. E. ; elle doit son nom aux phénomènes de mirage que les Arabes appellent de ce nom, ou mer de la Gazelle. Il Bahr-elSuez, bras occidental du golfe Arabique.

BARR-YOUCEF (fleuve de Joseph), branche occidentale du Nil, formant un canal qui longe le pied de la chaîne libyque et que la tradition copte attribue h. Joseph. Cette branche se prolonge sous différents noms dans toute l’Égypte moyenne depuis Farchout jusqu’au-dessous do Gizeh.

bahudÂ, nom que l’on donne, dans la mythologie indienne, à une rivière qui paraît être la mémo que l’Hydaspe des Grecs, lo Béhut des Indiens.

BAHUT s. m. (ba-hu — du bas lat. bahudum, qui se retrouve lui-même dans le tud. behuotan, behoodan, garder, conserver, mettre en réserve, qui est lui-même composé de la prép. be, bei, et de huotan, hoodan, garder, conserver, d’où notre mot hutte, endroit do réserve, endroit où l’on garde des provisions. Garder, conserver, se dit en ail. beliûtten, en dan. hytien, en holl. behouden, etc. Mais il nous semble que c’est aller chercher bien loin ce que nous avons ici sous la main : dans lo celtique, nous trouvons le mot bahu, qui signifie coffre dont le dessus est fait en rond. Comme nous venons do le voir, ce mot revôt une forme similaire dans presque toutes les langues). Coffre dont le couvercle est ordinairement bombé : Il avait un pauvre mobilier, un vieux bahut pour buffet. (Balz.} Un grabat, une escabelle, une cruche et un bahut disjoint, composaient l’ameublement de cette espèce de loge. (Balz.)

Ici deux grands bahuts, deux tabourets boiteux. A. i>e Musset.

Il S’est dit d’abord pour le cuir dont un coffro était recouvert.

— Par ext. Huche à serrer le pain : Le pain manQuait dans le bahut. (G. Sand.) Elle se nourrit de vieux restes qu’elle va ramasser dans le fond des bahuts, quand il n’y a personne à la cuisine. (G. Sand.)

— Sorte do meuble ancien en forme d’armoiro : Un bahut sculpté. Ces vieux bahuts, aujourd’hui si recherchés par nos antiquaires, étaient l’arsenal ou les femmes puisaient les trésors de leur toilette. (Balz.) Dans ses descriptions d’intérieur, Balzac ne nous fait pas grâce du moindre clou d’un bahut. (J.-L. Larcher.) On voit au musée d’Orléans un trèsbeau bahut du xiv« siècle, provenant de l’église de Saint-Aignan, et dont la face représente le sacre d’un roi. (Lévy.)

— Rem. Le mot bahut servant lo plus souvent à désigner un meuble de rebut, ûno antiquaille sans valeur, les collégiens s’en sont emparés pour désigner l’établissement où l’on initie leur esprit aux beautés d’Homère et de Virgile, mais aussi où l’estomac digère plus de haricots que de faisans, et c’est sous cette dernière impression qu’ils ont baptisé de ce nom énergique le collège et la pension : C’est lundi prochain que je rentre au bahut. Lorsque j’eus été mis à la porte de mon dernier bahut. (Chenu.) il Ces chers* enfants, qui apprennent au collège autre chose que la langue harmonieuse de Racine^ ont mémo étendu cette expression au domicile do leurs auteurs, et ils disent le bahut paternel.

— Art milit. anc. Sorte de coffre pour les munitions et les bagages, qui a été remplacé par le fourgon.

— Arcbit. Mur bas destiné à porter un comble au-dessus d’un chéneau, l’arcature à jour d’un cloître, une grille, etc. : On trouve, à la Sainte-Chapelle de Paris, des bahut3 ainsi couronnés. (Viollet-lc-Duc.) Quelquefois même les bahuts des combles sont établis sur des arcs de décharge. (Viollet-le-Duc.) Il Appui en bahut, appui taillé en bahut, Appui dont le haut est bombé comme le couvercle d’un bahut ; L’appui de ce quai est taillé en bahut. (Acad.)

— Hortic. En dos de bahut, En bahut ; Se dit d’une planche ou d’une couche, lorsqu ello est bombée sur sa largeur pour favoriser l’écoulement des eaux.

bMïuter v. n. ou intr. (ba-u-té). Faire tapage, dans le langage des écoliers : Ce soir,

BAI

nous caboterons à l’étude, it C’est une allusion au bahutier, qui fait beaucoup de bruit pour enfoncer ses clous.

BAHUTEUR s. m. (ba-u-teur — rad. bahuter). Tapageur, dans le langage des écoliers, et aussi des étudiants.

BAHUTIER adj. m. (ba-u-ti-é-rad. bahut). Qui est propre à porter le bagage, lo bahut, en parlant d’un cheval : Cheval bahutier. Il V. mot.

BAHUTIER s. m. fba-u-ti-é — rad. bahut). Tcchn. Artisan qui fait des bahuts, des coffres, des malles, etc. : Quand l’expression de bahut fut appliquée à un véritable meuble, le mot de bahutier n’était plus en usage, et c’étaient les huchiers qui le menuisaient. (L. de Laborde.)

— Prov. Il ressemble aux bahutiers, il fait plus de bruit que de besogne, Il fait plus do bruit, plus d’embarras que de travail. Expression qui vient du grand bruit que font les bahutiers, lorsqu’ils enfoncent des clous dans les planches de leurs coffres.

— Art milit. anc. Nom que Von donnait aux soldats chargés de la garde des bahuts ou fourgons de bagages et de munitions.

BAI, BAIE adj. (be — du lat. badins, brun), Manég. Qui est d’un rouge brun, en parlant des chevaux : Un chevaine. Une jument baie. Des chevaux bais. // faisoit à son cheval changer de poil selon les festes, de bai brun, d’alesan, de gris pommelé, de rouan. (Rabel.)

— Quand on désigne la nuance, on dit elliptiquement et invariablement : Des chevaux bai foncé, bai clair, bai fauve, bai cerise, bai châtain, bai marron, bai brun. Jument bai foncé, bai clair, etc. Six carrosses avec des chevaux bai brun. (Rog. de Beauv.) Peut-être faudrait-il compter pour beaucoup sa grosse vieille jument bai brun qui traînait la carriole. (Balz.)

Bai miroité on d miroir, Dont le corps est parsemé de taches rondes d’une teinto plus claire que la teinte générale : Cheval bai À miroir. Cavale bai miroité.

— Substantiv. Cheval bai, cavale baie : Un beau bai. Une calèche attelée de deux bais. Il descendit dans l’écurie, non sans un dépit secret de ce que le comte avait mis la main sur un attelage qui renvoyait ses bais au numéro deux dans l’esprit des connaisseurs. (Alex. Dum.)

— s. m. Couleur baie : Un bai clair. Un bai brun. Un bai fauve. Un bai cerise. Un bai c/i<3- tain. Un bai doré.

— Le mot bai s’est appliqué autrefois aux personnes, avec le sens de blond.

— Homonymes. Baie, bée, bey,

BAI ou BAIS, en ital. BAJ (Thomas), chanr

teur et compositeur italien, né dans la seconde moitié duxvii" siècle. Après avoir été pendant plusieurs années ténor a la chapelle du Vatican, il fut nommé maître de cette chapelle en 1713, honneur dont il ne jouit pas longtemps, car il mourut l’année suivante. Un seul ouvrage, mais un chef-d’œuvre complet, a immortalisé son nom, le Miserere. Depuis plus d’un siècle, le Miserere d’Allegri était seul exécuté pendant la semaine sainte à la chapelle pontificale. Sur la prière des chantres, Bai écrivit un nouveau Miserere qu’on trouva si beau, qu’il fut chanté chaque année pendant l’époque consacrée, concurremment avec celui d’Allegri jusqu’en 1761. Plusieurs grands maîtres se sont essayés dons le Miserere, entre autres Vartini en 1768, et plus tard Pasquale Pisari ; mais aucune de ces tentatives ne fut couronnée de succès, et depuis ces essais infructueux, on n’a cessé de chanter chaque

année le Miserere de Bai. Il existe encore de cet auteur diverses œuvres religieuses manuscrites.

BAIAN, célèbre magicien, fils de Siméon, roi des Bulgares, qui passait pour se transformer en bête féroce, quand il voulait effrayer son peuple,

BAÏANISME -s. m. fba-ia-ni-sme — rad. Baïus). Théol. Ensemble des doctrines théologiques de Baïus. il On dit aussi bayawsme et baïisme.

— Encycl. ■ Le fond du baïanisme, dit l’abbé Rohrbacher (Histoire universelle de l’Église catholique), c’est la confusion de la grâce et de la nature. Suivant Baïus, comme suivant Luther, la gloire ou la vision intuitive de Dieu en lui-même n’est pas une fin surnaturelle à l’homme, ni la grâce un don surnaturel, un moyen surnaturel pour y parvenir. L’une et l’autro sont une partie intégrante de la nature humaine, comme d’être composée d’un corps et d’une âme, d’avoir des yeux et des oreilles. Suivant Baïus, comme suivant Luther, l’homme déchu ne peut plus faire que le mal, toutes les couvres des infidèles sont des péchés, etc. »

On peut rapporter les diverses propositions qui constituent le baïanisme à trois chefs principaux : 1° l’innocence primitive ou édénique ; 2° la déchéance originelle ; 3» la réparation ou la rédemption par la croix.

1« Suivant Baïus, on ne saurait distinguer dans l’homme, tel qu’il est sorti des mains du Créateur, c’est-à-dire intègre, la nature et la grâce, 1 innocence et la justice ; pour une créature raisonnable et sans tache, il n’y a pas deux fins, une fin naturelle et une fin surnaturelle gratuitement ajoutée à lo première ; il n’y a qu’une fin. qui est la béatitude céleste.

—BAI

Dieu ne pouvait créer l’homme en dehors de cette fin ; il ne pouvait lui assigner une autre destination. « L élévation et l’exaltation à la participation de la divine nature, dit Baïus, fut chose due k l’intégrité de la première création, et, par suite, elle doit être dite naturelle et non surnaturelle. Absurde est le sentiment de ceux qui disent que l’homme, dès le commencement, fut élevé au-dessus de la condition de sa nature, afin qu’il honorât Dieu surnaturellement par la foi, l’espérance et la charité. » Ainsi, pour Baïus, cette fin de l’homme, qui est la gloire ou la vision béatifique de Dieu, est enfermée dans le fait même de la création, c’est-à-dire essentielle à la nature de l’homme innocent, et ne peut être rapportée à une prétendue adoption divine qui aurait suivi la création et élevé l’homme au-dessus de sa condition naturelle. Il en résulte que l’homme innocent avait droit aux moyens d’atteindre cette fin ; que Dieu ne pouvait les lui refusersans déroger à sa bonté, a sa sainteté, à sa justice ; que ces moyens ne méritent le nom de grâce qu’autant qu’on se sert de ce mot pour désigner les dons, les bienfaits de la création elle-même ; que, dans l’état d’innocence, le mérite des vertus et des bonnes actions était purement naturel ; que 1». félicité éternelle attachée à ces mérites était une pure rétribution où la libéralité gratuite de Dieu n’entrait pour rien ; que l’homme innocent était a l’abri de l’ignorance, de la souffrance et de la mort en vertu de sa création ; que l’exemption de tous ces maux était une dette que Dieu payait à l’état d’innocence, un ordre ét&blv par la loi naturelle toujours invariable parce qu’elle a pour objet ce qui est essentiellement bon et juste ; que Dieu n’aurait pu créer, dès le principe, l’homme tel qu’il naît maintenant, c’est-à-dire exposé à la souffrance et sujet a la mort ; que la souffrance et la mort ont nécessairement pour origine le péché, soit actuel, soit originel.

2° Passons à. la théorie baïaniste du poché originel. Pour Baïus le péché originel n’est pas simplement négatif ; il ne consiste pas dans la privation de l’état surnaturel, do la grâce, dans la réduction de l’homme a la pure nature et à la nature amoindrie ; il mérite proprement et dans un sens positif lo nom de péché ; il est constitué par la volonté même de l’enfant, volonté in habitu, ’ qui n’attend pour se manifester in actu que 1 âge de raison. Lo transmission de cet état virtuellement mauvais de la volonté ne présente pas d’autre mystère que celle des maladies dont nous recevons le germe en naissant ; elle.se ramène ainsi à une grande loi parfaitement démontrée par l’expérience. Cette théorie du péché originel renferme deux conséquences : la première, qu’en vertu de la loi générale de transmission par l’hérédité, tout péché actuel se transmet naturellement à la postérité du pécheur et peut devenir originel ; la seconde, que l’état de déchéance dans lequel nous naissons exclut toute efficacité du libre arbitre pour le bien, Baïus n’hésite pas à accepter ces conséquences. —«Tout péché, dit-il, a, par sa nature, la force d’infecter lo transgresseur et toute sa postérité en la même manière que nous a infectés lo première transgression.

— Dans l’état de déchéance, le libre arbitre sans le secours de Dieu ne vaut que pour le péché.— C’est une erreur pélagienne de dire qu’il peut y avoir dans l’homme déchu quelque chose de bon naturellement, c’est-à-dire tirant son origine des seules forces de la nature. — Tout ce que fait le pécheur ou l’esclave du péché est péché.—Toutes les œuvres des infidèles sont des péchés, et les vertus des philosophes sont des vices.—L’homme déchu ne peut résister, sans le secours de la grâce, h aucune tentation. — Il ne peut y avoir d’honnêteté naturelle, de justice naturelle, d’amour naturel de Dieu, chez l’homme déchu.

— Entre la cupidité dominante et la charité dominante, entre l’amour divin et l’amour humain illicite et damnable, il n’y a pas de milieu, c’est-à-dire pas d’amour humain licite, pas d’affections naturelles innocentes, louables.

— Dans tous ses actes, le pécheur obéit à la cupidité dominante. » Baïus cependant n’entend pas, comme Luther, nier le libre arbitre ; mais son libre arbitre s’accommode de la. nécessité interne de faire le mal et ne repousse que la violence externe ou lacoaction. « Ce qui est fait volontairement, dit-il, bien qu’il soit fait nécessairement, est cependant fait librement. » Il ajoute que bien que nécessité au mal et impuissant au bien, l’homme déchu n’en est|pas moins criminel, ni moins punissable devant Dieu.

3« Comment Baïus et ses partisans conçoivent-ils la réparation de la nature humaine déchue ? ils disent formellement que le sacrifice de la messe ne mérite pas plus le nom de sacrifice que toute œuvre faite en vue de s’unira Dieu ; que la rétribution de la vie éternelle s’accorde aux bonnes actions sans avoir égard aux mérites de J.-C ; qu’elle n’est pas même, à proprement parler, une grâce de Dieu, mais l’effet et la suite de la loi naturelle, en vertu de laquelle le royaume céleste est le salaire de l’obéissance à la loi ; que toute bonne œuvre est de sa nature méritoire du ciel, comme toute mauvaise est de sa nature méritoire delà damnation ; que le mérite des œuvres vient uniquement de l’obéissance à la loi ; qu’il ne saurait y avoir d’autre obéissance à la loi que celle qui Daît de la charité et qui est inspirée par le Saint-Esprit. La justification des adultes, selon

BAI

Baïus, consiste dans la pratique des bonnes œuvres et la rémission des péchés. Lo charité, principe des bonnes œuvres, et la rémission des péchés, sont deux faits indépendants et qui ne sont pas nécessairement liés l’un a l’autre. La charité justifie actuellement, mais n’efface pas le passé ; les sacrements de baptême et de pénitence ne confèrent pas la grâce sanctifiante, ne remettent pas la coulpo du péché, mais la peine seulement. Il en résulte qu’il peut y avoir dans les pénitents et les catéchumènes une charité parfaite sans que les péchés leur soient remis ; qu’un homme, en péché mortel, peut avoir une charité parfaite sans cesser d’être sujet à la damnation éternelle, parce que la contrition, même parfaite, jointe à la charité et au désir du sacrement, ne remet point la dette de la peine éternelle, hors le cas de nécessité ou de martyre, sans la réception actuelle du sacrement. La théorie baïaniste du mérite est très-simple et découle de celle du péché originel. « Il n’y a point de vrais mérites, dit Baïus, qui ne soient conférés gratuitement à des indignes ; par conséquent, le fidèle n’est pour rien dans ses mérites ; les bonnes œuvres qui lo justifient lui sont, en réalité, étrangères ; elles ne peuvent satisfaire à la justice de Dieu pour les peines temporelles qui restent à expier après la rémission des péchés ; ces peines no peuvent être rachetées même par les souffrances des saints : c’est la négation des œuvres surérogatoires et de la réversibilité des satisfactions.»

a Le baïanisme, dit l’abbé Borgicr (Dictionnaire de théologie), est, comme le remarque solidement le théologien Montagne, un composé bizarre de pélagianisine, quant à ce qui regarde l’état de nature innocente, de luthéranisme et de calvinisme pour ce qui concerne l’état de nature tombée. Quant à l’état de nature réparéo, les sentiments do Baïus sur la justification, l’efficacité des sacrements et le mérite des bonnes œuvres sont directement opposés à la doctrine du concile

de Trente Il n’est pas nécessaire d’être

profond théologien pour démontrer que ce système est absurde en lui-même. Sur quoi se fonde Baïus pour soutenir que Dieu devait à la nature innocente tous les privilèges et les avantages accordés à Adam : Dieu sans doute ne peut pas créer l’homme en état de péché, cela serait contraire à sa sainteté et à sa justice ■ mais comment prouvera-t-on que Dieu devait à l’homme exempt de péché toile mesure des dons spirituels et corporels, tel degré de bonheur et de bien-être pour le présent et pour l’avenir. On ne peut fonder cette prétention que sur les sophismes des anciens philosophes et des manichéens touchant l’origine du mal. Dieu, essentiellement maître de ses dons et tout-puissant, peut en accorder plus ou moins à l’infini et en telle mesure qu’il lui plaît. C’est le principe qu’a posé saint Augustin avec raison pour réfuter les manichéens. Il y a de l’absurdité à supposer quo Dieu doit quelque chose à une créature à laquelle il ne doit pas même l’existence. Dnns cette hypothèse ridicule, il serait impossiblo de concilier la permission du péché avec la justice, la sagesse, la sainteté et la bonté de Dieu. S’il devait tant de faveurs à l’homme innocent, pourquoi ne lui devaital pas aussi la grâce efficace pour persévérer dans l’innocence î Dans ce môme système, la rédemption du monde par J.-C. est absolument nulle. Le genre humain avait tout perdu par lo péché d’Adam ; que lui a rendu J.-C ? de quoi l’a-t-il racheté ou délivré ? Nous n’en savons rien... Si au moins ce système était consolant, capable de nous inspirer l’amour do Dieu et le goût des bonnes œuvres, on no serait plus surpris de l’opiniâtreté avec laquelle il a été soutenu ; mais il n’en est aucun qui soit plus propre à désoler et à décourager les âmes vertueuses, à faire envisager Dieu comme un tyran et notre existence comme un malheur. »

Quelle place le baïanisme occupe-t-il dans l’histoire des systèmes théologiquus orthothodoxes ou hétérodoxes qu’a suscités la question des rapports de la nature et de la grâce, du libre arbitre et de la toute-puissante action divine ? Écoutez M. l’abbé Le Noir : * Au delà du cercle orthodoxe se trouvent, aux deux extrémités opposées, le naturalisme excessif et le surnaturalisme excessif. Le naturalisme excessif se manifeste principalement dans lo pélagianisme et le semi-pélagianisme. Pelage soutient que l’activité humaine se suffit à elle-même pour élever l’homme au plus haut de la sainteté et de la gloire, et les semi-pélagiens croient modifier suffisamment l’exagération de leur maître en disant qu’il faut lagrâce, la motion divine, mais que cette grâce est accordée à un premier mouvement de volonté purement humain dans le sens de la vertu, en sorte que c’est l’homme qui a la

priorité dans l’œuvre de sa sanctification

Le surnaturalisme excessif se développe sur une plus grande échelle ; il prend toutes les formes, il emploie toutes les ruses- C’est le prédestinatianisme, le wicléfisme, le luthéranisme, le calvinisme, le baïanisme, le jansénisme. L’homme perd son autonomio et sa liberté -, il devient un instrument purement passif dans la toute - science et la toute-puissance ; il n’est plus rien ; Dieu est tout en lui ; il est absorbé et son activité est neutralisée. Ballotté entre les mauvais penchants et les attraits de la grâce, il ira où